À chacun son menu de fête!
Produit d'exception
Les rois de la fève
© AMARANTE / SHUTTERSTOCK
En France, une poignée d’artisans chocolatiers fabriquent leur chocolat de A à Z, de la fève de cacao à la tablette. Une démarche exigeante et jusqu’au-boutiste qui redonne au chocolat ses lettres de noblesse. Retour aux sources. TEXTE SANDRA MOISSON ET EVE MARIE ZIZZA LALU
sillonnent la planète à la recherche des meilleures origines. Richard et Gaëlle Sève, chocolatiers à Limonest près de Lyon, n’hésitent pas à parcourir la Malabar Forest, en Inde, ou les plateaux du nord de la Colombie. L’été dernier, pour visiter une plantation cultivée par les Arhuacos, une ethnie indigène, il leur a fallu demander une autorisation spéciale du gouvernement colombien et du chef de tribu avant de crapahuter pendant six heures pour atteindre la cacaoyère ! Plus encore qu’une façon de se démarquer de la grande distribution, cette quête de la fève rare est le reflet d’une vision hyperexigeante du métier. À l’image des vins qui tirent leur personnalité du terroir et d’une vinification experte, la qualité des crus de cacao et le long processus qui conduit à leur transformation finale donneront un grand chocolat.
Au commencement était la fève…Une évidence qui, depuis les années 80, s’impose comme le credo des meilleurs artisans chocolatiers. Mais au petit jeu des origines, chacun tire la couverture à soi. Qui de Bernachon, Bonnat, Sève, Chapon, Pralus, Cluizel, ou tout récemment Thierry Mulhaupt en Alsace, est remonté le premier aux sources du grand chocolat ? Sans parler des fabricants à grande échelle comme Valrhona, qui lance en 1990 son Manjari 64 %, 1 er grand cru de terroir qui valorise le cacao des planteurs de Madagascar. Qu’importe aux consommateurs la querelle des origines, le résultat est là : le chocolat connaît une révolution comparable à celle qui traverse le monde du vin, du café ou de la bière. Pour sourcer leurs fèves de cacao, les artisans chocolatiers sillonnent les pays producteurs, en Afrique, en Amérique centrale et en
Amérique du Sud, à la recherche des meilleurs crus. Marc Cluizel, petit-fils du fondateur de la Manufacture Michel Cluizel a même créé un nom pour définir ce nouveau métier : « cacaofèvier », qui couvre la transformation de la fève en pâte de cacao, puis en chocolat haut de gamme. « Nous nouons des partenariats étroits avec les planteursde cacao, s’enthousiasme Marc Cluizel, Le goût est dans la fermentation de la fève. Nous faisons cinq essais de fermentation et autant d’essais de torréfaction, ce qui nous offre 25 combinaisons différentes ! Il nous reste à choisir l’association qui fonctionne le mieux. » UNE QUÊTE SPORTIVE Qu’ils produisent quelques centaines de tonnes de chocolat à des milliers de tonnes par an, ces aventuriers de la fève perdue
58 – Régal hors-série n°20 – novembre décembre 2020
Made with FlippingBook PDF to HTML5