Echappées Belles en Bretagne

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S C A R L E T T E L E C O R R E L E G O Û T D E S A L G U E S T E X T E D E C L I O B A Y L E

C’est l’une des premières femmes marins-pêcheurs de France et une célébrité à Guilvinec, dans le Pays bigouden. Du haut de son 1 mètre 55, Scarlette Le Corre est une force de la nature qui ne compte pas ses heures, ni le nombre de ses activités. De mi-avril à fin septembre, elle vend sa pêche sur les marchés. Le reste de l’année, elle se consacre presque entièrement à son atelier de transformation d’algues, où elle anime également des stages culinaires. On peut la croiser sur les plages de Guilvinec, vêtue de sa salopette jaune, son chien Gadjo sur les talons. « Je cueille des algues avec mon père depuis que je sais marcher… C’est lors de ma formation d’aquaculture, alors que je venais d’être élue porte-parole du Comité des pêches, que j’ai réalisé leur potentiel. On m’a dit : c’est l’avenir ; j’ai eu le déclic. J’ai tout de suite acheté des concessions et je me suis lancée… Il faut savoir que toutes les variétés d’algues sont comestibles mais, pour des raisons gustatives, seules une quinzaine d’entre elles sont utilisées dans l’alimentation humaine. » Ce matin-là, dans son panier : du kombu de Bretagne, de la dulse – surnommée le bacon de la mer à cause de son goût caractéristique –, et de la laitue de mer. Les algues serviront, l’après-midi même, à la confection de tartares, de rillettes et de toutes sortes de produits transformés en partance pour la France et l’étranger. « À présent, on me commande des algues jusqu’au Japon. » Quand on lui demande s’il a été difficile, en tant que femme, de trouver sa place parmi les marins-pêcheurs du coin, Scarlette Le Corre répond qu’il suffit de savoir faire son boulot de A à Z. « Si vous ne demandez d’aide à personne, ça ne pose pas de problème. Ce sont d’ailleurs des hommes qui m’ont élue au poste de porte-parole du Comité des pêches. » Elle précise néanmoins que c’est un métier difficile et que c’est grâce au soutien de sa mère qu’elle a pu continuer à exercer après la naissance de ses trois enfants. « J’ai conscience d’être atypique. Je vis plusieurs vies dans la même vie et je ne changerai pour rien au monde. Ni mon métier, ni mon lieu de vie. Ici, on a une qualité de mer comme nulle part ailleurs et l’air est le plus pur d’Europe. »

Manuel Cohen / Détours en France

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