REGAL 116

122 AILLEURS

NOVEMBRE DÉCEMBRE 2023 RÉGAL N° 116 www.regal.fr

Cette croix, cerclée d’un anneau, est

symbolique du christianisme celtique. Elle est plantée devant

les ruines de Templetown church, près du phare de Hook Head.

Sur la route deWaterford, un crochet par Hook Head s’imposait. De très loin, le phare strié de bandes sombres nous indique le point d’aboutissement. Des champs d’un vert insolent se déroulent jusqu’au pied de l’édifice. C’est de l’orge en épi brassée par le vent. Si proche des vagues, elle en capte l’air marin qu’elle transmettra par bouffées au whisky dont elle sera à l’origine. Martin Foley , cultivateur en biodynamie, livre son orge à la distillerie de Waterford, Waterford Whisky , située à une soixantaine de kilomètres vers le nord. Sa céréale n’est pas mélangée aux autres orges. Elle est traitée à part, d’abord maltée, brassée puis distillée, un peu comme le raisin d’un même vigneron. Le whisky qui coule de l’alambic est un single malt et surtout un single farm (issu de la production d’une seule ferme). LA RÉVOLUTION DES WHISKYS DE TERROIR C’est une petite révolution que ces whiskys de terroir, fabriqués par la distillerie de Waterford depuis 2016. Elle jette une lumière crue sur une industrie dont la transparence laisse parfois à désirer, notamment sur l’origine des céréales, matière première des spiritueux. Rares sont les distilleries qui peuvent certifier ne serait-ce que l’origine nationale de leur matière première ! Mais un whisky peut-il exprimer l’empreinte de son terroir avec la même intensité qu’un vin, sachant qu’une partie essentielle de sa typicité se fixe au contact du bois dans le tonneau ? Neil Conway , le maître distillateur à Waterford, décoche cette réponse : «La question estau cœurde nos réflexions. Dès les premières barriques, nous avons nous-mêmes été surpris par l’intensité de l’expression du terroir des single farm . Mais je dois dire qu’au savoir-faire du fermier s’ajoute un travail particulier de ces orges à la distillerie : une fermentation très poussée jusqu’à lamalolactique, une double distillation très lente et le choix des tonneaux de vieillissement. » Pour mieux extraire les saveurs de l’orge sans qu’elles soient noyées dans le goût du bois. La subtilité est la marque de fabrique de ces nouveaux whiskys. Ils rafraîchissent quand les spiritueux vanillés à l’excès entêtent. Une simplicité qui rappelle les mots de l’Irlandais OscarWilde : « J’ai les goûts les plus simples du monde, je me contente du meilleur. »

LE MAÎTRE DES ALAMBICS Neil Conway est maître distillateur à la distillerie Waterford Whisky . Il prend la pose devant l’un des énormes alambics et dans son verre, le liquide limpide est le jeune spiritueux fraîchement distillé. Cette maison défend des whiskys de terroir issus de l’orge d’une même exploitation. Une initiative révolutionnaire dans l’univers des spiritueux.

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