Echappées Belles - Un été dans les Alpes
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M05629 - 3H - 5,95€ - RD É C H A P P É E S B E L L E S N ° 3
MAI 2020 - 5,95 € - HORS-SÉRIE DÉTOURS EN FRANCE
N ° 3
AVEC SOPHIE JOVILLARD, JÉRÔME PITORIN, TIGA ET ISMAËL KHELIFA
L’émission découverte de
Les Alpes Chamonix-Mont-Blanc, magie du Léman, villages authentiques… balades secrètes en pays de Savoie U n é t é d a n s
Découvrez le goût de terroirs gourmands SAVOI E / HAUTE- SAVOI E
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M 05629 - 3H - F: 5,95 E - RD
Hors-série - Mai 2020 - France métro : 5,95 € - BEL : 6,95 € - LUX : 6,95 € - CH : 11 FS Annecy, la romantique Chamonix, première de cordée Chambéry, un air d’ Italie NOS ÉTAPES DE CHARME
OSEZ L’ÉTÉ !
DE NATURE
DE SPORT
©Office de Tourisme Les Menuires - M.Cellard - J.Bernard
LAUSANE ZUR ICH STUTTGART BERL IN
FRANCE
SUISSE
Paris Londres Bruxelles Amsterdam
GENÈVE
DE FRAÎCHEUR
ANNECY
Tunnel du Mont Blanc
LYON
ALBERT V I LLE
MOÛT I ERS
CHAMBÉRY
Saint Martin de Belleville
Les Menuires
GRENOBLE
ITALIE
Marseille Sisteron
Marseille Barcelone Madrid
st-mar tin-belleville.com
lesmenuires.com
LES ALPES
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É D I T O S
Quelques mots suffisent à éveiller ces grands amours de jeunesse qui jamais ne meurent. Ceux que nous avons piochés dans le grand roman de la haute montagne de Frison-Roche, Premier de cordée, ont agi puissamment sur nos rêves d’évasion, nos besoins de liberté, nos envies de nous dépasser. À admirer les exploits de Sevettaz ou de Ravanel « le Rouge », Chamoniards conquérants de l’impossible, nous ne sommes pas tous devenus accros aux grandes courses, mais mordus des Alpes, assurément. Dans ce numéro, où les échappées belles ne connaissent que de mémorables détours, des rives franco-helvétiques du lac Léman au massif des Bauges, de la vallée d’altitude de la Haute-Maurienne aux alpages des Aravis, de Chambéry à Annecy, les Alpes savoyardes se révèlent dans leurs livrées estivales. Une montagne verte qui réveille l’irrépressible désir de se lever « lorsque monte le crépuscule de l’aube », de choisir son chemin, d’étudier une carte, d’accorder ses envies de balade avec la météo (aussi vitale UN GÉANT AUX PIEDS FRAGILES
que le choix de ses chaussures de marche). La montagne, moyenne ou haute, met les sens à vif, donne libre cours à cette espèce d’alacrité du corps et de l’esprit. Et il ne s’agit quasiment plus d’une histoire de randonnée, de découverte d’étourdissants paysages, d’approche d’un patrimoine : nous sommes dans la jouissance primitive de la vie. Quant aux pentes du Mont-Blanc, de la Mer de Glace à la vallée Blanche ou au glacier des Bossons, elles n’attendent que votre visite mais surtout le plus grand des respects. Le tourisme de masse est un danger pour la nature. D’ailleurs, pour tenter d’endiguer le développement d’un « Mont-Blanc Land », un collectif d’associations (françaises, suisses, italiennes), les ProMONTBLANC, espère une inscription du massif sur la liste du patrimoine mondial de l’Unesco. N’oublions pas que le toit de l’Europe est le seul point culminant des cinq continents dépourvu de toute protection. C’est probablement à cette condition que le Mont-Blanc résonnera pour longtemps des mots de Samivel : « Voici l’espace, voici l’air pur, voici le silence / Le royaume des aurores intactes et des bêtes naïves. »
DOMINIQUE ROGER – RÉDACTEUR EN CHEF DE DÉTOURS EN FRANCE
LES PIEDS SUR TERRE, LA TÊTE DANS LES NUAGES
Gilles Lansard / Détours en France
Ce nouveau hors-série de Détours en France correspond à un moment très particulier pour toute l’équipe d’ Échappées Belles : bientôt, lors de notre quinzième saison, nous fêterons le 500 e numéro de l’émission ! Savoie, Haute-Savoie, Alpes du Sud, Route des Grandes Alpes, Chamonix, Annecy, lacs italiens, lac Léman… une quinzaine d’ Échappées Belles ont déjà
en une bouffée de CO 2 , d’ici la fin du siècle. Sa faune et sa flore prodigieuses (près de 40% des espèces de la flore européenne) sont elles aussi menacées sous la pression conjointe de l’urbanisation, du tourisme de masse et du réchauffement. Nos Alpes, une source de vie plus que jamais à préserver. Mais également une source intarissable d’inspiration ! En toutes
saisons, un ascenseur pour les paradis terrestres, à travers ses villages, ses forêts, ses chemins de randonnée, ses lacs et ses alpages. Le moyen le plus sûr d’avoir, au propre comme au figuré, la tête dans les nuages. Que ce hors-série spécial Alpes vous donne l’envie, comme nous, de retourner encore et toujours, avec bonheur et respect, dans nos Alpes. S’y perdre est toujours une façon de se retrouver.
été consacrées aux Alpes. Et nous y retournerons encore, avec le plus grand plaisir. Et le plus grand respect. Car les Alpes nous imposent de garder les pieds sur terre. Nos montagnes nous abreuvent, nous nourrissent. Elles sont notre repère, notre curseur, le baromètre géant de l’urgence climatique : à cheval sur huit pays, le château d’eau du continent est en danger. Ses glaciers pourraient disparaître
RENAUD VILLAIN – RÉDACTEUR EN CHEF D’ÉCHAPPÉES BELLES
Hors-série / Détours en France / www.detoursenfrance.fr
ÉCHAPPÉES BELLES
LES ALPES
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S O M M A I R E
ÉDITOS SOPHIE, JÉRÔME, TIGA ET ISMAËL LEURS ÉCHAPPÉES BELLES UN ÉTÉ DANS LES ALPES PORTFOLIO LÉGENDAIRES GORGES DU FIER ; SUR LES SENTIERS DE LA SAUVAGE VANOISE LES BALCONS DU MONT BLANC AIGUILLE DU MIDI — POINTE HELBRONNER ; COL DE BALME — AIGUILLETTE DES POSETTES ; MONTENVERS — MER DE GLACE ; FLÉGÈRE — PLANPRAZ LE REBLOCHON CHAMONIX L’APPEL DES CIMES 24 HEURES AVEC LES SECOURISTES DE HAUTE MONTAGNE LE VAL MONTJOIE LA MONTAGNE RIANTE CHAMBÉRY DE SI NOBLES AMBITIONS L’AVANT-PAYS SAVOYARD LA FRONTIÈRE OUVERTE FONDUE OU RACLETTE ? ANNECY LA VENISE DES ALPES LE TOUR DU LAC D’ANNECY ; LE LAC D’ANNECY EN RIVA LE GÂTEAU DE SAVOIE LA HAUTE-MAURIENNE GRANDEUR NATURE LE MASSIF DES BAUGES UN PETIT PARADIS PRÉSERVÉ LA TOME DES BAUGES LE LAC LÉMAN L’ÉLÉGANCE FAITE RIVES LA SUISSE NOUS MÈNE EN BATEAU ; MONTREUX, LA RIVIERA SUISSE ; VEVEY, TRANQUILLEMENT HELVÈTE ESCAPADE EN SUISSE LE JUNGFRAUBAHN CARNET DE VOYAGE LES ALPES 3 6 10 12 16 26 28 32 34 40 46 52 54 66 68 74 79 82 90 96
P.16 LES BALCONS DU MONT BLANC
Philippe Roy / Détours en France
P.34 LE VAL MONTJOIE LA MONTAGNE RIANTE
Gilles Lansard / Détours en France x 2
P.54 ANNECY LA VENISE DES ALPES
Hors-série Échappées Belles En collaboration avec
Hors-série / Détours en France / www.detoursenfrance.fr
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En 2021, le magazine Échappées Belles soufflera ses 15 bougies et célébrera son 500 e numéro, son 500 e voyage. Un destin exceptionnel. Merci de votre fidélité !
Pour Sophie Jovillard, Jérôme Pitorin, Tiga et Ismaël Khelifa, pour les équipes de tournage et de production, pour les journalistes sur le terrain, ces 15 saisons représentent des milliers de kilomètres parcourus, des centaines d’heures passées dans des halls d’embarquement ou dans des hôtels plus ou moins confortables. Surtout, ce sont des centaines de rencontres, des milliers de moments et d’émotions partagés avec celles et ceux qui ont accepté de nous accueillir quelques heures ou quelques jours dans leur région, leur village, leur maison. Des chemins qui se sont croisés, des amitiés qui se sont nouées, partout, en France et dans le monde. Avec une évidence qui définit l’ADN d’ Échappées Belles , et qui explique sans doute aussi son succès : il n’y a rien de plus beau que l’humain. La récente actualité a remis cette valeur au premier plan de nos existences. Le mot « confinement » n’est-il pas le parfait contraire de « voyage »? En quelques semaines, nos vies, nos habitudes, notre regard sur le monde ont changé. Et le voyage est devenu « virtuel », par écran interposé. Durant cettepériode, les audiences de nos Échappées Belles ont battu des records historiques sur France 5 et France 3. Nous sommes tous très fiers d’avoir pu ainsi entrouvrir, chaque semaine, à votre intention, une fenêtre sur les destinations qui vous font rêver. Place maintenant aux questions ! L’occasion ne nous est-elle pas donnée de redécouvrir la France et ses paysages si variés, si riches? N’est-il pas l’heure de repenser nos loisirs, de prendre notre temps? De revenir aux plaisirs simples? Les équipes d’ Échappées Belles en sont certaines. Elles continueront de vous montrer des lieux et des gens formidables, uniques. On dit que l’espoir peut remuer les montagnes. La formule tombe à pic pour ce numéro consacré aux Alpes !
JÉRÔME PITORIN « Nos Échappées Belles constituent une émission de voyage et de découverte à travers
les rencontres que nous faisons. Nous donnons à voir, à comprendre, à apprendre, à rêver et, surtout, à partager : une valeur qui fait le sel de chaque voyage. Tous les quatre, avec nos styles respectifs, nous sommes des “monsieur et madame Tout- le-Monde”. Nous ne faisons ni plus ni moins que ce que les téléspectateurs pourraient faire, d’où cette identification très forte. »
Hors-série / Détours en France / www.detoursenfrance.fr
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ISMAËL KHELIFA « Avoir rejoint l’équipe d’ Échappées Belles , c’est aussi excitant pour moi que pour un joueur de foot professionnel qui, tout à coup, aurait le droit d’enfiler le maillot de son club de prédilection! Cela représente une énorme fierté. Participer à la présentation d’un aussi beau programme que l’on regarde chez soi par plaisir, quel bonheur ! Toute l’équipe est véritablement formidable. »
TIGA « Si je devais définir l’émission Échappées Belles en seulement trois adjectifs, je dirais : altruiste, instructive, passionnante. Sincèrement, je pense que le succès du programme repose sur notre démarche commune : avant tout, quelle que soit la destination, aller à la rencontre des gens. C’est une belle émission car à taille humaine, avec des valeurs fortes. »
SOPHIE JOVILLARD « “Voyager sans rencontrer l’autre, ce n’est pas voyager, c’est se déplacer”, écrivait l’exploratrice
Alexandra David-Néel… J’aime cette phrase, qui reflète pour moi l’ADN de notre émission. Le voyage, c’est la rencontre! Dans une actualité parfois très anxiogène, notre regard positif et bienveillant sur le monde qui nous entoure fait du bien. »
Nathalie Guyon / FTV
Hors-série / Détours en France / www.detoursenfrance.fr
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SOPH I E JOV I LL ARD AU PLUS PRÈS DES GENS
Sophie Jovillard fait partie de ces personnes que vous venez à peine de saluer et, déjà, elles semblent appartenir au cercle de vos intimes. Qu’on lui propose de tondre un mouton, de participer à la mise bas d’une chèvre, de partir pêcher la coquille Saint- Jacques ou de fabriquer du reblochon, elle s’exécute avec un enthousiasme et une spontanéité qui forcent le respect de ses hôtes. Sa botte secrète? Elle vous répond que, justement, elle n’en a pas ! Si, depuis maintenant
Nathalie Guyon / FTV x 4
S E S G R A N D E S É T A P E S … 1995: Débuts au petit écran comme animatrice et coproductrice artistique de CQFD , magazine culturel sur TLM (Télé Lyon Métropole). À partir de 1998: Animatrice et coproductrice de magazines de voyage et de découverte de France 3 Régions (La Route du lapin, La Belle Bleue, Une nuit en ville) et de la chaîne Voyage. Depuis 2006: Animatrice du magazine Échappées Belles sur France Télévisions. Présentatrice de la collection documentaire Les Trésors de…, sur France 5.
presque quatorze ans, elle bourlingue avec succès au fil des destinations d’ Échappées Belles, c’est parce que cette fringante « vétérante » de l’émission ignore superbement les « recettes ». « Il y a, chez les Anglo- Saxons une expression que j’aime beaucoup : girl next door. Ce qui signifie quelque chose comme “la fille qui ressemble à tout le monde”. J’espère simplement que je suis cette fille-là… »
On l’a vu dans l’Aveyron sauter à l’élastique. Descendre en rappel au fond d’un gouffre de glace en Alaska. Et encore se lancer en bobsleigh sur une piste olympique… Casse-cou, Jérôme? Forcément plus complexe. S’il part pour des aventures que la plupart des journalistes se contenteraient de raconter sans jamais avoir mouillé leur chemise, c’est parce qu’il aime confronter ses rêves à la réalité, et que la réalité est celle des femmes et des hommes qui font le sel de ses rencontres. Car derrière sa simplicité et son humanité, le globe-trotter- journaliste-photographe-producteur est un sensitif qui capte, d’un coup d’œil, le monde qui l’entoure. Pour lui, voyager, découvrir, rencontrer… sont autant une affaire de curiosité qu’une façon de vivre pleinement sa vie.
S E S G R A N D E S É T A P E S … 1993-2004: Journaliste et chroniqueur pour Y a pas photo !, Exclusif, Coucou c’est nous ! Le Retour, sur TF1. 2006-2008: Chroniqueur et rédacteur en chef de Nouvelle Star sur M6. 2009 : Réalisateur de documentaires pour Canal+. Depuis 2010: Animateur d’ Échappées Belles sur France Télévisions.
JÉRÔME P I TOR I N PASSEUR D’ÉMOTION
S E S G R A N D E S É T A P E S … Guide en régions polaires, Arctique et Antarctique. 2008 et 2014: Repérages et enquêtes pour l’émission Rendez-vous en terre inconnue sur France Télévisions . 2009-2010: Journaliste à Radio-France. 2013: Co-auteur du livre Mystères polaires (éditions de La Martinière). 2017-2018: Chroniqueur pour l’émission La Quotidienne sur France 5. Depuis 2019: Animateur d’ Échappées Belles, sur France Télévisions. 2020: Auteur de La Vie simple (First Éditions).
I SMAËL KHEL I FA SON USAGE DU MONDE
Paraphrasant le titre d’un ouvrage de l’écrivain-voyageur Nicolas Bouvier, Ismaël Khelifa semble avoir fait sien le désir de partager son « usage du monde ». Que ce soit dans des romans pour la jeunesse, inspirés de son expérience de guide dans le Grand Nord et sur le continent austral, dans des scénarios de documentaires ou des récits d’aventures avec l’explorateur des mondes polaires Nicolas Dubreuil, Ismaël (se) forge un véritable art de voyager, basé sur une posture nomade et sur une dynamique de l’altérité. Il affectionne de donner du temps au temps, n’hésitant pas à exprimer son ressenti de l’instant de ses découvertes et de ses rencontres, plutôt que de se poser comme « celui qui sait ». Ne jamais se prendre au sérieux mais toujours faire chaque chose le plus sérieusement possible : c’est avec ce credo, qu’Ismaël nous entraîne dans de sacrées belles échappées autour du monde…
SES GRANDES ÉTAPES… 2006: Première Dauphine de la Miss France Alexandra Rosenfeld. 2007: Chroniqueuse pour Les Enfants de la télé sur TF1. Mannequin égérie de la maison Courrèges. 2008: Animatrice de Hit Talent sur W9. 2011: Animatrice de Ô Féminin et de Riding Zone sur France Ô. Depuis 2018: Animatrice d ’Échappées Belles sur France Télévisions.
T I GA INTRÉPIDE REBELLE
Dès son arrivée dans l’émission, Tiga a trouvé sa place au sein des animateurs voyageurs. Car ce troisième des mousquetaires, qui comme chacun sait étaient quatre, a un caractère trempé. De ses origines africaines – elle est née au Bénin d’une mère centrafricaine et a grandi au Burundi –, Sophie Alladoum Tiga Ducasse a choisi, nullement par hasard, d’utiliser son troisième prénom: Tiga signifie « la rebelle » en sango, la langue maternelle. Voilà prévenus ceux qui feraient l’erreur de ne voir chez cette ancienne miss qu’une jeune femme charmante, cheveux au vent, yeux tels des calots étincelants de joie de vivre. Car si Tiga plaît, c’est surtout par son appétit de découvrir l’autre avec décontraction et par sa qualité d’écoute. « Je n’ai pas froid aux yeux ! », déclare-t-elle. Pour cela aussi, elle nous séduit.
Hors-série / Détours en France / www.detoursenfrance.fr
« Il était une fois, en bordure du ciel, un grand dôme de neige qui recouvrait les sommets et dominait la vallée. C’était le plus haut de tous ; avant même que les savants l’aient mesuré, on le savait : il était le premier à être habité par les rayons du soleil et, le soir, c’est encore sur ses pentes qu’ils s’attardaient après avoir abandonné toutes les autres cimes. Un peu plus tard, la nuit venant, il soutenait le ciel, et parfois une étoile, lourde d’être seule, toujours suspendue, venait se poser sur ses crêtes et veiller avec lui ; les neiges éternelles sont faites de poussières d’étoiles… » (Le mont Blanc, par Gaston Rébuffat)
Les Drus, les glaciers du Géant et des Bossons, le mont Blanc… L’ivresse des cimes vous tourne la tête à cette simple évocation, mais vous pensez qu’approcher la haute montagne est un rêve inaccessible? Alors, suivez-nous à la découverte des grands massifs savoyards. Ici, les randonnées flirtent avec les « 3000 » ; les sentiers caracolent par les alpages, où folâtrent des torrents ; les ombreuses forêts de conifères, épaisses comme la fourrure des marmottes, mènent à des lacs glaciaires perchés et des hameaux assoupis. Revenu de ces balades au sommet, le Vieil-Annecy, les rives du lac Léman ou la dégustation d’un fromage dans un chalet d’altitude, vous initieront tout autant à la beauté des Alpes.
U N É T É D A N S D O S S I E R R É A L I S É P A R P H I L I P P E B O U R G E T , H U G U E S D E R O U A R D , D O M I N I Q U E L E B R U N , V I N C E N T N O Y O U X E T D O M I N I Q U E R O G E R ( T E X T E ) – P H O T O G R A P H I E S D E G I L L E S L A N S A R D E T P H I L I P P E R O Y LES ALPES
Philippe Roy / Détours en France
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LÉGENDAIRES GORGES DU FIER Un phénomène d’érosion spectaculaire est à l’origine des gorges du Fier, en Haute-Savoie, creusées par la rivière du même nom. Depuis 1869, une passerelle, suspendue à 25 mètres au-dessus des eaux, permet de se faufiler dans ce vertigineux défilé. Le site est évidemment propice au vagabondage de l’imaginaire… Dans les méandres du Fier, en direction de Seyssel, une grotte recèle une mystérieuse légende. Dans ce chaos rocheux bien inhospitalier, au Moyen Âge, l’épouse d’un seigneur y avait, dit-on, trouvé refuge. Alors que la peste avait décimé les villages et l’avait privée de revenus, elle laissa périr sans remords sa mère et toute sa parentèle, avant de prendre la fuite avec une immense fortune. Elle était rongée par le besoin d’amasser, il lui fallait encore et toujours plus. Aussi, depuis sa sordide tanière, elle hantait bois et chemins, afin de rançonner les voyageurs imprudents, les pèlerins égarés, les pauvres hères se rendant à la ville. Ses attaques étaient fulgurantes. Bien peu réchappaient à ses opérations de brigandage. Vols, rapines et sorcellerie lui conférèrent rapidement une réputation de diablesse. Jusqu’au jour où on n’entendit plus parler d’elle ! Et personne, jamais, ne mit la main sur l’incroyable trésor… Mais lorsque des gorges monte une épaisse brume, que les eaux torrentueuses du Fier roulent avec fracas les cailloux de son lit, que tous les bruits alentour s’assourdissent…, ne dirait-on pas que le lieu semble comme habité d’une étrange présence ?
Gilles Lansard / Détours en France
PUBLI-REPORTAGE
LES ALPES GÉNÉREUSES
© A.Pernet
Vallée d’altitude à l’environnement préservé, la Haute Maurienne Vanoise décline à travers ses villages et ses 6 stations, Valfréjus, La Norma, Aussois, Val Cenis, Bessans et Bonneval sur Arc, une destination nature aux portes du Parc national de la Vanoise. Un voyage ressourçant… L ac d’altitude aux eaux turquoise, alpages où ruminent tranquillement les vaches ta- rine en attendant la traite qui sera ensuite tionnelle de pierres et de lauzes a même ser- vi de studio grandeur nature aux films Belle & Sébastien.
transformée en Beaufort, grands espaces où sifflotent les marmottes… Ce sont des trésors naturels qui attendent les visiteurs de la Haute Maurienne Vanoise. Une vallée d’altitude faci- lement accessible en train ou par l’autoroute. Si la nature a en effet été généreuse avec la Haute Maurienne Vanoise, avec les paysages d’exception du Parc national de la Vanoise, la générosité se dévoile aussi dans l’accueil, le cli- mat, le patrimoine ou la gastronomie. Terre d’accueil, cette vallée offre des villages authentiques, qui ont su garder leur âme mon- tagnarde. Comme Aussois ou Bonneval sur Arc, le village pépite : son architecture tradi -
Nichée entre les Alpes du Sud et du Nord, la vallée dispose d’un microclimat lumineux, favo- rable aux loisirs et au bien-être, et qui offre une bulle de fraîcheur en période de canicule. Générosité de la nature, du climat et… des spécialités ! De Valfréjus à Bonneval sur Arc en passant par Val Cenis, le patrimoine est riche et varié. La foison des activités, de la balade au VTT en passant par toutes les activités outdoor, per- mettent de profiter des grands espaces. Quant aux gourmands, ils trouveront également de quoi se régaler avec des produits du terroir (Beaufort AOC, bleus de Bonneval et de Termi - gnon, pain de Modane, cousu de Bessans…) Une montagne différente qui s’offre à celles et ceux qui aiment s’imprégner des Alpes. Des Alpes généreuses portées par des habitants, des commerçants, des agriculteurs ou des artisans amoureux de leur territoire et toujours prêts à partager leurs passions.
© A.Pernet
VTT, rando et ressourcement La Haute Maurienne Vanoise développe un Es- pace VTT R-BIKES constitué d’itinéraires théma- tiques, sportifs et familiaux. Et notamment le tout nouvel Espace VTT ludique de Chantelouve à Bessans, un aménagement unique en France avec des parcours intégrés aux paysages. Sur les sentiers, dans l’eau ou dans les airs, la Haute Maurienne Vanoise offre également un vaste terrain de jeux. Ici, on passe d’une balade facile pour aller voir les marmottes aux sensa- tions fortes avec les vertigineuses via-ferrata du Diable entre La Norma et Aussois. On atteint les 3 000m en randonnée classique, ou on se ressource autour des plans d’eau.
Informations au 04 79 05 99 06 - haute-maurienne-vanoise.com
© L.Perron
SUR LES SENTIERS DE LA SAUVAGE VANOISE Le massif de la Vanoise est situé au cœur de la Savoie, entre la vallée de la Tarentaise et celle de la Maurienne, où s’écoulent les premières eaux de l’Isère et de l’Arc. Ses limites rejoignent celles du parc national du Grand Paradis, en Italie. S’il y a un massif propice aux randonnées, c’est bien celui-là. Parmi les parcours proposés : glaciers, dômes, lac de l’Étroit, Grande Casse, sentier du Pèlerin, Notre-Dame-des-Vernettes… Le parc national de la Vanoise (le plus ancien de France) recense 250 itinéraires et 400 kilomètres balisés, à découvrir à son rythme, en groupe ou en famille. Sans oublier les « musts » que constituent la Via Alpina (suivant l’arc alpin) et le GR®5 (traversant tout le massif, du nord au sud). Pour la plupart, les sentiers sont praticables entre début juin et fin octobre, mais il existe un risque d’enneigement tardif ou précoce. Comme toujours, il est plus prudent de se renseigner avant de partir en montagne. Dans cette nature très préservée, la faune prospère et l’on y observe, outre les malicieuses marmottes et les majestueux aigles royaux, chamois, martres, renards, lièvres variables, tétras-lyres… Sur la photo, le lac des Vaches (2 318 mètres d’altitude), d’origine glaciaire, aujourd’hui en partie asséché par les alluvions et les boues argileuses qui le comblent. Depuis 1949, un passage dallé permet de le franchir à pied, avant de rejoindre le refuge du col de la Vanoise.
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Gilles Lansard / Détours en France
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Conquérants du sublime. Ces alpinistes sont parvenus au sommet du piton Sud de l’aiguille du Midi : 3 842 mètres !
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LES BALCONS DU MONT BLANC
Les alpinistes grimpent jusqu’à son sommet, les grands marcheurs en font le tour. Par le symbole qu’il représente et l’exceptionnelle beauté de son décor environnant, le mont Blanc est le Graal du tourisme alpin, le point de ralliement de tous les amoureux des cimes. Depuis son camp de base quatre étoiles, Chamonix, il est également possible d’aborder le géant en douceur, par de faciles et panoramiques approches. Histoire de mettre le massif à portée de toutes les envies.
T E X T E D E P H I L I P P E B O U R G E T – P H O T O G R A P H I E S D E P H I L I P P E R O Y
ÉCHAPPÉES BELLES
LES ALPES
LES BALCONS DU MONT BLANC
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Au-delà de 3500 mètres d’altitude, le massif du Mont-Blanc devient un autre monde. Celui du blanc, du froid et des sensations pures. Par chance, chacun peut s’y aventurer sans danger. Une splendide découverte permise par les téléphériques de l’aiguille du Midi et de la pointe Helbronner. AIGUILLE DU MIDI – POINTE HELBRONNER
L’arête de la vallée Blanche. Au premier plan, les aiguilles de Chamonix; au deuxième plan, l’aiguille Verte, le glacier de Talèfre et le Triolet, depuis l’aiguille du Midi.
6 heures et demie. Chamonix, gare de départ du téléphérique. À cette heure matinale, les touristes sont rares. Les clients qui attendent appartiennent au cercle fermé des alpinistes. Ils viennent de tous les pays. Ils sont reconnaissables à leurs tenues polaires et aux sacs qu’ils portent, remplis de baudriers et de piolets. La parole est rare, on se salue du regard. Quelques visages tannés trahissent les guides : aujourd’hui ici, demain dans les Andes. L’un d’eux, constatant que la météo s’annonce maussade, va « tenter le mont Blanc en six heures ». Presque la routine. Les
joies de l’effort sont pour eux mais nous n’allons pas nous plaindre. Avec notre paire de tennis, nous sommes
venu profiter du spectacle. Et quel spectacle! À peine le temps de s’habi- tuer au transport que, déjà, l’aiguille
Une cordée sur le glacier des Pèlerins, entre l’aiguille du Plan et celle du Midi.
du Midi est là. À plus de 3800 mètres, la température flirte avec le degré zéro mais nous y pensons à peine, sub- jugué par le panorama sur les Alpes blanches et la vallée de Chamonix. Trois alpinistes encordés sont à l’ou- vrage sur une arête. D’autres achèvent de s’équiper dans un tunnel de glace. Les seuls bruits que l’on perçoit sont ceux d’un torrent de fond de vallon et le câble de la télécabine qui annonce le TÉLÉPHÉRIQUE, UNE HISTOIRE CENTENAIRE En 1909, la Compagnie française des funiculaires obtient une concession pour le tracé du téléphérique. Deux ans plus tard, les travaux démarrent. Interrompus par la guerre, ils reprennent en 1924 et une première ligne atteint le col du Midi en 1940. C’est en 1955 qu’est mis en service le second tronçon, jusqu’à l’aiguille du Midi. La liaison « vallée Blanche » (Panoramic Mont-Blanc) permet enfin de relier la France à l’Italie, en 1957 ! Cette aventure humaine et technique a mobilisé des centaines d’hommes de la vallée de Chamonix et du Val d’Aoste, travaillant dans des conditions extrêmes. Le téléphérique de l’aiguille du Midi compte 22 kilomètres de câbles porteurs et tracteurs, sur 2747 mètres de dénivelé.
montent quotidiennement à l’aiguille du Midi… Désireux de garder notre avance, nous nous échappons vers la pointe Helbronner. « LES ARAIGNÉES DU CIEL » Face aux Grandes Jorasses, le cirque de la vallée Blanche et du glacier du Géant défile sous les « œufs ». Tan- tôt bourrelé de séracs, tantôt strié de crevasses, ce terrain sensible est aussi animé de cordées progres- sant à pas lents sur des itinéraires que seuls connaissent les guides. La télécabine est bien dressée : reliant la France à l’Italie depuis 1957, elle s’arrête à intervalles réguliers pour permettre d’apprécier le splendide décor. À 3462 mètres, l’arrivée à la pointe Helbronner, sous les rafales et les nuages, serait presque décevante. Le temps que notre mémoire se sou- vienne des pics célèbres à portée de vue (la pointe Walker, 4208 mètres ; le Cervin, 4478 ; le mont Rose, 4634) et nous reprenons le chemin du retour dans « les araignées du ciel ». Une double dose de télécabine « scénique » dont on ne va pas se priver ! + Téléphérique de l’aiguille du Midi et télécabine Panoramic Mont-Blanc. 0450532275. compagniedumontblanc.com
prochain convoi. Un ascenseur grimpe à l’aiguille ultime, 3842 mètres. Là- haut, tout s’éclaire. Le refuge des Cosmiques est en contrebas, posé en nid d’aigle juste au-dessus du gla- cier. L’aiguille et le dôme du Goûter (4304 mètres) sont au sud-ouest, sous les nuages blancs, passages habituels vers le sommet du mont Blanc. D’ail- leurs, le refuge éponyme se devine à peine à travers la brume. Les pre- miers groupes de Japonais annoncent l’arrivée des grands flux. Au plus fort de l’été, jusqu’à 5000 personnes
Un groupe d’alpinistes dans les séracs du Géant, le principal pourvoyeur de la Mer de Glace ; observé depuis la télécabine de Helbronner.
Hors-série / Détours en France / www.detoursenfrance.fr
ÉCHAPPÉES BELLES
LES ALPES
LES BALCONS DU MONT BLANC
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Il en faut pour tout le monde. Au-dessus de l’Argentière, cette balade s’adresse aux amateurs de marche
tranquille, qu’attirent le spectacle de la nature et les balades contemplatives. Récompense : un formidable « panoramique » sur la vallée de Chamonix et les sommets. COL DE BALME – AIGUILLETTE DES POSETTES
Accessible à tous, la randonnée du col de la Balme à l’aiguillette des Posettes, sur le circuit du tour du mont Blanc, dévoile les merveilles de la vallée de Chamonix, des généreux alpages aux chalets couverts de tavaillons jusqu’au somptueux panorama offert à l’arrivée.
Nous avions été prévenu: « Le col de Balme, c’est très facile et, en plus, on découvre toute la vallée. » En effet. Rien n’est plus simple que de rejoindre ce passage, dont la particularité est d’être situé à la frontière suisse. Depuis le hameau du Tour, au-dessus d’Argentière, télécabine et télésiège grimpent en deux tours de câbles au sommet de l’alpage. Dix minutes de marche et nous voilà à 2200 mètres, au col. Nous ne sommes pas seul. L’iti- néraire du tour du mont Blanc (TMB) passe ici et le refuge aux volets rouges reçoit depuis des lustres les amateurs de charcuterie. Dehors, au soleil, du linge blanc sèche et quelques vaches d’Hérens broutent en contrebas. Des grappes de touristes sont assis dans l’herbe odorante, tournés vers le mont Blanc. Le sommet nous présente son
recouvertes de tavaillons. Le clou du spectacle est plus haut, à une heure de marche, au sommet de l’aiguillette des Posettes (2201 mètres). Sorte de pro- montoireavancéau-dessusde lavallée de Chamonix, c’est une table d’orienta- tion naturelle. Jugez plutôt. Au nord, le barrage et le lac d’Émosson, ainsi que le village de Châtelard; à l’ouest, l’ai- guille de Loria et les célèbres aiguilles Rouges ; au sud, le mont Blanc, l’ai- guille Verte (4122 mètres) et le vallon de l’Argentière ; à l’est, l’aiguille du Tour (3542 mètres). Le mont Blanc peut bien se voiler, le spectacle se poursuit de tous côtés ! Une heure suf- fira pour redescendre, à pied cette fois, jusqu’au hameau du Tour, en finissant par un joli parcours en sous-bois. Au total, déjeuner et pauses, nous avons eu cinq heures de pure splendeur.
dôme bienveillant, au-dessus de la vallée de Chamonix en auge. TABLE D’ORIENTATION NATURELLE Un coup d’œil côté suisse pour aper- cevoir Martigny et la route de La For- claz et nous nous glissons dans les pas des « forçats » du TMB, jusqu’au col des Posettes (1997 mètres). Juste en dessous sont posés les chalets de l’alpage de Balme et leurs grangettes,
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Sur le sentier des Frêtes, face à l’aiguille Rouge , avant d’amorcer une descente parmi les pins, qui ramènera les randonneurs jusqu’au hameau de Tour.
+ Accès. Télécabine et télésiège de Balme, au départ du hameau du Tour, à Argentière. Départ. Depuis le haut du télésiège, 2065 m. Arrivée. Le Tour, 1453 m. Durée. 5 heures, avec pauses. Niveau. Facile. Du col de Balme à l’aiguillette des Posettes. Infos télécabine-télésiège. 0450532275. compagniedumontblanc.com
Dans l’alpage de Balme, le chemin de randonnée. En été, il accueille des troupeaux de vaches d’Hérens. À droite: Le sommet de l’aiguille des Posettes (2201 mètres).
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Le chemin-balcon conduit les marcheurs au signal Forbes (2198 m), belvédère exceptionnel donnant sur la Mer de Glace, tandis que se dévoilent les aiguilles de la République et des Grands Charmoz.
C’est la sortie la plus emblématique au départ de Chamonix. Grimpant à 1913 mètres, le train du Montenvers dépose les passagers au-dessus d’une Mer de Glace… anémiée. Une
excursion édifiante, témoin inquiétant des effets de l’emballement climatique. MONTENVERS – MER DE GLACE
110 ans. C’est l’âge canonique du train à crémaillère du Montenvers. En montant dans l’un des vénérables wagons rouges à banquettes de bois, où s’entassent des dizaines de tou- ristes, on jurerait presque que lematé- riel est d’époque. Sacrée aventure, en tout cas, que l’ouverture de cette ligne ferroviaire! En 1892, lorsque le pro- jet est annoncé, les Chamoniards s’y opposent, parce qu’ils prônent le res- pect de la nature. Déjà… Que diraient- ils s’ils voyaient l’état dans lequel se trouve le glacier aujourd’hui ? L’arrivée en gare du Montenvers, après vingt minutes de grimpette au milieu des conifères, reste un moment fort, car un train dans les cimes n’est pas chose courante. Mais la surprise est grande
encore dévaler environ 500 marches et plusieurs passerelles métalliques avant de pouvoir, enfin, rallier l’en- trée de la Grotte de Glace. Comme une litanie lancinante et lugubre, des panonceaux dans la descente indiquent les niveaux précédents du glacier. En 1990, en 2000…: la rapi- dité avec laquelle sa hauteur diminue est ahurissante. La Mer de Glace est
à la vue de la masse grisâtre du glacier en contrebas : comme atteint, sous les effets combinés du réchauffement cli- matique et de la pollution, d’une ano- rexie incurable. UN MASTODONTE QUI RÉSISTE Une télécabine permet de rejoindre la Mer de Glace. Ou presque. Puisque, sous l’effet de la fonte, il nous faut
Le petit train rouge à crémaillère du Montenvers parcourt, en 20 minutes, 5 kilomètres à flanc de montagnes, représentant 1000 mètres de dénivelé.
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La télécabine relie Montenvers à la Mer de Glace. À destination, près de 500 marches emmènent jusqu’à une grotte spéciale : un chalet sculpté à même le glacier, qui expose la vie des montagnards du début du xix e siècle.
remontons à la gare d’arrivée du Mon- tenvers, confusément conscient que nos choix de consommateur apportent leur pierre à la destruction du géant. « UNE BOUCHE EFFRAYANTE » Et l’on se prend à rêver du spectacle d’un autre acabit auquel ont dû assis- ter, à la fin du xix e siècle, les grands écrivains venus ici en pèlerinage. Nous sommes dans les années 1880, c’est la fin du « petit âge glaciaire » et le site est au meilleur de sa forme. Rappelons-nous Victor Hugo, évo- quant, dans En voyage : « La Mer de
pourtant un mastodonte qui résiste. Née au pied du mont Blanc, elle ser- pente sur 7 kilomètres, passant de 3900 à 1400 mètres d’altitude. Dans sa plus grande largeur, elle atteint 1950 mètres. Son épaisseur moyenne est de 200 mètres mais, par endroits, elle dépasse les 400 mètres. Et même si son front a reculé, elle continue d’avancer, à raison de 90 mètres par an à hauteur de Montenvers (1 centimètre par heure!). Au total, avec 40 km 2 , elle reste le plus grand glacier de France et le troisième d’Europe. C’est tout de même un peu déboussolé que nous
Glace, comme un bras qui se recourbe, penche et précipite ses blocs marmo- réens, ses lames énormes, ses tours de cristal, ses dolmens d’acier, ses collines de diamant, dresse à pic ses murailles d’argent et ouvre dans la plaine cette bouche effrayante… » Au-delà du talent littéraire, n’est-ce pas le signe d’une vigueur aujourd’hui évanouie? + Train du Montenvers. 35 place de la Mer-de-Glace. 74400 Chamonix-
Mont-Blanc. 0450532275. compagniedumontblanc.com
T I G A « Saviez-vous que le reblochon est né d’une ruse des paysans ? Autrefois, les propriétaires des alpages exigeaient que les fermiers les rétribuent sur la quantité de lait produite par les troupeaux. Ceux-ci pratiquaient donc une traite incomplète et, dès le départ du contrôleur à la solde des propriétaires, ils procédaient à une seconde traite ! Le reblochon doit son nom à cette ruse : en patois de la Yaute (Haute-Savoie), “re-blocher” signifie “pincer les pis une deuxième fois”. »
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Vue sur le massif du Mont-Blanc, aiguilles de Chamonix, aiguille du Midi, mont Maudit, mont Blanc, dôme du Goûter, aiguille du Goûter, glacier des Bossons…: la randonnée par le Grand Balcon Sud déploie des panoramas incomparables.
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Ce grand classique de la balade panoramique est très prisé des marcheurs. Du chalet de la Flégère jusqu’à Planpraz, à découvert, les randonneurs voient s’ouvrir toute la chaîne du Mont-Blanc. Magnifique… sauf quand l’orage s’en mêle.
Bien qu’il soit tard, nous avons décidé de nous tenir à notre programme: nous attrapons l’un des derniers téléphériques du jour pour La Flé- gère. C’est l’étémais, comme le temps s’est couvert, il n’y a plus grand monde dans les parages. L’excursion sans la foule sera encore plus belle! Juste sous la gare d’arrivée de la télécabine, le sentier s’échappe plein ouest, direc- tion la Charlanon. Le chemin, docile et plat, serpente à découvert et mérite son surnom de « Grand Balcon Sud ». En face, de l’autre côté de la vallée, tandis que nos oreilles enregistrent le cri des marmottes, le massif du Mont- Blanc nous livre son plus beau profil. QUAND LES ÉCLAIRS APPROCHENT Un torrent en fond de vallée? C’est l’Arveyron, émissaire bouillonnant de la Mer de Glace. Un pic dressé à travers les nuages? L’aiguille Verte et ses 4122 mètres. Une construc- tion, là-haut, sur un replat ? Le refuge du Montenvers. Nous pressons le pas car le tonnerre, encore discret, gronde. Du sol remontent des odeurs âcres de terre humide, annonçant FLÉGÈRE – PLANPRAZ
Le sentier traverse d’anciens pâturages et rejoint, à mi-parcours, la combe de Charlanon (1820 m).
L’aiguille Verte
(4122 m), vue de la terrasse de la gare des téléphérique et télécabine de Planpraz- Brévent. L’ascension de la Verte, réputée difficile, est réservée aux
alpinistes émérites.
rassurante, quand nous nous retrou- vons par mégarde à grimper vers un col. C’est connu, en cas d’orage, il faut descendre : nous repiquons dare-dare dans un chemin forestier. Le déluge est là! Nous nous abritons sous l’auvent d’une cabane pour laisser passer le grain, violent. Au-dessus, la gare nous nargue, mais il n’est plus question de remonter. Par chance, des forestiers bienveillants, passant par hasard, nous embarquent dans leur 4x4. Ils nous épargneront les affres d’une des- cente fastidieuse, pas les secousses. Pas grave : nous sommes de retour, trempé mais heureux, à Chamonix… + Accès. Téléphérique de Brévent-Flégère, au départ du hameau des Praz. Départ. Refuge de La Flégère, 1877 m. Arrivée. Gare de la télécabine de Planpraz, 1999 m. Durée. 2 heures. Niveau. Facile. Itinéraire du tour du mont Blanc (TMB). Infos téléphérique. 0450532275. compagniedumontblanc.com
une averse. Une heure de marche et voilà l’étape intermédiaire, la Charla- non, 1812 mètres. Le massif du Mont- Blanc se livre encore mais la brume et le gris l’envahissent… et les éclairs approchent. Le temps n’est plus à la contemplation mais à la marche for- cée. C’est ainsi que les erreurs sur- viennent ! Tête baissée, nous voulons rejoindre la télécabine de Planpraz, dont nous avons aperçu la construction
Le restaurant d’altitude de Planpraz dispose d’une terrasse sur le massif du Mont-Blanc. Une pause bienvenue pour les marcheurs.
ÉCHAPPÉES BELLES
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P R O D U I T
FROMAGÈRE À LA CLUSAZ
Dans sa ferme familiale des Corbassières, à La Clusaz, Marie-Louise Donzel élève un troupeau de 55 vaches abondances. Avec leur lait, elle fabrique du reblochon de Savoie fermier deux fois par jour, toute l’année.
Jean Daniel Sudres / Voyage-gourmand.com x 2
Sur le Fier, la vallée de Thônes et ses alpages sont indissociables du fromage qui a fait sa renommée. Le reblochon, au lait cru entier de vache (abondance, montbéliarde, tarine), à pâte pressée non cuite et croûte lavée, obtient son appellation d’origine contrôlée (AOC) en 1958. Sa zone de production couvre une partie de la Haute-Savoie (Pays de Thônes, massif des Aravis) et déborde en Savoie (val d’Arly). Il se présente sous la forme d’un cylindre plat (13 à 14 centimètres de diamètre et 3,5 d’épaisseur), dont le poids varie de 450 à 550 grammes. Il existe aussi en petit format (9 centimètres de diamètre, 3 d’épaisseur). L’AOC reconnaît deux catégories. Le reblochon de Savoie, dont le lait provient de plusieurs troupeaux et qui est produit dans une fruitière : il est authentifié par un tampon de caséine de couleur rouge. Pour le reblochon de Savoie « fermier », le lait provient d’un unique troupeau: le tampon est de couleur verte. Le reblochon s’apprécie toute l’année, mais il est meilleur à la saison chaude. Dès la mi-mai, les vaches sont sorties dans les alpages et se nourrissent de violettes, de trèfles, de serpolets…, dont les arômes se retrouvent dans leur lait et jusqu’au fromage. Un bon reblochon arbore une croûte sèche, de couleur orange-rose et recouverte d’une fine « mousse » blanche. Celle-ci cache une pâte onctueuse et souple de couleur ivoire, faite et crémeuse à cœur, avec un subtil goût de noisette.
L E R E B L O C H O N T E X T E D E D O M I N I Q U E R O G E R
S O P H I E J O V I L L A R D « C’est à La Clusaz, au fond de la vallée des Confins, dans la ferme familiale de Marie-Louise Donzel, que j’ai mis la main à la pâte pour fabriquer le fameux reblochon fermier. Ici, tout est fait manuellement : de la traite des 55 laitières à l’affinage en cave, en passant par le caillé et le décaillage. Un mois d’affinage offre un reblochon crémeux à cœur. »
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LE ROI DU PLATEAU Au cœur de l’hiver, la tartiflette ne saurait s’en passer ! Mais c’est à la fin d’un repas qu’il développe tout son potentiel gustatif. Crémeux et mou, un goût subtil, facile à digérer, le reblochon est le roi du plateau de fromages.
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ME I LLEUR APRÈS DEUX HEURES Fragile, le reblochon doit être consommé rapidement après son achat. Il se conserve dans le bac à légumes du réfrigérateur. Pour lui laisser le temps de donner le meilleur de lui-même, il faut le placer à température ambiante deux heures avant de le déguster.
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CHAMONIX, L’APPEL DES CIMES Les eaux torrentueuses de l’Arve, descendant du col de Balme, traversent la cité à vive allure. Chamonix mérite pourtant qu’on s’y attarde. Son architecture éclectique rappelle les grandes heures du tourisme de la Belle Époque. En arrière-plan, les sommets mythiques (mont Blanc, les Drus, aiguille du Midi) exaltent les randonneurs qui s’affairent pour préparer leur excursion.
T E X T E D E V I N C E N T N O Y O U X – P H O T O G R A P H I E S D E G I L L E S L A N S A R D
Le mont Blanc est au centre de tout, à Chamonix. Il a son avenue, sa place, son hôtel, sa boucherie, son agence immobilière, son cho- colat, son parfum de glace… C’est vers lui que tendent tous les regards. Est-il bien dégagé? A-t-il la tête dans les nuages? Devant l’office de tou- risme, les visiteurs scrutent le toit de l’Europe (4810 mètres). Et, parfois, le confondent avec le dôme du Goûter, qui lui ressemble comme un frère. Il faut un peu de temps pour se familiariser avec les sommets qui se déploient tout autour : l’aiguille du Midi, le glacier des Bossons, les aiguilles de Chamonix, les Drus, l’aiguille Verte… Toute une mythologie qui fait battre le cœur des alpinistes. C’est d’ailleurs à deux pas de l’office de tourisme que se trouve
leur quartier général. Derrière son austère façade grise, la Maison de la montagne fourmille de personnages hauts en couleur : les membres de la Compagnie des guides de Chamonix. Visages taillés à la serpe et burinés par les éléments, le verbe haut parfois, ils ont l’habitude de retrouver leurs clients chaque jour à 18 heures sur le parvis. Les plus belles ascensions se préparent ici, à l’ombre du clocher à bulbe de l’église Saint-Michel. Au premier étage de la Maison, l’Office de haute montagne (OHM) dispense de précieuses informations aux randon- neurs et alpinistes avant leur départ. Deux solides gaillards se grattent la tête devant une carte au 1/25000 : la météo compromet leur sortie. L’at- mosphère sportive de « Cham’ » ne >
Avenue Michel-Croz, un monument honore le docteur Paccard tourné vers le mont Blanc.
Sous le Brévent, l’église Saint- Michel ( xviii e - xix e siècles). Le bulbe de son clocher rénové il y a une quinzaine d’années brille de toutes ses écailles de titane! À droite, la Maison de la montagne occupe un ancien presbytère.
Page de gauche, haut : Elle dévale du col de Balme, gonflée des eaux de fonte de la Mer de Glace : l’Arve traverse Chamonix puis toute la Haute- Savoie. Page de gauche, bas : La sculpture, sur la place Balmat, est signée Jules Salmson. Réalisé en 1887, ce bronze glorifie les pionniers du mont Blanc : Balmat montre une direction que Saussure semble chercher des yeux.
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va jamais sans un soupçon de gravité. « La montagne fait une quarantaine de morts chaque année dans le secteur, nous apprend-on à l’accueil. Le mont Blanc semble proche et facile, mais beaucoup de personnes mal préparées échouent, notamment à cause du mal des montagnes. » Un prospectus aver- tit : « On ne commence pas sa carrière d’alpiniste par le mont Blanc ! » ROMANTIQUES ET TOURISTES L’appel des cimes, pourtant, n’est jamais retombé depuis le temps glo- rieux d’Horace-Bénédict de Saus- sure et de Jacques Balmat, lesquels sont statufiés au centre du bourg. Saussure, géologue, avait promis une prime à qui atteindrait le premier le sommet du mont Blanc. Le 8 août 1786, Balmat, un cristallier chamo- niard, décrocha la cagnotte avec le docteur Michel Paccard. L’exploit lança Chamonix et sa vallée. Ont accouru d’abord les romantiques, fascinés par les séracs de la Mer de Glace, alors nommés « glacières de Savoye ». Puis les touristes de la Belle Époque venus par la route (grâce à Napoléon III) ou, à partir de 1901, par le chemin de fer. LES SOUVENIRS D’UN ÂGE D’OR Le centre du bourg a conservé de remarquables vestiges de cet âge d’or. Les têtes couronnées des- cendaient à l’hôtel Royal (l’actuel casino), de facturenéoclassique, sur la place Balmat. Presque en face, le café La Terrasse, fantaisie Art nouveau,
La rue du Docteur-Paccard est l’artère principale de Chamonix.
Un pont couvert est jeté au-dessus de l’Arve, en centre-ville.
Devant la Maison de la montagne, les membres de la Compagnie des guides de Chamonix se présentent à leurs clients. Au premier plan, une stèle (1875) rend hommage à Jacques Balmat dit « Mont Blanc » D’autres pépites se cachent à Cha- monix, comme la villa La Tournette (chemin du Folly), à l’étrange toiture pyramidale à trois étages, en forme d’épi. Ou encore la villa Butterfly (montée de la Croix-des-Moussoux), au toit biscornu très modern style. La demeure adopte une forme originale : l’étrave d’un bateau, pour se protéger des avalanches pouvant descendre la Résidence (qui abrite aujourd’hui le Musée alpin), le Savoy (le Folie Douce hôtel) et surtout le Majestic (le Centre des congrès), dont les rondeurs Art nouveau en façade répondent aux stucs, miroirs et bas-reliefs de l’inté- rieur, typiques de la Belle Époque. TOUT EST VERTICAL
voisine avec l’architecture Art déco de la banque Laydernier et du Kursaal (le café La Potinière). Une clientèle huppée et internationale séjournait dans les trois palaces de Chamonix :
CHAMONIX
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R E N C O N T R E
Tiga a rencontré Philippe Convers, natif de Chamonix. Ce chef privé vient chez vous préparer ses meilleures recettes, pour un dîner, un cocktail, de cuisine. Si vous préférez, vous pouvez sortir avec lui pour cueillir les plantes sauvages comestibles de la région: égopode, chénopode bon henri, berce, mélilot… Une découverte gourmande au grand air. Callchef – Philippe Convers. 0679234479. callchef.fr ou même un cours
Cooperative Fruitiere en Val d’Arly Savoie Mont-Blanc
Pause gourmande à la coopérative fruitière du val d’Arly, dont l’une des cinq boutiques se trouve à Chamonix, rue Whymper. J’accompagne Philippe Convers, un cuisinier qui mitonne à domicile des mets 100 % terroir. Je suis, d’office, son commis de cuisine! Ce soir, il doit régaler quatre Savoyards à l’occasion d’un dîner en plein air. La coopérative, qui commercialise les produits locaux des artisans, ressemble à une caverne d’Ali Baba pour gastronomes : farandole de fromages (reblochons, tomes…), confitures, charcuteries (diots, caillasses de Savoie, jambons fumés…). Nous commandons un bon morceau d’abondance fermier, un fromage à pâte cuite assez proche du beaufort, produit dans le val d’Abondance grâce au lait de vaches du même nom. Au sortir de la boutique, Philippe Convers me propose d’aller « cueillir » la soupe et le dessert. D’accord! Et voilà que je me retrouve à « peigner » les myrtilles sauvages en pleine forêt, à récolter – non sans quelques cloques aux doigts car je n’ai pas encore le coup de main! – des orties pour la soupe… Philippe invente une cuisine santé qui fait du bien aux gens. Parce que, me dit-il, pour « bien cuisiner, il est impératif, avant toute chose, d’aimer les gens. » Ainsi est notre cordon-bleu, généreux et passionné. Comment ne pas ressentir de la fierté d’avoir été son commis d’un jour !
P H I L I P P E C O N V E R S
+ Office de tourisme de Chamonix- Mont-Blanc. 85 place du Triangle-de-l’Amitié, 74400 Chamonix. 0450530024. chamonix.com. des alpinistes en herbe que l’on voit parader dans le bourg, piolet à la main, aimeraient se retrouver, eux aussi, en haut de l’affiche… Deux siècles plus tard, le rêve de Horace-Bénédict de Saussure vit encore.
La falaise des Gaillands surplombe cette ravissante imposture. Défrichée et nettoyée par Roger Frison-Roche en personne, cette falaise est devenue une véritable école d’escalade. Les guides y viennent avec leurs clients pour évaluer leur niveau de grimpe. À Chamonix, tout est vertical… même les hommages. Celui aux guides de haute montagne les plus embléma- tiques est en trompe-l’œil, sur un mur de la rue du Docteur-Paccard. Bien
du Brévent ! Il faut pousser un peu plus loin, jusqu’au « lac à l’Anglais », au hameau des Gaillands. À la fin du xix e siècle, un sujet de Sa Majesté lord Sinclair (un… Écossais !), tomba amou- reux de ce petit étang qui reflète le mont Blanc. Pour apporter une touche romantique au site, il fit creuser une grotte artificielle, ajouta de faux rochers et les ruines factices d’une chapelle gothique. Il planta même des érables, une essence fort peu alpine !
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