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L’AVIS D’EXPERT Marie-Hélène FABIANI Avocate à la cour, membre du Conseil national des barreaux “ Une infraction difficile à prouver “ Sachant que le doute profite toujours à l’accusé, la nouvelle infraction d’outrage sexiste risque d’être complexe à mettre en œuvre, car difficile à prouver. Il ne faudra retenir cette qualification que dans l’hypothèse où l’agression ne pourrait faire l’objet d’aucune qualification pénale plus sévère: une plainte pour harcèlement moral, insultes ou menaces aura plus d’effet qu’une simple contravention pour outrage sexiste. Car, bien sûr, les sanctions diffèrent selon la gravité des actes. Ainsi, l’outrage sexiste ou la violence verbale sont généralement punis par des contraventions de 4 e et 5 e classes, mais le harcèlement sexuel ou sexiste, les violences physiques, les agressions sexuelles (s’il y a eu contact physique, comme un attouchement) ou encore l’exhibitionnisme sont des délits passibles de deux mois à dix ans de prison. Quant au viol, c’est un crime passible de quinze ans de prison minimum.

P RéPaReR un dossieR de Plainte Avant de déposer plainte, préparez votre dossier avec l’aide d’une association. f Détaillez les faits, établissez des preuves, qui peuvent être libres – SMS, mails, enregistrements audio ou vidéo cachés, etc. –, et recueillez des témoignages en respectant un certain formalisme (modèles en ligne sur Service-public.fr). f Faites établir un certificat médical si votre santé se dégrade à cause de l’agression subie. f Dans un cadre professionnel, saisissez l’inspection du travail qui peut diligenter une enquête interne, dresser un procès-verbal,

et faire un signalement au procureur de la République.

P oRteR Plainte f Déposez votre plainte auprès de la gendarmerie ou du commissariat. S’il n’y a pas flagrance ou urgence, envoyez une copie de la plainte au procureur de la République du tribunal de grande instance dont vous dépendez. Car, si vous voulez déposer une plainte avec constitution de partie civile (c’est-à-dire faire en sorte qu’un juge d’instruction soit saisi et enquête sur les faits que vous dénoncez), vous devez avoir la preuve que le procureur l’a bien reçue. De plus, cela permet de signifier à l’auteur de l’infraction que vous voulez taper fort et que vous ne le lâcherez pas. Une façon, aussi, de faire cesser les violences. f Idéalement, faites-vous accompagner pour toutes vos démarches. « D’ailleurs, estime Marie-Hélène Fabiani, avocate à la cour, avec le Conseil national des barreaux, nous souhaiterions que, à l’instar des suspects qui reçoivent l’assistance d’un avocat dès la première heure de garde à vue, la victime de violence ait également l’aide d’un avocat de permanence, lors de son dépôt de plainte au commissariat. En effet, même si les officiers de police judiciaire ont été formés pour recevoir les victimes, ils doivent mener une enquête. Dans ce cadre, ils peuvent poser des questions dérangeantes, voire violentes, à des victimes bouleversées qui ont l’impression que leur parole est remise en doute. Le soutien d’un avocat prendrait alors tout son sens. »

LAFLOR/ISTOCK - BRIAN DU HALGOUET

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