PEPS

NE PAS SE LAISSER DÉBORDER

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La relation filiale rend poreuse la frontière entre l’émotionnel et le professionnel.

TOMBER DANS LE TRAVAIL DISSIMULÉ Tenir la boutique durant une absence, apporter un renfort en période de grande affluence, mettre la main à la pâte pour répondre à une commande exceptionnelle… En tant que chef d’en- treprise, a fortiori avec peu ou pas de salariés, il est naturel de solliciter l’aide de son enfant. Mais, attention, précise- t-on à la sous-direction de la réglemen- tation et de la sécurisation juridique de l’Acoss, pilote du réseau des Urssaf, « endroit français, travailler dans une struc- ture à but lucratif implique en principe un statut de salarié ou, éventuellement, deman- dataire social » . Cependant, il reste “l’entraide fami- liale”. Il ne s’agit pas d’un statut juri- dique, mais elle autorise un enfant à travailler dans l’entreprise familiale de manière ponctuelle, voire spontanée, en dehors de tout lien de subordination, pour une activité qui n’est pas néces- saire au fonctionnement habituel de l’entreprise, et ce, sans rémunération. «La frontière est assezmince entre larelation d’autorité parents-enfants et l’état de subor- dination inhérent au contrat de travail » , met en garde Julien Perdrizot-Renault, avocat au barreau de Paris. De même, le “coup de pouce” peut rapidement devenir régulier. En cas de contrôle de l’Urssaf ou de l’inspection du travail, le risque est de se voir sanctionné pour travail dissimulé. « Lemeilleur conseil que l’on peut donner au cas où les tâches con ées à son enfant pourraient se répéter, c’est de lui faire un contrat de travail » , insiste-t-on à l’Acoss. Qui plus est, il béné ciera de droits sociaux et d’une couverture en cas d’accident du travail. ENFREINDRE LE DROIT DU TRAVAIL DESMINEURS Un mineur peut travailler dans l’entre- prise familiale pour gagner son argent de poche. « En principe, il ne pourra pas

avant d’entrer dans l’entreprise fami- liale. « Il est fréquent que le parent cherche à former lui-même son enfant, en particu- lier dans les petites structures. Mais il est dommage de ne pas le laisser acquérir par lui-même des connaissances » , remarque Christine Blondel. Le fait qu’il se forme aux nouvelles technologies, qu’il puisse acquérir des techniques di érentes, ou encore des compétences inexistantes au sein de l’entreprise familiale, peut être béné que pour l’établissement. En outre, conseille l’avocat, « dans lamesure dupossible, il est préférable de le laisser vivre une ouplusieurs expériences professionnelles hors de l’entreprise familiale avant de l’inté- grer » . Cela lui permet de se confronter dans le monde du travail à un regard plus objectif que celui d’un parent, d’évoluer par lui-même et de prendre de l’assurance. Une fois arrivé dans l’entreprise, pour- suit Christine Blondel, « l’idéal est de donner à son enfant des tâches qui peuvent être évaluées, afin qu’il puisse faire ses preuves et vite gagner en autonomie » . Si la con guration de l’entreprise le per- met, il peut être intéressant aussi qu’il reçoive ses consignes de la part d’une tierce personne de con ance, capable de juger objectivement son travail et de l’aider à progresser. En définitive, l’objectif est bien que l’enfant acquière une forme d’indé- pendance pour rééquilibrer la relation parent-enfant. C’est une manière, pour lui, d’être légitime auprès des salariés de l’entreprise familiale, notamment s’il est amené à prendre rapidement des responsabilités.

le faire avant l’âge de 16 ans. Toutefois, les jeunes âgés de 14 à 15 ans sont autorisés à travailler commeapprentis ou, sous certaines conditions, pendant les vacances scolaires » , indique Julien Perdrizot-Renault. Une autre exception est réservée aux entreprises familiales. En effet, les jeunes âgés de plus de 14 ans sont ainsi autorisés à travailler, hors vacances ou contrat d’apprentissage, dans les établissements « où ne sont employés que les membres de la famille sous l’autorité soit du père, soit de la mère, soit du tuteur » et à condition qu’il s’agisse de « travaux occa- sionnels ou de courte durée » (art. L.4153-5 du Code du travail). Mais « quel que soit le cadre d’emploi, en tant qu’employeur, le parent doit respecter les règles visant à pro- téger lesmineurs des travaux susceptibles de porter préjudice à leur sécurité, à leur santé ou à leur développement » , souligne Julien Perdrizot-Renault. IMPROVISER L’ARRIVÉE DE SON ENFANT DANS L’ENTREPRISE « Il est difficile d’avoir un parent comme patron » , constate Christine Blondel, conseillère auprès d’entreprises fami- liales et professeur à l’Institut européen d’administration des a aires (Insead). La relation liale est au cœur du sujet. Elle induit l’existence d’une forme de dépendance et d’autorité entre le parent et son enfant et rend poreuse la fron- tière entre le professionnel et l’émo- tionnel. Il convient de le prendre en compte rapidement, a n d’éviter que ces deux sphères ne se nuisent réciproque- ment. Comment ? En encourageant, par exemple, son enfant à suivre des études

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