Hors-série : Les villages préférés des français 2021

NORMANDIE

VILLERVILLE

igreville aurait pu ne jamais exister. Tigreville, c’est le nom de cinéma de Villerville, rebaptisé pour les besoins du film d’Henri Verneuil Un singe en hiver (1962) adapté du roman éponyme d’Antoine Blondin (1959). Or ce n’est pas ce film que Jean Gabin devait jouer, mais Au large de l’Eden, une histoire de marins morutiers écrite par Roger Vercel. Gabin ne supportant pas l’odeur du poisson, le rôle s’avé- rait compliqué. Pour respecter son contrat, il proposa donc le roman de T

caché à côté de la mondaine Trouville. Village de pêcheurs plutôt que station balnéaire, avec des maisons hautes et étroites, où la brique côtoie parfois le colombage, des devantures déli- cieusement surannées, une plage à perte de vue… Villerville avait tout pour séduire Claude Pinoteau et l’équipe du film. La notoriété du long-métrage n’a pas changé Villerville, même si son cinquantenaire, dûment célébré par les habitants, a donné naissance à un parcours au fil des rues, signalant par des panneaux les lieux les plus emblé- matiques du tournage. C’est ainsi que la rue du Général-Leclerc a gardé le souvenir de la scène de la corrida, où Belmondo toréait avec des voitures (ce que Blondin lui-même avait fait à Saint-Germain-des-Prés), et la rue du Maréchal-Foch celle devant la gen- darmerie ; à l’angle de la rue Daubigny et de l’escalier qui descend à la plage trône toujours le Cabaret normand, où il est de tradition de venir boire un Picon bière ; le promontoire au-dessus

Blondin. C’est Claude Pinoteau, alors assistant-réalisateur, qui fut chargé de trouver le village où le vieux Albert Quentin, ancien fusilier marin et tenan- cier de l’hôtel Stella, porté sur la bois- son et la nostalgie, passe une folle nuit d’ivresse avec le jeune Gabriel Fou- quet, éprouvé par une rupture senti- mentale. Pinoteau écuma toute la côte picarde et normande avant de porter son choix sur Villerville. LE CABARET NORMAND A ROUVERT SES PORTES Les pieds dans la mer, la tête dans le bocage, le bourg vivait heureux et bien

LA BALEINE-THÉÂTRE En 1893, une baleine s’échoue sur la plage voisine de Cricquebœuf. Simon Max (1847- 1923), ténor parisien spécialisé dans l’opéra-bouffe et propriétaire du casino de Villerville, a une idée de génie. Après avoir vendu la chair de l’animal, il fait aménager l’intérieur du corps pour y installer... un théâtre ! La jauge du lieu est modeste, 80 places, mais la foule s’y presse pour assister au spectacle, d’abord à Villerville, puis à Trouville, et enfin, succès oblige, au Casino de Paris où la baleine s’échoue pour la dernière fois. Un incendie met malheureusement fin à l’aventure le 25 février 1895.

La place du Lavoir (fin du xix e siècle) a été construite à l’époque de la transformation et de la modernisation du petit village de pêcheurs, stimulée par l’arrivée du chemin de fer et du tourisme.

Stéphane Maurice / Détours en France X 4

Hors-série / Détours en France / www.detoursenfrance.fr

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