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La vue aérienne montre bien, au pied du mont Garrot et au milieu des bancs de vase, le polygone dessiné par les digues d’un ancien camp viking et ce qui reste des quais où accostaient leurs navires. Sans doute établi sur les vestiges d’un castrum romain, ce port fortifé remonte aux années 900.

Car le barrage de l’usine marémotrice de la Rance fait un rempart efcace à la houle du large ; il maintient à l’abri un vaste plan d’eau sur lequel la navigation reste confortable, même lorsque les vents d’ouest se déchaînent. L’usine marémotrice est une centrale de production hydroélectrique animée par le dépla- cement de la masse d’eau considérable des marées. L’actuel intérêt pour les énergies renouvelables lui donne une modernité qui fait oublier qu’elle fut inaugurée en 1966 et demeura longtemps unique au monde. Au quotidien, l’intérêt appréciable de cette usine reste de procurer une communication routière directe entre Saint-Malo et Dinard. Sur la rive droite de la Rance, Saint-Suliac étire ses quais sous des maisons en moellons aux toits d’ar- doise fne, présentant une unité architecturale qui lui a valu le label de Plus Beau Village de France. Au mouillage se dandinent des barques élancées et anguleuses : ce sont des doris, des bateaux utilisés

jusqu’à la seconde guerre mondiale pour pêcher la morue à Terre-Neuve. Menés à l’aviron par deux hommes, et à partir d’un grand voilier qui se tenait au mouillage, les doris posaient des lignes sur des hauts-fonds au large du Canada. Ce genre de navi- gation n’allait pas sans risque ainsi qu’en témoigne, non loin du port et dominant la Rance, la Vierge de Grainfollet. Cette statue fut édifée en 1894, année où, pour la première et unique fois, tous les marins de Saint-Suliac rentrèrent vivants de leur campagne à Terre-Neuve… En amont de Saint-Suliac, le mont Garrot dresse sa crête de granit 60 mètres au-dessus des fots, ofrant le plus large des panoramas sur la Rance. Dans l’anse qui se creuse à son pied, on distingue des levées de vase et un ensemble de chenaux : ce sont les ves- tiges d’un camp viking qui pouvait, dit-on, abriter dix-huit navires. Plus en amont, l’estuaire se rétrécit: paisible, il sinue entre des bois et des étiers. Ici la

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