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46 LE REPORTAGE EN FRANCE
SEPTEMBRE OCTOBRE 2019 RÉGAL N° 91 www.regal.fr
dépassés par l’abondance des fruits produits par leur jardin : 800 kg à 1 tonne d’oranges amères par an, sans compter les autres agrumes . Le couple a obtenu la certification bio pour tous ses arbres et s’est mis à vendre des fruits, des confitures et autres spécialités maison. « Nous faisons les marchés de novembre à fin mars, nous suivons les fruits, ce sont eux qui décident des dates » , raconte Gislaine qui adorait jouer à la marchande quand elle était petite… Quand on commence à s’intéresser aux agrumes, on a vite envie de diversité. Tony et Gislaine ont commencé à collectionner les espèces et variétés. Ici, un magnifique combawa acheté chez Sébastien Fossat, là, un bien joli yuzu, des oranges sanguines, des limes de Tahiti… Comme quoi, la production d’agrumes de la Côte d’Azur change et évolue, mais n’est pas forcément vouée à disparaître. En regardant son jardin et la Méditerranée en toile de fond, Tony livre doucement ce qui pourra, peut-être, faire perdurer ou renaître l’agrumiculture locale : « C’est notre patrimoine. Quand j’étais gamin, on jouait ici, on courait entre les arbres, on cueillait les agrumes, mais on ne se rendait pas compte de l’importance de tout ça. C’est maintenant que j’en ai conscience. Et avec le changement climatique, la nature qui est malmenée dans tous les sens, c’est d’autant plus précieux. » n
Maritimes et en France en général, elle pourrait prendre une autre forme, plus citoyenne. Les grandes exploitations disparaissent au profit des jardins de particuliers, mais ceux-ci n’arrachent pas nécessairement les arbres. LeNérolium, la coopérative agricole de la commune de Vallauris-Golfe-Juan, rassemble ainsi une quarantaine de familles productrices de fruits et de fleurs de bigaradier issus de leur jardin. Comme aime le répéter Renée Pugi , la directrice du Nérolium, « Les petits ruisseaux font les grandes rivières. » Certains poursuivent une vieille tradition familiale en répétant ces gestes chaque année, d’autres s’y sont mis en s’installant dans la région, prenant plaisir à faire vivre le patrimoine local. Agrumiculteurs amateurs Sur les hauteurs de Golfe-Juan, un couple de retraités très actifs est ainsi tombé dans l’agrumiculture un peu par hasard. Tony et Gislaine Damiano rêvaient d’ouvrir une maison d’hôtes sur le terrain hérité du père de Tony. La propriété, justement baptisée la Bigarade, est un petit coin de paradis. Le jardin en terrasse abrite 80 orangers amers, quelques citronniers, pomélos et clémentiniers qui étaient déjà là depuis longtemps quand la parcelle a été achetée, en 1941. Les Damiano ont rapidement été
Fou d’agrumes, le chef étoilé Christophe Dufau (ci-dessus) est originaire de Draguignan dans le Var. Après avoir travaillé, entre autres, chez les frères Roux à Londres et chez Bernard Loiseau, il a vécu neuf ans au Danemark (où Rasmus Kofoed et René Redzepi étaient ses commis) et a sillonné le monde en quête de goûts et d’épices variés. Revenu en France, il a d’abord installé son restaurant Les Bacchanales à Tourette- sur-Loup puis à Vence, sur la Côte d’Azur. Il y a retrouvé avec bonheur des produits qui lui sont chers et indispensables à sa cuisine élégante et délicate, mais jamais prétentieuse: les agrumes de la région.
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