VMAG PEPS
des fourmis 130 dans les jambes
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S itué à cheval entre le Cantal, la Lozère et l’Aveyron, l’Aubrac (ou Alto braco, “lieu élevé” en occitan) est un plateauposé sur unsocledegneiss et degranitebleu. 40 kilomètres sur 20, voilà bien peu pour dire le sentiment de démesure qui envahit lorsqu’on sillonne les chemins de cet in ni, perché entre 1000et 1400mètres d’altitude. Ceux qui y vivent ont pour chair cette terre. Paradis des pêcheurs Installé àSaint-Urcize depuis 1988, FredRemise est pêcheur. « C’est là que je voulais vivre!» Quand il n’est pas au comptoir de son établissement – un hôtel, restaurant, bar-tabac, point presse… –, il a les deux pieds dans le ruisseau, du Bès ou du Rioumau, le nom de ce dernier évoquant l’eau amère des tourbières. « L’eau de tourbe est la base d’une bonne truite, et moi, je la préfère dans le courant que dans une poêle » , avoue-t-il. Fin juin sonne la pleine saison de la pêche à la mouche sur l’Aubrac, lequel est considéré comme un véri- table châteaud’eauen raisondumillier de sources qui irrigue ses montagnes. « La pêche est le premier loisir du Cantal, avant le ski et la randonnée. Des rivières propres, en France, au niveau halieutique, il n’y en a plus beaucoup. Celle du Bès se su t à elle-même, elle fait ses poissons et la nourriture pour ses poissons. » Parfois, on découvre des herbes cou- chées sur le côté, signe que des pêcheurs sont passés par là pour chasser la silencieuse sauvagine… Certains, comme le photographeBernardBrisson, reviennent chaqueannéepro - ter de ce que Fred surnomme le “ triangle des Bermudes”. « Ce coin est le plus mystérieux que je connaisse. C’est un lieu à part. Je ne dis jamais précisément où je vais pêcher.
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On y entre dans un autre espace-temps. On est au nœud de l’a aire, à l’épicentre. Quant à la pêche à la mouche sèche, c’est une pratique excessivement technique. Son apprentis - sage est ingrat, et toute une vie n’y su rait pas. Ici, la rivière a son caractère, qui peut vous donner mille satisfactions, par le plaisir de la capture, mais aussi vous faire éprouver mille déconvenues. Quand le vent est au nord et que le temps est légèrement triste et “mâché”, vous avez une chance d’avoir de l’activité. Ici, la pêche est passionnante, intéressante, mais di cile. Le Bès donne du plaisir dans la subtilité, lorsqu’il livre ses truites, rapides et craintives. Mais une bonne truite, c’est celle que l’on rate la veille du départ, car il nous faudra revenir, rien que pour elle! »
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