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Témoignages
«JE VEUX CHOISIR MA PROPRE MORT»
Santé
Pourra-t-on bientôt choisir, en France, demettre fin à sa vie, par euthanasie ou suicide assisté ? Seize ans après la loi Leonetti, qui interdit l’acharnement thérapeutique, et cinq ans après la loi Claeys-Leonetti, qui permet aumalade de demander une “sédation profonde et continue jusqu’audécès”, une nouvelle étape a été discutée à l’Assemblée, en avril dernier : légaliser l’euthanasie active. Mais la loi n’a pas pu être votée à cause demilliers d’amendements. Plusieurs sondagesmontrent que, confrontés à la souffrance de leurs proches, une largemajorité de Français souhaite une évolutionde la loi. Propos recueillis par Isabelle Duriez
« Mes vœux sont écrits dans mes directives anticipées » «Pour avoir accompagné mon père en fin de vie, ainsi
MARIE- FRANCE 75 ANS
ADELINE 20 ANS
« Je voudrais pouvoir choisir de mourir ici »
liatifs sur tout le territoire et former les soignants à cet accompagnement. Mes propres vœux sont écrits dans mes directives antici- pées. Elles sont opposables selon la loi, mais, dans les faits, seront-ils respectés?»
l’euthanasie. D’abord révol- tée qu’il nous abandonne, j’ai vite compris que c’était une preuve de courage et d’amour. Nous avons vécu les dernières heures en- semble, hors du temps. J’ai pu lui dire que je l’aimais, lui dire au revoir. Il était serein. Nous sommes restés auprès de lui jusqu’à la fin. Cela a changé mon regard sur la mort et l’euthanasie. J’en parle à tout le monde pour dédramatiser. Pour- quoi avoir peur? Si cela devait m’arriver, je voudrais pouvoir choisir de mourir ici et pas exilé à l’étranger, loin de mes racines.»
«J’ai accompagné mon beau-père, qui m’a élevée depuis tout bébé, en Bel- gique pour mettre fin à sa vie qui n’en était plus une. Ancien militaire, hyperspor- tif, Cyril a développé la ma- ladie de Charcot (sclérose latérale amyotrophique) à 45ans. En deux ans, il est passé de l’homme fort de la maison à un papi en chaise roulante, atteint progressi- vement de paralysie muscu- laire. Il savait ce qui l’atten- dait: il avait vu son père mourir étouffé par la même maladie. Pour s’épargner cette fin atroce, et nous épargner nous, il a choisi
qu’une amie très proche, j’ai été témoin de l’écart de prise en charge entre un EPHAD rural et un service de soins palliatifs spé- cialisé à Paris. Pour mon père, nous arrivions diffi- cilement à rencontrer les médecins. Il a été à l’agonie pendant des semaines. Je ne vois pas ce que finir sa vie dans la souffrance lui a apporté. Mon amie a, elle, été accompagnée en service spécialisé où tout est pensé dans l’écoute du patient. Bien sûr, les méde- cins sont du côté de la vie. Mais, il faudrait multiplier les centres de soins pal-
SARAH WITT, GUILLAUME MURAT POUR SANTE MAGAZINE (2)
56 SANTÉ MAGAZINE I août 2021
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