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des fourmis 138 dans les jambes

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1-2_ L’édi cation de la jetée Saint-Nicolas, au pied du prieuré, a commencé en 1764. L’ouvrage a été nalisé en 1910 avec la construction du phare sur le musoir (la pointe extrême).

3_ Hervé Retureau revient souvent dans le quartier qui l’a vu grandir. Ci-dessus, place Sainte-Anne, devant la fresque en trompe-l’œil (120m 2 ), il raconte un temps révolu.

Unvillagedédiéà l’Océan Le second monument de La Chaume est la tour d’Arundel. Dominant également le chenal, c’est un vestige du château Saint-Clair, construit au XV e siècle par les princes de Talmont. Sonhistoirene fut pasmoins troublée. Prisen 1622par lechef protestant Soubise, il a abrité unegarnisonsous Louis XIII, fut bombardépar lesAnglo-Hollandaisen 1796, rachetépar l’État en 1835 puis restauré de 1986 à 1994, a n d’abriter lemusée de la Mer. « Sa fonction était de surveiller l’entrée du port. Au- jourd’hui, avec son phare posé à son sommet et ses 33m de hauteur, la tour est unrepère important pour lesmarins » , précise l’historien. En plus d’accueillir les équipes télé lors duVendée Globe, c’est aussi un belvédère sur les toits de La Chaume. Où l’on voit bien, avec les tuiles claires concentrées autour du clocher gris de l’église Saint-Nicolas, qu’il s’agit d’un village! Arrivés dans le sillage desmoines et des princes de Talmont, les habitants vont vite faire de la pêche leur moyen de sub- sistance. D’abord à la baleine, au XV e siècle, puis à lamorue. « Entre lemilieu du XVII e siècle et le début du XVIII e , période où cette pêche fut prospère, La Chaume comptait 15000 habi - tants. On amême recensé 74 bateauxmorutiers en 1664. » De l’autre côté du chenal, une nouvelle ville existe déjà, bâtie sur le sableet forti éepar LouisXI, à la ndu XV e siècle. «Mais là- bas vivaient les bourgeois, alors qu’ici c’étaient les laborieux. » L’antagonismene feraquecroître. LorsdesguerresdeReligion, La Chaume est protestant, Les Sables est catholique. Deux communesdistinctescoexistent jusqu’en 1754, annéeoùelles ne forment plusqu’uneseuleentité. «Mais il existeencoreune mairie annexe! » , sourit Hervé Retureau. Et même une Asso- ciationde la commune libredeLaChaume…Lamoruepéricli- tant, la sardineprend le relais. Cettepériodehante lamémoire d’Hervé Retureau qui l’a vécue. « Il y a plus de trente ans, les  marins déchargeaient encore leur cargaison ici. Elle prenait le chemin des conserveries du quartier et les pêcheurs faisaient les comptes dans les bars. » Il y a eu jusqu’à douze conserve -

ries…L’historiennousmèneplaceSainte-Anne, oùune fresque représente une scène villageoise: « La buvette évoque le café ChezMarie-Ange, où o ciait une serveuse gouailleuse, appe - lée La Crabotte. Elle est toujours en vie. Et les autres person- nages peints sont desmarins qui ont vraiment existé. Ce café était unecellulesocialeoù l’onpouvait croiser lesgarçonnes, qui ramendaient les lets. » Hervé Retureau se rappelle aussi les damesâgéesennoir, assisesdevant leur porte: les veuvesde marins. Lequartier apayéun lourd tribut à l’Océan, commeen témoigneunestèleprèsduprieuréSaint-Nicolas. Elleporte les nomsdesmarinsnoyés, dont lescorpsn’ontpasété retrouvés. Sang chaud, tête dure La rudesse de la vie n’empêchait pas la légèreté. « Chacun avait un surnom. Mon grand-père s’appelait la Rotule. Moi,  gamin, c’était Ouiouite. » Ce papy disparu, il se souvient qu’il allait le voir à la balustrade, depuis les quais du chenal. « Il  pêchait l’anguille dans un canot. De lamain, il me faisait com- prendre combien il en avait et quelle était leur taille. » Chaque usine avait sa propre sirène pour appeler ses ouvriers au travail. « Il y avait encore des charpentiers de marine. Tout  le quartier vivait au rythme de la pêche. » Un événement a marqué l’enfance d’Hervé Retureau: la destruction, en 1978, dupont qui reliait LaChaumeauport. C’était le lienvers la ville et la gare, d’où étaient expédiées les conserves de sardines. « Il y a eu un tollé. Les Chaumois ont le sang chaud et la tête  dure, comme le rocher originel. Ici, on dit que la tête des gens  d’en face n’est faite que de sable » , moque-t-il gentiment.

TUUL ET BRUNO MORANDI / DÉTOURS EN FRANCE (4)

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