Visa pour l'Asie du Sud-Est

Publication animée

VISA POUR

L’ASIE DU SUD-EST

Petit guide pratique du startupper dans le Sud-Est asiatique

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L’ASIE DU SUD-EST

Petit guide pratique du startupper dans le Sud-Est asiatique

VISA POUR L’ASIE DU SUD-EST

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PRÉFACE L’écosystème Tech asiatique n’a pas fini de vous surprendre.

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Miriam Yaker, Manager Investment Research in ASEAN Markets

L’ASEAN : DIVERSITÉ, CRÉATIVITÉ ET INNOVATION Un développement hors du commun porté par une population jeune, ambitieuse et très connectée.

Parag Khanna, spécialiste des relations internationales, affirme que le « siècle asiatique » a commencé, compte tenu de l’ascension structurelle et non cyclique de la région. L’émergence du continent asiatique constitue un véritable changement dans le centre de gravité du monde. Depuis plus d’une décennie, on vante les mérites du continent asiatique qui bénéficie d’un potentiel économique énorme. Les prévisions les plus optimistes se sont réalisées bien plus vite que prévu sur l’ensemble du continent. En 2000, l’Asie représentait 33 % du produit intérieur brut (PIB) mondial (en PPA), le continent est sur la bonne voie pour atteindre 50 % d’ici 2040. Le développement économique soutenu et continu dont il fait preuve est dû à son intégration dans les flux mondiaux du commerce et des capitaux, à l’émergence d’une consommation de masse et à sa capacité à innover. Il faut cependant faire preuve de prudence lorsque l’on aborde le continent asiatique dans son ensemble afin d’éviter les généralités. L’Asie représente 60 % de la population mondiale, couvrant une myriade de langues, d’ethnies et de religions. Le développement économique des pays d’Asie se fait également à un rythme inégal du fait des modes de gouvernance, des systèmes économiques et des facteurs de développement humain très variés. Cependant, on constate dans l’ensemble de la région une amélioration des principaux indicateurs économiques et sociaux.

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PRÉFACE

Intéressons-nous de plus près à l’Asie du Sud-Est et à l’ASEAN, organisation politique, économique et culturellequi relie ces pays. Composéede l’Indonésie, de laMalaisie, des Philippines, deSingapour, de la Thaïlande,duBrunei,duVietnam,duLaos,duMyanmaretduCambodge, l’ASEANestunecommunauté d’États indépendants de plus de 600 millions d’habitants. Avec un taux de croissance projeté de 5 % à 7 % pour les prochaines années, l’ASEAN devrait devenir le quatrième plus grand marché d’ici 2050 après la Chine, les États-Unis et l’Union européenne. De nombreuses entreprises françaises se sont implantées dans les pays de la région pour bénéficier du faible coût de la main-d’œuvre et de son effervescence économique. En 2018, le service économique de Jakarta a recensé 178 filiales de sociétés françaises en Indonésie avec une vingtaine d’entreprises locales créées par des Français. Parmi les sociétés françaises présentes dans le pays, on compte 31 membres du CAC 40, la majorité dans le secteur des services (Crédit Agricole, AXA) mais également dans les secteurs de l’industrie (Michelin) et de l’énergie (Engie, EDF). L’attrait des entreprises françaises pour la région est d’autant plus significatif à Singapour, qui regroupe les 2/3 des investissements français dans la région et concentre plus de 800 filiales d’entreprises françaises. Les 2000 entreprises françaises implantées dans les pays de la zone ASEAN procurent 240000 emplois, et leurs investissements dans la région s’élèvent à 16,2 milliards d’euros. La zone devrait être le fer de lance de la révolution numérique grâce à son poids économique et à l’agilité de sa population dont plus de la moitié a moins de trente ans. Si la majorité des habitants en Malaisie, en Thaïlande et à Singapour ont accès à Internet, ce n’est pas le cas de la majorité de la population du Cambodge, du Myanmar et du Laos qui est tenue à l’écart de cette révolution numérique. Il existe des programmes pour promouvoir l’innovation et ainsi permettre d’aider les pays de l’ASEAN à construire une communauté plus connectée, plus dynamique et assurer la pérennité économique de la région.

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L’ASEAN est cependant consciente des défis qu’il lui reste à affronter pour véritablement s’imposer comme leader de la révolution technologique. Il est primordial de démocratiser l’accès à Internet pour l’ensemble de la population, d’améliorer le climat des affaires, de développer ses dispositifs de sécurité sociale, d’adapter le système éducatif aux besoins du numérique, autant de priorités déjà prises en main par les pays membres de l’ASEAN. Les 23 et 24 octobre 2019 se tenait notamment la 19 e réunion des ministres des Télécommunications et de la Technologie de l’information de l’ASEAN (TELMIN) au Laos autour du thème « Connectivité intelligente pour la transformation numérique de l’ASEAN ». Singapour est la tête de proue de l’innovation dans la région. La cité-État a récemment lancé la Global Innovation Alliance à Bangkok 1 et Jakarta afin d’optimiser la coopération entre les différents États et favoriser la compréhension des écosystèmes d’innovation en Thaïlande et en Indonésie. Singapour montre la voie dans la zone grâce à son environnement favorable aux affaires qui attire de nombreux investisseurs et entrepreneurs. Les entreprises peuvent ensuite se développer dans le reste de la région dont la taille de marché est propice à la réussite économique. L’ensemble de la région montre un intérêt considérable pour l’entrepreneuriat et l’innovation. Comme le constate le Global Entrepreneurship Monitor dans son rapport, l’attention des médias pour l’entrepreneuriat est élevée en Asie du Sud-Est, principalement en Thaïlande (87 %), en Indonésie (80 %) et à Taïwan (76 %). L’esprit startup est également présent en Thaïlande et en Indonésie, où deux tiers des adultes pensent qu’il est facile de créer une entreprise. Créer son entreprise est donc perçu comme un véritable choix de carrière pour réussir et s’élever socialement en Asie du Sud-Est. La stratégie saute-mouton ou leapfrogging des pays asiatiques a permis à la région de réaliser des avancées technologiques. Les pays de l’ASEAN ont ainsi réussi dans certains secteurs à faire de leur retard économique un avantage. Le Laos a directement développé une énergie propre, l’hydraulique, sans passer par le charbon ni le nucléaire et s’impose aujourd’hui comme un leader du secteur dans la région. Dans le domaine bancaire, la carte n’a même pas eu le temps de se démocratiser qu’elle se voit déjà supplantée par le paiement numérique. Les services bancaires traditionnels peuvent sembler superflus quand de nouvelles applications comme OVO viennent prendre la relève. La France accorde une attention toute particulière à l’ASEAN. Elle tente notamment de faire fructifier ses relations économiques, politiques et culturelles avec les pays de la région. Ces dernières années, le gouvernement français leur a montré son intérêt au travers de nombreux déplacements effectués par le président de la République et ses ministres. Le Sénat et l’Assemblée nationale ont réalisé deux rapports sur les opportunités et les défis pour la France face à l’émergence de l’Asie du Sud-Est. Ces rapports aboutissent à la conclusion que les secteurs public et privé doivent se focaliser sur deux pays en priorité : Singapour, porte d’entrée des pays de l’ASEAN et l’Indonésie, forte de la taille de son marché intérieur.

6 VISA POUR L’ASIE DU SUD-EST

Si la Thaïlande a longtemps été le partenaire privilégié de l’Hexagone en Asie du Sud-Est, ces dernières années, la France a développé en priorité ses relations avec Singapour. À la suite de la visite officielle du président François Hollande à Singapour en 2017, les deux pays ont décidé de déclarer 2018 Année de l’innovation ( Year of Innovation – YoI ). Dans le cadre de ce partenariat, les deux pays ont intensifié leur coopération en matière d’innovation, moteur des transformations économiques et sociales. Cette collaboration annuelle étroite vise sur le long terme à intensifier les relations dans ce domaine entre la France et Singapour. Tout au long de l’année 2018, plusieurs événements ont eu lieu en France et à Singapour afin de « promouvoir et stimuler des réflexions, initiatives et recherches ainsi que des partenariats et échanges d’idées pour répondre aux défis et opportunités du monde actuel », selon l’ambassade de France à Singapour. Les axes prioritaires de ce partenariat concernent :

PRÉFACE

les villes intelligentes et durables – smart city  ; la Fintech ; la santé, le vieillissement et les biotechnologies ; l’aéronautique et la fabrication avancée ; les startups et les technologies émergentes ; l’éducation et la formation continue.

En parallèle, les communautés de La French Tech se sont implantées en Asie du Sud-Est. La French Tech est une initiative du gouvernement français, lancée en 2013, avec comme objectif de favoriser la création d’entreprises françaises dans les secteurs technologiques et de promouvoir les startups déjà existantes. La French Tech est aujourd’hui présente à Bangkok, Singapour et à Phnom Penh (Cambodge). Les différents programmes qui ont été mis en place, associés au potentiel économique de la région, ont favorisé la création de nombreuses entreprises françaises. On peut citer les startups à succès comme Halodoc et OnlinePajak en Indonésie, GetLinks, SiamCarDeal et Cookly en Thaïlande ou encore Sleek, Agorize et BeeBryte à Singapour. Ces startups ont su saisir les opportunités qui font la richesse entrepreneuriale de l’ASEAN.

Il est incontestable que la France et les pays de l’ASEAN doivent favoriser une collaboration intense et coopérer pour permettre à chaque pays d’affronter sereinement les défis de demain.

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Guillaume Lefebvre, Senior Country Officer Crédit Agricole CIB Nordic Region initiateur de la collection « Visa pour », les petits guides pratiques du startupper

Avec l’Asie du Sud-Est, nous avons voulu donner une suite au guide pratique du startupper dans les pays nordiques, intitulé Visa pour l’Europe du Nord. Celui-ci était le prélude à une collection de guides inédits, permettant la découverte de nouveaux territoires, mais sous un angle professionnel. En effet, si chaque pays abrite une histoire, des arts, des coutumes, des sites naturels et desmonuments, que l’on peut découvrir en tant que touriste, il est tout autant l’expression d’une communauté sociale en marche vers son avenir, notamment économique. La vocation de la collection « Visa pour » est d’inciter les entrepreneurs à explorer de nouveaux territoires où exercer leur esprit d’innovation, que ce soit pour développer une startup à l’étranger ou en créer une nouvelle dans un écosystème favorable à la réalisation de leur projet : « Il faut toujours un peu partir pour créer » , G. Delatour. Comme le précédent, ce guide du startupper en Asie du Sud-Est est écrit par des professionnels et des passionnés français exerçant dans la région. Il se veut très opérationnel pour vous donner l’envie de découvrir le formidable potentiel d’innovation de cette zone et vous accompagner dans vos premières visites, puis vos premières affaires, voire votre installation.

Il s’articule en trois parties :

une présentation de chacun des pays étudiés (Indonésie, Thaïlande, Singapour) sous l’angle économique et sociologique notamment, suivie d’un focus sur l’innovation ; un volet pratique ; pour chaque pays, il délivre un véritable mode d’emploi pour donner vie à son projet. Il répertorie tous les leviers susceptibles d’aider les startups françaises dans leurs démarches :

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acteurs publics et privés, incubateurs, événements de l’écosystème startup, etc. Les formalités administratives, les spécificités locales en termes de pratique des affaires ou encore les différentes options possibles pour trouver un financement dans le pays sont également détaillées afin de faciliter l’implantation des jeunes pousses françaises ; enfin, la dernière partie du guide apporte de précieux conseils sur les démarches à effectuer auprès des services d’immigration, la vie pratique, les usages et les coutumes spécifiques de chacun des pays d’Asie du Sud-Est. En matière d’avenir et de potentiel de développement, les pages qui suivent ne devraient pas vous décevoir tant elles fourmillent d’informations sur ces pays, dont l’écosystème de l’innovation est foisonnant. Vous y apprendrez que le Sud-Est asiatique est l’un des terreaux les plus fertiles aumonde pour le développement des startups. Ici, tout se fait enmode agile et dans un temps record entre l’idée, son développement, sa mise en œuvre et sa commercialisation. Vous découvrirez en particulier des startups dans le domaine de la distribution à grande échelle, à destination de populations nombreuses. Ce territoire couvre en effet trois pays qui sont essentiels à nos yeux : Singapour, le hub commercial, financier et numérique de la région ; la Thaïlande, dynamique et diversifiée au cœur de l’Asie du Sud-Est ; et l’Indonésie, grande comme l’Amérique et forte de ses 260 millions d’habitants. La crise du Covid-19 a par ailleurs encore démontré toute la capacité d’adaptation de l’écosystème startup local. En deux à trois semaines ont été mises en œuvre des solutions d’intelligence artificielle détectant les sites à fort potentiel d’infection ou permettant la reconnaissance faciale d’un sujet portant un masque. Les robots autonomes, les drones et la télémédecine ont également fait un pas de géant lors de cette crise. L’Asie du Sud-Est est une place vitale pour l’innovation et l’entrepreneuriat dont le potentiel est réel pour les années à venir. Les entrepreneurs d’aujourd’hui ont bien compris tout le potentiel d’un territoire composé de dix pays, 650 millions d’habitants, dont la moitié a moins de 30 ans, pour l’essentiel urbains, bien connectés, et dont le niveau d’éducation progresse d’année en année. Les classes moyennes émergent vite, grâce à deux décennies de croissance à plus de 5 % par an. Et le résultat est sans appel : la région compte 10 500 startups, onze licornes, dont deux « décacornes ». Dix ans auparavant, quatre habitants sur cinq ne possédaient pas de connexion Internet ! Enfin, vous y trouverez une communauté française active avec déjà plus de 20 000 de nos citoyens, regroupés dans les différentes communautés French Tech de la région, réseau d’entraide désormais incontournable.

PRÉFACE

Alors, nous vous souhaitons une bonne lecture et un bon voyage dans ces pays qui ne demandent qu’à accueillir votre envie d’investir et de faire fructifier vos projets.

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SOMMAIRE

Envisager l’Asie du Sud-Est 13

A Des pays qui gagnent à être mieux connus 14

1 I Indonésie : le géant d’Asie du Sud-Est

14 17 21

2 I Thaïlande : une économie diversifiée et ouverte 3 I Singapour : performance et qualité de vie

B ASEAN : une terre d’accueil de l’innovation 25

1 I Un environnement dynamique

25 28 34

2 I Une expertise reconnue dans des secteurs d’avenir

3 I La Fintech, fer de lance de l’innovation

Conseils pratiques par pays 39

L’Indonésie 41

1

Donner vie à son projet 42

A I Renseignez-vous sur l’écosystème 42

42 46

1 I Les acteurs de l’innovation

2 I Les événements de la scène startup

B I Réussissez l’implantation de votre entreprise 47

47 50

1 I Les formalités administratives 2 I Élargissez vos financements

51

3 I La pratique des affaires

2 Conseils pratiques aux nouveaux arrivants 53

A I Démarches auprès des services de l’immigration 53 B I Vie pratique 54 C I Sociologie, usages, coutumes 55

10 VISA POUR L’ASIE DU SUD-EST

La Thaïlande 57

1

Donner vie à son projet 58

A I Renseignez-vous sur l’écosystème 58

SOMMAIRE

58 62

1 I Les acteurs de l’innovation

2 I Les événements de la scène startup

B I Réussissez l’implantation de votre entreprise 63

63 65 67

1 I Les formalités administratives 2 I Élargissez vos financements

3 I La pratique des affaires

2 Conseils pratiques aux nouveaux arrivants 68

A I Démarches auprès des services de l’immigration 68 B I Vie pratique 68 C I Sociologie, usages, coutumes 69

Singapour 73

1

Donner vie à son projet 74

A I Renseignez-vous sur l’écosystème 74

74 80

1 I Les acteurs de l’innovation

2 I Les événements de la scène startup

B I Réussissez l’implantation de votre entreprise 81

81

1 I Les formalités administratives 2 I Élargissez vos financements

84 87

3 I La pratique des affaires

2 Conseils pratiques aux nouveaux arrivants 88

A I Démarches auprès des services de l’immigration 88 B I Vie pratique 89 C I Sociologie, usages, coutumes 90

Conclusion 93 Sources 103 Notes 110

VISA POUR L’ASIE DU SUD-EST

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12 ENVISAGER LE SUD-EST ASIATIQUE

ENVISAGER L’ASIE DU SUD-EST

ENVISAGER LE SUD-EST ASIATIQUE

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DES PAYS QUI GAGNENT À ÊTRE MIEUX CONNUS

A

Le potentiel de l’Asie du Sud-Est est bien souvent sous-estimé par rapport au géant chinois qui fait de l’ombre à cette région florissante. Les atouts des pays d’Asie du Sud-Est sont méconnus du grand public en Europe et pourtant leur manière de vivre, de penser, leur diversité culturelle et leur dynamisme économique gagnent à être connus. Nous avons résumé pour vous les principaux éléments qui permettent de mieux comprendre la vitalité et les aspirations de la région.

1 I INDONÉSIE : LE GÉANT D’ASIE DU SUD-EST

Nature du régime : démocratie Capitale : Jakarta Superficie : 1905000 km 2 Îles : 17500 dont 6000 non habitées Population : 262787403 hab. Utilisateurs d’Internet (2018) : 132,7 millions

Monnaie : roupie indonésienne – IDR Espérance de vie (BM 2015) : 69 ans Taux d’alphabétisation : 92,37% 2

L’Indonésie est le pays le plus peuplé et le plus grand de la région, ce qui lui doit son surnom de « géant d’Asie du Sud-Est ». L’adhésion de l’Indonésie au G20 en 2008, seul pays membre de cette organisation dans la région, a renforcé son rôle de leader au sein de l’ASEAN 3 . Sa taille, sa classe moyenne en pleine expansion et sa croissanceéconomiqueremarquablementstable attirentdenombreux investisseursetcontribuent à réduire considérablement le taux de pauvreté et les inégalités.

Tirée par une consommation soutenue 4 , les ex- portationsetlaréalisationd’investissementsdans les infrastructures, lacroissanceéconomiqueest solide. Depuis 2013, elle croit en moyenne à un taux de5 %par an 5 . Endeux décennies, lePIBpar habitant a progressé de 70 %. De plus, la moitié de la population du pays a moins de 30 ans, ce qui constitue un avantage majeur en termes d’adaptabilitéde lamain-d’œuvreaux nouvelles technologies et envoie un signal positif pour la prospérité future 6 . Avec une dette publique qui

14 ENVISAGER LE SUD-EST ASIATIQUE

The Most Populous Nations on Earth Share of the word population by country (2018)

China* India* US* Indonesia Brasil*

18,70%

17,88%

4,39%

3,54%

2,79%

Pakistan Nigeria* Bangladesh* Russia* Japan* Mexico Philippines* Egypt DRC*

2,69%

2,60%

2,21%

1,93%

1,70% 1,67%

1,43%

1,30% 1,27% 1,27% 1,26%

Vietnam* Ethiopia* Germany Iran* Turkey Thailand*

1,11% 1,10% 1,10%

0,91%

* Countries with estimated population size

Source : IMF

À I Des pays qui gagnent à être mieux connus

représente moins de 30 % du PIB, l’Indonésie peut également se vanter d’avoir la dette/PIB la plusfaibled’Asiegrâceàunepolitiquemonétaire conservatrice. Cela lui confère la confiance des grandes agences de notation S & P, Moody’s, et Fitch qui sont optimistes sur l’avenir du pays. Lacroissancedu tourismeagrandement contri- bué au développement économique du pays. En dix ans, le nombre de visiteurs a presque triplé et les autorités comptent bien continuer à exploitercesecteurprospère.Les infrastructures s’améliorent mais restent encore insuffisantes concernant les équipements touristiques et les infrastructures environnementales. Le gou- vernement indonésien a décidé de faire de ce domaine une priorité et a pour objectif de déve- lopper un tourisme plus solide et durable 7 .

La diversité des ressources naturelles constitue également une richessepour lepays 8 . L’Indoné- sie est le deuxième exportateur d’étain et abrite de vastes gisements demétaux précieux comme l’or, l’argent, le cuivre, le nickel et la bauxite. Le climat indonésien et son sol très fertile en font unpays propiceà laculturedeproduits agricoles de grande valeur comme le caoutchouc, le café et le cacao. L’effet pervers de cette croissance économique et touristique est relatif à la viabilité écologique. L’Indonésie figure parmi les 17 pays « mégadi- vers » soit les plus riches en diversité biologique. Onassisteàuneaugmentationdesfeuxdeforêts illégaux pour défricher les terres, intensifiant la pollution et les coûts sanitaires. L’Indonésie doit faire face à un besoin croissant en électricité

ENVISAGER LE SUD-EST ASIATIQUE

15

à mesure que sa population augmente. Investir dans les énergies renouvelables et les capaci- tés de production peu émettrices de carbone semble donc être la solution la plus viable afin de permettre le développement du pays sur le long terme. Avec 40 % de la population de l’ASEAN, l’Indo- nésie est un « marché incontournable », selon Pascal Furth 9 , chef du service économique de l’ambassade de France à Jakarta. L’Indonésie disposed’uneimportantebasedeconsommation intérieure d’autant que la classe moyenne, dotée d’unpouvoird’achatsoutenuaconsidérablement augmenté ces dernières années, passant de 7% en 2002 à 18 % en 2014. Les investissements étrangersaffluentnotammentdans lecommerce de détail avec l’implantation de Sogo (Japon), Lotte (Corée) ainsi que des Galeries Lafayette. De nombreuses grandes entreprises visent ce marché en plein essor. Cependant, la dispersion du marché, qui s’étend sur quelque 17500 îles et trois fuseaux horaires, complexifie l’implantation des entreprises.

Après lacrisepolitiquede1998, l’Indonésieasubi une transformation profonde. Le pays est au- jourd’hui une démocratie dynamique qui conti- nue à renforcer ses institutions et tente d’enliser la corruption encore très présente. Depuis 2014, la gouvernance est stable avec à la tête du pays Joko Widodo, instigateur de nombreuses réformes visant àmoderniser les infrastructures, déréguler de nouveaux secteurs au profit des investissements étrangers (logistiques, tou- risme, e-commerce) et accroître leniveaude vie des classes défavorisées. Ces réformes sociales et probusiness ont permis aupays deprogresser dans les classements internationaux. En 2018, le US News & World Report Survey a classé l’Indonésie en43 e position des « meilleurs pays où investir » 10 . Dans le classement Doing Business de la Banque mondiale, l’Indonésie était classée 120 e en 2014, elle est désormais classée 73 e sur 190 pays, notamment grâce à la simplification des démarches de création d’entreprise 11 .

Government development spending (% of GDP)

■ Infrastructure

■ Education

■ Health

■ Social assistance

8

6

4

2

0

2011

2012

2013

2014

2015

2016

2017

2018

2010

Source: Author’s calculations based on CEIC data and Indonesian Ministry of Finance

16 ENVISAGER LE SUD-EST ASIATIQUE

Si l’Indonésie est dès aujourd’hui un pays où il est bon d’investir, dans dix ans, ses performances économiques seront encore plus parlantes. En 2030, l’Indonésie sera la 7 e plus grande économie du monde avec plus de 135millions de personnes

enmesuredeconsommeret113millionsdetravail- leursqualifiés.Celaconstituera,dansseulementdix ans, 1,8billiondedollars américains dedébouchés danslesservicesauxconsommateurs,l’agriculture et la pêche, les ressources et l’éducation.

Indonesia today

… and in 2030

16th-largest economy in the world

7th-largest economy in the world

45miomembers of the consuming class

135miomembers of the consuming class

x3

55mio skilled workers

113mio skilled workers

x3

$0,5tnmarket opportunity in consumer services, agriculture and fisheries, resources, and education

$1,8miomarket opportunity in consumer services, agriculture and fisheries, resources, and education

x3,5

2 I THAÏLANDE : UNE ÉCONOMIE DIVERSIFIÉE ET OUVERTE

À I Des pays qui gagnent à être mieux connus

Nature du régime : monarchie constitutionnelle Capitale : Bangkok Superficie : 513120 km 2 Population : 70000000 hab. Utilisateurs d’Internet (2018) : 57 millions Monnaie : baht Espérance de vie (BM 2017) : 75 ans Taux d’alphabétisation : 92,9% 12 La Thaïlande a su tourner le dos à la crise et s’im- poser comme un leader économique en Asie du Sud-Est. En moins d’une génération, une classe moyenne a émergé et constitue aujourd’hui la majoritédelapopulation 13 .Cesuccèséconomique reposesurledynamismedesThaïlandaisetlaforce de secteurs clés comme l’industrie, l’agroalimen- taire, laproductionautomobileet les exportations

de produits électroniques. Entre 1980 et 2017, le PIB a été multiplié par cinq et le taux de pauvreté s’est considérablement réduit, atteignant 7,8% 14 . La Thaïlande a su tirer les leçons de la crise finan- cièrede1997.Lepaysestloind’atteindreleslimites constitutionnelles de déficit de 60%du PIB pour la dette publique et de 3% du PIB pour le déficit

ENVISAGER LE SUD-EST ASIATIQUE

17

budgétaire 15 .Lamajoritédesdépensespubliques sont orientées vers les enjeux sociaux notam- ment la lutte contre la pauvreté, l’éducation et la mise en place d’infrastructures. La résilience financière de la Thaïlande s’explique également par la force de ses exportations, favorisées par la position géographique stratégique du pays. Les réserves de change représentent environ

sept mois d’importations 16 , assurant une résis- tance considérable du baht thaïlandais en cas de choc extérieur. Cependant cet avantage financier peut se retourner. En effet, la valeur du baht a considérablement augmenté, devenant une « valeur refuge » 17 selon le directeur de la Banque centrale de Thaïlande, qui s’inquiète de la force de la monnaie nationale.

Foreign Exchange Reserves (USD Million)

220000

200000

180000

160000

140000

2014

2016

2018

Source: trandingeconomics.com I Bank of Thailand

Foreign Tourist 2010-2018

# TOURISTS (MILLION)

CAGR2010-2018 = 11,5%

45.0 - 40.0 - 35.0 - 30.0 - 25.0 - 20.0 - 15.0 - 10.0 -

38,3

Political Unrest Subprime Crisis

35,0

32,6

29,9

Phoenix incident

26,5

24,8

22,4

MERS

19,2

Coup d’etat

15,9

Euro Debt Crisis

Political Unrest Euro Debt Crisis

Flooding

Political Unrest

5.0 - 0.0 -

2010

2011

2012

2013

2014

2015

2016

2017

2018

Hotel Occupancy(%)

49% 50% 58% 61% 65% 56% 62% 69% 71,4%

Source: Department of Tourism, TAT, The Royal Thai Government, & DTTJ Estimate

18 ENVISAGER LE SUD-EST ASIATIQUE

Le PIB thaïlandais a augmenté de 4,1 % en 2018, taux de croissance le plus important en six ans. Cette croissance est tirée par le secteur des exportations (+7,7 %en2018), laconsommation privée (4,6 %) et l’investissement (3,8 % 18 ) . La croissance économique devrait rester stable durant les prochaines années. Les indicateurs économiques sont au vert avec un taux de chô- mage et une inflation inférieurs à 1 % 19 . Classée 27 e dans le rapport Doing Business de la Banque mondiale 20 , la Thaïlande devance la France et se trouve à seulement trois places de l’Allemagne en termes de facilité à exercer une activité économique. La communauté internationale exprime également sa confiance en l’économie thaïlandaise comme le montre le US News & World Report , qui classe le pays en 8 e position dans la catégorie « meilleur pays dans lequel investir » 21 .

Plages de sable fin, temples dorés, vie nocturne animée. L’industrie touristique est un secteur clé du développement économique du pays. Avec une hausse constante de près de 20 % 22 ces dernières années, le secteur touristique en Thaïlande est l’un des plus dynamiques au monde. Conscient de l’importance du tourisme pour le développement économique du pays, le gouvernement a adopté en 2019 des mesures de promotion de l’activité touristique afin de conserver son attractivité 23 .

À I Des pays qui gagnent à être mieux connus

Real expenditure on GPD (% change)

9 -

8 -

Thai economy forecasted to grow 3.9 % in 2019 *GPD growth 3.6 % in 2018

7 -

6 -

5 -

4 -

3 -

2 -

1 -

0 -

Private consumption

Total Investment

Gouvernment consumption

GPD growth

Exports

Imports

Inflation

■ 2018 ■ 2019F

3.6 3.9

4.6 4.2

3.8 5.1

1.8 2.2

4.2 3.1

8.2 4.6

1.1 1

Sources ADB, NESDB, EIU, & IMF

ENVISAGER LE SUD-EST ASIATIQUE

19

L’État a une place prépondérante dans la mo- dernisation du pays et de ses infrastructures. En 2017, le gouvernement avait déjà lancé son Plan stratégique national sur vingt ans, qui vise à renforcer lacompétitivitédupayspar ledévelop- pementdes infrastructuresélectriques,routières, aéroportuaires et ferroviaires. À présent, le gouvernement souhaite tirer parti de la position géographique stratégique du pays pour faire de la Thaïlande un hub central qui assure une connectivité et une logistique sans faille dans la région. L’Eastern Economic Corridor (EEC) 24 permettra de relier les régions de Rayong, Chachoengsao et Chonburi grâce à l’élaborationd’unnouvel aéroport, d’une lignede trainàgrandevitessereliant lestroisaéroportset la construction dans un second temps de deux ports industriels. Ceprojet ambitieux d’une valeur avoisinant les 50milliards de dollars américains

investis dans les cinq premières années repré- senteunvéritabledéfientermesdecollaboration entre lessecteurspublicetprivé,quisepartagent les dépenses et les responsabilités.

Making inroads

Thailand’sNationalDevelopmentPlanailms to scaleup infrastructure tobring inprivate investors,andenhanceThailand’sglobalcompetitiveness

100 90 80 70 60 50 40 30 20 10 0 (ranking)

■ Global Competitiveness ■ Infrastructure

43

32

Japan

Korea

Taiwan

Vietnam

Malaysia

Thailand

Indonesia

Singapore

Philippines

Hong Kong

Source: World Economic Forum, global Competitiveness Report 2017-2018

Value of investment in EEC From both the government and the private sector

Modern infrastructure • Physical infrastructure • Digital infrastructure

$ 49.9 billion in the first 5 years (estimated)

The development of the U-Tapao International airport (5.7 billion US dollars)

The development of smart city (11.5 billion US dollars)

12 Targeted industries • 5 First S-curve industries • 7 New S-curve industries

The development of the Map Ta Phut Industrial Port Phase 3 (0.3 billion US dollars)

The development of the tourism industry (5.7 billion US dollars)

EEC

New way of life

The development of the Laem Chabang Port Phase 3 (4.2 billion US dollars)

Investment in the targeted industries (14 billion US dollars)

• Tourism • City development

Covered aspects

The High-Speed Rail (5.7 billion US dollars)

Intercity Motorway (1 billion US dollars)

• Education/Health/Environment • Basic public utilities/ community development

The Double_Track Railway (1.8 billion US dollars)

20 ENVISAGER LE SUD-EST ASIATIQUE

Dans le même esprit l’État a également lancé sa stratégiededéveloppement4.0 25 .Ceplandevrait permettre au pays de s’affirmer dans l’ère numé- rique et ainsi de pérenniser sa croissance écono- mique.Legouvernementmetenœuvreuncertain nombre de mesures pour faire passer le pays d’une économie productive à une économie de services, en promouvant la technologie, la créa-

tivité et l’innovation dans les industries d’avenir. La Thaïlande vise ainsi à réformer cinq industries clés (automobile, électronique, tourismemédical et de bien-être, agriculture et biotechnologie) et travaille actuellement sur d’autres secteurs d’avenir : robotique, aviation et logistique, bio- carburants et biochimie, industrie numérique et services médicaux 26 .

3 I SINGAPOUR : PERFORMANCE ET QUALITÉ DE VIE

Nature du régime : république, pouvoir autoritaire Capitale : Singapour Superficie : 717 km 2 Population : 5638679 hab. Utilisateurs d’Internet (2018) : 4,8 millions Langues officielles : anglais, mandarin, malais, tamoul Langue courante : anglais

À I Des pays qui gagnent à être mieux connus

Monnaie : dollar singapourien - SGD Espérance de vie (BM 2017) : 83 ans Taux d’alphabétisation : 100% 27

Pour bien comprendre le succès économiquede Singapour, il est nécessaire d’en savoir un peu plus sur l’histoire récente du pays. La cité-État a connu sa première phase de développement sous l’influence des Anglais, qui ont fait de Sin- gapour leur point de chute en Asie du Sud-Est. La prospérité économique de Singapour et les deux guerres de l’opium en Chine du Sud en- traînent une immigration chinoise importante. Libéréede la tutelleanglaiseen 1959, Singapour intègre laMalaisie en 1963. Il faut attendre 1965 pour que Singapour soit un État indépendant et commence véritablement son développement économique.

« If we were ordinary, we would just have died » Lee Kuan Yew, Singapore’s founder and first Prime Minister.

ENVISAGER LE SUD-EST ASIATIQUE

21

Orchestré par Lee Kuan Yew, le système mis en place à Singapour mêle ultralibéralisme écono- mique et dirigisme gouvernemental. Cinquante ans plus tard, Singapour a multiplié par quinze son PIB par habitant. Lee Kuan Yew, au pouvoir pendant plus de trente ans, est à l’origine du modèle singapourien. À la suite de l’indépendance de Singapour, le Premier ministre Lee Kuan Yew affirme dans son discours que Singapour sera une nation « multiraciale » qui « montrera l’exemple » 28 . La cité-État a su tirer parti des différentes vagues d’immigrationpour en faireunatout socio-éco- nomique. La population singapourienne est principalement issue de trois communautés : chinoise (70 %), malaise (15 %) et indienne (7 %). À cela, il faut ajouter une immigration régionale (Philippins, Bangladais, Sri-Lankais, Japonais, Coréens) et une autre, occidentale, attirée par la qualité de vie et le potentiel économique du pays. Cette cohabitation est assurée par le gou- vernement qui amis en place différentes lois fa- vorisant le respect de chacun 29 . Si Singapour est dépourvuede ressources naturelles, lepays a su exploiter sa situationgéographique stratégique. Située au cœur de l’Asie du Sud-Est, la cité-État s’est imposée comme second port commercial mondial et quatrième place financière. Singa- pour sert de plaque tournante stratégique aux investisseurs mondiaux par son accès inégalé aux marchés de l’ASEAN. Les imports-exports représentent320 %desonPIB.Singapouramisé sur son ouverture commerciale pour s’imposer comme puissance économique en Asie 30 .

Total merchandise trade at current prices, 2014-2018

TOTAL

Exports S$ 555.7 Bil

2018 S$ 1,055.9 Bil

Imports S$ 500.2 Bil

Exports S$ 515.0 Bil

2017 S$ 967.1 Bil

Imports S$ 452.1 Bil

Exports S$ 466.9 Bil

2016 S$ 870.2Bil

Imports S$ 403.3 Bil

Exports S$ 491.8 Bil

2015 S$ 915.2 Bil

Imports S$ 423.4 Bil

Exports S$ 526.1 Bil

2014 S$ 1,004.7 Bil

Imports S$ 478.6Bil

Merchandise Trade Increased 9.2% in 2018

Source : Departement of statistics Singapore

Le développement économique de Singapour est sans équivoque. Depuis les années 2000, le PIB de la cité-État ne cesse de progresser et se stabilise aujourd’hui autour d’une progression de l’ordrede3 % 31 .Singapourseconcentreprinci- palementsurtroissecteursporteurs : lesactivités financières et les services aux entreprises (28% duPIB), lesactivitésdecommerceetde logistique (25 %) et l’industrie manufacturière (21 %). Cette année, le Suisse IMD World Competitiveness Center a classé Singapour au rang d’économie la plus compétitive du monde, détrônant pour la première fois les États-Unis 32 . Cette forte productivité permet à Singapour de se hisser à la 4 e    placemondialeduclassementdespaysenPIB par habitant à parité du pouvoir d’achat.

22 ENVISAGER LE SUD-EST ASIATIQUE

90k

87 108,000

85k

83 265,000

80k

78 364,000

76 503,000

75k

72 983,000

71 283,000

69 417,000

70k

67 783,000

64 408,000

65k

59 429,000

60k

56 607,000 56 619,000

55k

2007

2008 2009 2010

2011

2012

2013

2014

2015

2016

2017

2018

■ GPD per Capita: SGD

Source: www.ceicdata.com l Department of Statistics

Singapour doit aujourd’hui répondre à deux défismajeurs qui viennentmenacer sapérennité économique : le vieillissement de sa population et le ralentissement de la croissance chinoise 33 . Le vieillissement de lapopulation vient réduire la part d’actifs et augmenter les dépenses de l’État. Le budget de l’État alloué à la santé a quadruplé en dix ans. Singapour est par ailleurs dépendant des exportations vers la Chine qui représentent 114 % de son PIB. La cité-État gagnerait donc à diversifier ses exportations pour éviter d’être soumise aux variations conjoncturelles 34 . Le classement Doing Business 35 de la Banque mondiale a élu Singapour meilleur endroit pour faire des affaires au monde. Singapour réunit en effet de nombreux atouts recherchés par les investisseurs : rapidité administrative en termes de création d’entreprise et de règlement des différends, forte protection de la propriété intellectuelle, État probusiness. Elle offre égale-

ment des exonérations fiscales et subventions généreuses pour attirer les investisseurs et les grandes entreprises. C’est notamment pour ces raisons qu’environ 40000 entreprises interna- tionales, dont 7000multinationales 36 , ont établi leur siège dans la cité-État. En2017,BloombergaclasséSingapour5 e destina- tion la plus favorable pour innover. Il n’est pas rare decomparerSingapouràun « laboratoirevivant », avecunbudgetde2,4milliardsdedollarsconsacré àl’innovationet4300startupscrééesdanslaTech en2016.Celas’expliqueparunefortecoopération entre les différents acteurs de l’innovation. C’est plus de 100 incubateurs, 300 fonds de capi- tal-risqueet10000 chercheursdeplusde60pays qui collaborent quotidiennement au Jurong Inno- vationDistrict 37 .Lestockd’investissementsdirects étrangers (IDE) à Singapour atteint aujourd’hui 410%duPIB,etlesfirmesétrangèresréalisent85% des dépôts de brevets d’innovation 38 .

À I Des pays qui gagnent à être mieux connus

ENVISAGER LE SUD-EST ASIATIQUE

23

Singapour est la 4 e place financière mondiale avec plus de 96 % de banques étrangères implantées sur son territoire. Lemarché des ca- pitaux profondet liquidedeSingapour constitue une source clé de financement de la croissance et dudéveloppement des pays de la région. C’est l’un des marchés de capitaux les mieux établis en Asie. L’indice boursier Singapore Exchange (SGX) est un lieu de cotation privilégié, avec près de 800 sociétés. Singapour est également un centre financier tourné vers l’avenir. Le secteur financier fait partie intégrante de son ambition d’être une smart city  avec la Fintech comme moyen d’accroître l’efficacité, de créer des opportunités, de permettre une meilleure gestion des risques et d’améliorer le niveau de vie de la population. L’environnement politique de la cité-État est stable avec le Parti d’action populaire (PAP) au pouvoir depuis l’indépendance, l’objectif premier de l’État étant de garantir la crois- sance économique du pays sur le long terme en consolidant la compétitivité et en attirant les investisseurs étrangers. Cette stabilité politique rassure fortement lemondedes affaires, surtout depuis lescontestationspolitiquesquionteu lieu à Hong Kong. Occupant la 9 e place du classement de l’in- dice de développement humain (IDH) 2019, Singapour s’impose comme un « pays où il fait bon vivre  » 39 . Singapour attire de nombreux expatriés qui accordent de l’importance à la sécurité et la propreté de l’espace public. La cité-État garde la tête des classements en ce qui concerne la qualité, l’équité et l’efficacité du système éducatif. Selon le rapport mondial sur le bonheur 2019, établi par le Réseau de

solutions pour le développement durable des Nations unies, Singapour est le 34 e « pays le plus heureux du monde » et le 2 e  « pays le plus heureux d’Asie », derrière Taïwan 40 . Singapour est numéro 1 parmi toutes les nations sur le plan de l’espérance de vie et de l’absence de corruption. Ces nombreuses qualités ont hissé Singapour à la seconde place desmeilleurs pays où s’expatrier, derrière la Suisse. Cependant, le pays est moins bien classé dans des catégories comme le soutien social (36 e ) et la perception de la liberté (20 e ).

Stock of Foreign Direct Investment in Singapore Million Dollars

Stock of Singapore’s Direct Investment Abroad Million Dollars

2017

1 567,974

850,258

2016

1 354,821

836,861

2012

808,461

498,028

0

0

Source: https://www.singstat.gov.sg/-/media/ files/publications/reference/sif2019.pdf

Trends 1990 - Present

1,0 0,9 0,8 0,7 0,6 0,5 0,4 0,3 0,2 0,1 0,0

l 1990

l 1995

l 2000

l 2005

l 2010

l 2015

l 2020

Source: United Nations Development Programme, Human Development Reports

24 ENVISAGER LE SUD-EST ASIATIQUE

ASEAN : UNE TERRE D’ACCUEIL DE L’INNOVATION

B

« L’impossible recule toujours quand on marche vers lui. » 41 Cette pensée d’Antoine de Saint-Exupéry résume bien le « miracle économique » des pays d’Asie du Sud-Est. Ils ont su provoquer leur développement et sortir de la pauvreté une grande partie de la population. La croissance économique des pays de l’ASEAN est encore en dessous de ce à quoi ils peuvent prétendre mais ils continuent de marcher vers « l’impossible ».

B I ASEAN : une terre d’accueil de l’innovation

1 I UN ENVIRONNEMENT DYNAMIQUE

Les pays de l’ASEAN ne se trouvent pas tous au mêmestadededéveloppementetn’affichentpas tous lamême croissance. La Thaïlande, l’Indoné- sieetSingapourmontrent lavoievers l’innovation et l’émergenced’unécosystèmefavorableà l’en- trepreneuriatenAsieduSud-Est 42 .Lepotentielde la région n’est pas pleinement atteint et d’autres pays comme leMalaisie et le Vietnamne cessent d’améliorer leur écosystème entrepreneurial.

Singapour domine la scène entrepreneuriale d’Asie du Sud-Est grâce à ses infrastructures, son environnement favorable aux affaires, un système éducatif avancé, ses investissements massifs en R & D et son cadre juridique. La Thaï- lande et l’Indonésie ne sont cependant pas en reste. Elles disposent d’autres atouts comme le faible coût de la vie, de la main-d’œuvre et la grande taille de leur marché 43 .

ENVISAGER LE SUD-EST ASIATIQUE

25

L’Indonésie peut se vanter d’être le seul pays d’Asie du Sud-Est à compter une « décacorne » et trois « licornes » grâce à la taille de son mar- ché intérieur. Une licorneest unanimal mythique et légendaire. Les startups qualifiées de licornes sont les startups technologiques valorisées à plus d’un milliard de dollars. Une décacorne est encore plus rare ; elle dépasse les 10milliards de dollars américains de valorisation. LaThaïlandesedémarquedesautrespaysd’Asie du Sud-Est par l’originalité de son écosystème qui peut être qualifié de congloméral ou de participatif. Celui-ci s’est développé rapidement grâce aux grandes entreprises privées comme CP, True, DTAC ou encore Central Group. Ces conglomérats, détenus par des grandes familles thaïlandaises, sont très proches des startups et contribuent à leur financement, soit à travers des fonds de capital-risque, soit en créant des incubateurs et accélérateurs. On peut donc affirmer que ces trois pays ont encore de beaux jours devant eux sur la scène de l’innovation et de l’entrepreneuriat. LaThaïlande, l’Indonésieet Singapour partagent leur attrait pour le numérique et les nouvelles technologies. IlssedétachentduVieuxContinent qui montre encore beaucoup de méfiance face aux progrès des nouvelles technologies. Il y a encoreunedécennie,4/5de lapopulationd’Asie duSud-Est n’avait pas de connexion Internet ou une connexion limitée. Aujourd’hui, avec plus de 360 millions d’utilisateurs d’Internet dans la ré-

gion et 90 %de la population connectée à partir de leur téléphone, les Sud-Asiatiques sont les plus engagés du monde dans la téléphonie mo- bile. L’économie de l’Internet enAsie duSud-Est a atteint un milliard de dollars pour la première fois en 2019, triplant de volume au cours de ces quatre dernières années 44 . L’explosion des utilisateurs d’Internet surmobile a attiré de nombreux investisseurs. C’est plus de 37 milliards de dollars qui ont été injectés dans le secteur ces quatre dernières années 45 . Bien que la majorité ait servi à financer l’e-com- merce et les licornes dans le transport, une somme considérable a financé les startups de la région. Un nombre croissant de « licornes en herbe » inspirées par les licornes indonésiennes sont à l’affût de financement. Les investisseurs régionaux et mondiaux sont prêts à saisir cette opportunité et à soutenir les startups avec plus de ressources, plus longtemps. Ces avancées technologiques ont également changé fondamentalement le comportement des consommateurs lorsqu’il s’agit d’achats en ligne. Alors qu’auparavant ceux-ci étaient essentiellement réservés aux articles coûteux comme un téléviseur ou un smartphone, le commerce électronique est aujourd’hui devenu la norme 46 avec plus 5 millions de commandes reçues en moyenne par jour. Le secteur de la mobilité continue de battre les prévisions lesplusoptimistes.Lesnouvellesappli- cations de transport comme Gojek 47 (Indonésie)

26 ENVISAGER LE SUD-EST ASIATIQUE

et Grab 48 (Singapour) ont remis en question la nécessité de posséder un véhicule dans le Sud-Est asiatique. Ces services sont abordables, facilement accessibles et particulièrement populaires dans les grandes villes surpeuplées comme Bangkok, Jakarta et Kuala Lumpur. Dans ces capitales, posséder un véhicule privé coûte cher, contribueà lapollutionde l’air et est source de frustration à cause des embouteillages. La valeur de ce secteur porteur a plus que qua- druplé, passant de 3 milliards de dollars en 2015 à près de 13 milliards en 2019 et on lui attribue une valeur supérieure à 40 milliards de dollars en 2025. Le potentiel de ce secteur a été revu à la hausse en raison de la diversification des ser- vices proposés. Les applications ne se limitent plus au transport alternatif, mais proposent à présent toute une gamme d’offres, y compris des livraisons de produits alimentaires et des services financiers 49 . Le secteur des réservations de voyage en ligne connaît également une croissance exponen- tielle. Soutenu par l’essor de chaînes hôtelières à bas prix, il est valorisé à 34 milliards de dollars. La baisse des prix de logements de vacances a été amorcée principalement par deux startups, OyoRooms et RedDoorz. Ces entreprises offrent un hébergement fiable à une fraction du prix d’un hébergement traditionnel pour les jeunes et les voyageurs soucieux de leurs dépenses. Airbnb amontré la voie dans ce secteur porteur, en particulier en Asie où le tourisme ne cesse d’augmenter. Les licornes indonésiennes Agoda et Traveloka ont créé leur propre plateforme

de location de logements pour défier le leader américain. Si des réglementations plus favo- rables aux locations à court terme sont mises en place, ces services pourraient largement contribuer au développement du tourisme dans toute la région. Pour améliorer les performances du système éducatif en Asie du Sud-Est, de nombreuses startups émergent dans les technologies édu- catives (EdTech). La technologie ayant grande- ment amélioré notre quotidien, elle peut aussi être bénéfique pour faire progresser le niveau d’enseignement et la qualité de l’apprentissage en Asie du Sud-Est. Les entreprises créées dans le secteur sont d’excellents compléments aux systèmes éducatifs gouvernementaux. Il existe notamment l’EdTech Asia Summit 50 qui a lieu tous les ans pour favoriser le développement de ce secteur d’avenir. Pour faire face au vieillissement de la population ou pour affronter les défis d’une population à forte croissance, un nombre considérable de startups HealthTech ont fait leur apparition. La HealthTech vise à rétablir un équilibre dans un système où la demande dépasse de loin l’offre, suscitant des préoccupations de la part des professionnels et des patients. Matériel connecté, prothèses imprimées en 3D, carto- graphie dugénome– les nouvelles technologies offrent une myriade de nouveaux outils pour améliorer la qualité du système de santé en Asie du Sud-Est 51 .

B I ASEAN : une terre d’accueil de l’innovation

ENVISAGER LE SUD-EST ASIATIQUE

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