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www.regal.fr RÉGAL N° 82 MARS AVRIL 2018
LE CALISSON D’AIX, ET SEULEMENT D’AIX Nul ne sait si Laure Pierrisnard (ci-dessous), la directrice générale du Roy René, carbure à la pâte d’amande ou au melon confit, mais elle déborde d’énergie. Et il en faut pour mener tambour battant le projet d’obtention d’une Indication d’origine protégée (IGP) pour le calisson d’Aix. Avec 11 autres fabricants, et en partenariat avec le Crédit Agricole de Provence, elle élabore le cahier des charges qui devrait être soumis à l’Inao (Institut national de l’origine et de la qualité) au premier semestre de cette année. Paradoxalement, c’est une contrefaçon chinoise, déboutée par procès à l’automne 2017, qui a donné un coup d’accélérateur au dossier. Il était temps : il traînait depuis 1991, faute de s’accorder sur les ingrédients autorisés ou non. En tout cas, aucun ne devrait provenir de Pékin…
S ix calissons sur dix, parmi tous ceux mangés dans le monde, sortent d’ici. De ce bloc ultramoderne de briques et de verre posé en bord de départementale. Sur la façade, l’enseigne au caractère médiéval est reconnaissable entre mille: elle a bercé l’enfance de tous les gourmands de France depuis cinq générations. Créé en 1920 et racheté par Olivier Baussan en 2014, le Roy René s’est offert une nouvelle jeunesse. Une continuité logique pour le fondateur d’Oliviers & Co et de L’Occitane, militant forcené des trésors provençaux. L’entreprise, leader du secteur, fabrique 500 tonnes de calissons chaque année. Cinquante millions de confiseries, conçues, entre autres, avec 200 tonnes de melons confits et autant d’amandes. On imagine le tourbillon des chiffres, l’échelle industrielle, l’avalanche de matières premières. Erreur… la ruche est plutôt zen. Et plus zen encore, les champs d’amandiers où Édouard Ginoux, l’un des fournisseurs du Roy René, examine un à un ses arbres en cet après-midi ensoleillé de septembre. Avec Alexis Bertucat, chargé du développement durable de l’entreprise, l’agriculteur passe en revue les amandes de variété lauranne qui s’accumulent dans la benne. C’est là que tout commence, avec ce grand jeune homme roux et concentré, dans son champ au bord de la Durance. « Vous voyez comme les fruits sont petits et comme leur coque est dure, comparés aux grosses amandes américaines? Là-bas, l’irrigation est autorisée. Résultat, elles sont plus molles, gorgées d’eau… et de pesticides , commente Édouard. À l’inverse, les amandes de Provence-Méditerranée ont un taux de graisse bien plus élevé, donc bien plus de parfum. » Une donnée essentielle quand on sait que l’amande constitue le tiers d’un calisson! Pour souligner le message, Alexis Bertucat s’est fait jardinier. En 2016, tout autour de l’entreprise, il a supervisé la plantation de trois hectares d’amandiers. Même si ce sont encore des arbrisseaux, impossible désormais, pour les 76 salariés du Roy
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