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Comment les applis de rencontre modifient notre sexualité ?
En quinze ans, la fréquentation des applications et des sites de rencontre a plus que doublé et s’est banalisée. Si cela a modifié notre façon de trouver un ou une partenaire, cela a-t-il aussi changé notre manière d’aimer, de nous investir dans une relation et de respecter l’autre ?
PROPOS RECUEILLIS PAR ÉLÉONORE RUBY
Dr Pierre DESVAUX sexologue, directeur d’enseignement de sexologie à l’Université Paris-Descartes
Les applications de rencontre permettent-elles de trouver plus facilement des partenaires ? Dr Pierre Desvaux : cela facilite les choses, mais pas pour tout le monde. Sur Meetic, les hommes de 25 ans ou moins peinent à faire des rencontres car les femmes du même âge recherchent des hommes plus mûrs, ayant déjà une situation. Quelque 12 % recevront une réponse contre 30 % chez les hommes de 50 ans. Les sites de rencontre font miroiter un “choix” infini qui pousse à vouloir toujours trouver mieux, sans chercher à s’investir ; ou à “essayer” deux ou trois profils en même temps pour pouvoir choisir. Les femmes sont très exigeantes et recherchent le prince charmant beau, drôle, riche, gentil... Mais ces hommes – ou ces femmes – parfaits sont sûrement déjà en couple et pas sur internet ! D’où un autre travers : mentir sur son profil afin de pouvoir correspondre à ce qui est recherché. Dr Sylvain Mimoun : vers 20 ans, on a envie de découvrir la sexualité plus que la personne, pour étoffer sa technique. Alors ces sites, c’est une sorte de caverne d’Ali Baba, avec des centaines de rencontres possibles ! Après 35 ans, on est plus mature et on cherche
quelque chose de plus sérieux. Si la relation n’avance pas, on va zapper. Et c’est là que réside le risque : multiplier les partenaires, et au final, ne faire que des rencontres Kleenex. Est-ce une bonne solution quand on manque de confiance en soi ? Dr Desvaux : pour les jeunes, cela permet de tester sa séduction, d’apprendre à draguer sans prendre des “râteaux” devant tout le monde. Dr Mimoun : pour un plan d’un soir, sûrement. L’autre est consentant, et on n’a pas besoin de chercher des heures, d’autant que les sites géolocalisent les personnes proches. Pour les timides qui veulent s’investir plus, cela peut permettre, après un premier contact écrit, de s’essayer au téléphone, pour voir si on saura tenir une conversation ou si on va perdre tous ses moyens. C’est plus facile qu’en face-à-face. Et si certains hommes n’osent pas, les femmes prennent l’initiative ! Mais cela peut aussi faire mal si personne ne vous choisit... Est-ce qu’on fait l’amour différemment ? Dr Desvaux : on couche plus vite, mais pas forcément différemment qu’avec quelqu’un rencontré en boîte de nuit ou dans un bar. Toutefois, le jeu de séduction est différent :
Dr Sylvain MIMOUN gynécologue, andrologue, médecine sexuelle,
responsable du Certificat universitaire de gynécologie psychosomatique à l’Université Paris VII, membre du comité scientifique de Santé Magazine
OLIVIER DION
61 SANTÉ MAGAZINE I février 2020
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