Les cathédrales de notre histoire
Paris sans son intervention? Il trouve le temps de construire une poignée de châteaux et d’églises de son cru, de peindre des tableaux alpins évoquant les toiles du grand Gaspard Friedrich; le « Victor Hugo de l’architecture » caresse en effet un doux rêve: s’attaquer au « monument de l’Europe », tout récemment rattaché à la France, en redonnant au mont Blanc sa structure primitive. Une folie qui l’entraîne à faire lever une carte d’état-major au 1/40000, à le faire photographier sous toutes les coutures (par les frères Séeberger, pionniers de la photographie du massif alpin), à écrire un livre de 280pages illustré de centaines de dessins et aqua- relles. Bourreau de travail, il enseigne et écrit éga- lement; les milliers de feuillets de ses Dictionnaire de l’architecture et Dictionnaire dumobilier ou de son Histoire d’unemaison représentent desmonuments d’un autre genre. Viollet-le-Duc ne savait pas pen- ser en petit, c’est un géant à redécouvrir…
Imagno / Roger-Viollet
Notre-Dame de Paris, la « belle du seigneur » blessée « Et une flèche de Notre-Dame? », demandait Viollet-le-Duc. Cette question aurait bien fait rire un Parisien de 1842… et pleurer les Français d’aujourd’hui ! À l’époque, aussi invraisemblable que cela puisse paraître, Notre-Dame est orphe- line de sa flèche… Après des décennies d’incu- rie, on recommence à peine à s’intéresser à la vénérable cathédrale, et le mérite en revient au roman de Victor Hugo, Notre-Dame de Paris, paru en 1831. Grâce à Esmeralda, Frollo et Quasimodo, le vaisseau de pierre en décrépitude attire un nou- veau regard. Ses pierres noircies par le temps, sa flèche absente depuis 1792, sa célèbre gale- rie sculptée des rois (pris pour des monarques français alors qu’ils sont bibliques) abîmée, son portail central agrandi au xviii e siècle par Jacques- Germain Soufflot, l’architecte en chef de Notre- Dame… la belle du seigneur est en souffrance ! Louis-Philippe I er , « bon roi des Français », se rend à l’évidence : il faut sauver la plus belle église de France. Pour ce faire, il lance en 1842 un concours, remporté par Jean-Baptiste-Antoine Lassus (conservateur des édifices diocésains de Paris) et Viollet-le-Duc, qui n’a pas encore 30 ans. Le duo fait merveille, le chantier ouvre en 1844. En 1857, Lassus meurt, laissant Viollet-le-Duc seul maître à bord. Jusqu’en 1865, il peaufine son Moyen Âge idéal, peuplant les parties hautes de gargouilles, de chimères et d’apôtres, lui-même prêtant une Après des décennies d’incurie, on recommence à peine à s’intéresser à la vénérable cathédrale, et le mérite en revient au roman de Victor Hugo, Notre-Dame de Paris, paru en 1831. Alinari / Roger-Viollet
Travaux à la cathédrale Notre-Dame- de-Paris, vers 1900. Eugène Viollet- le-Duc, vers 1860-1865.
SECRETS D’HISTOIRE
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