GUIDE VERT MICHELIN TOURAINE POITOU

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singulière histoire. C’est aussi celle de son illustre propriétaire, Dom Pacello daMercogliano (1455-1534), maître jardinier pendant presque 40 ans auprès de trois rois de France successifs. Ce fut avec le jeune roi Charles VIII (voir p. 18) qu’elle commença, lors de la première campagne d’Italie que celui-ci mena en 1494 pour faire valoir ses droits familiaux sur le Royaume de Naples. Ébahi par tant de beautés, dont les jardins de la Villa napolitaine Poggio Reale, le roi demanda à une vingtaine d’artistes italiens de revenir avec lui en France. Parmi eux le moine napolitain, l’inventeur de l’ Arte del verde , le Léonard des jardins : Dom Pacello. Charles lui assigna la mission de créer, à deux pas de son château d’Amboise, ses jar- dins napolitains qui l’avaient enchanté, avec un préalable à la mesure de ce défi : repérer un microclimat propice à ces cultures méridionales. Le site de ChâteauGaillard fut retenu et son propriétaire évincé pour indélicatesse fiscale. Idéalement situé – face au sud et protégé des vents du Nord par le puissant éperon des Châteliers qui le surplombe, et supporte aussi le château royal –, le domaine fut progressivement aménagé, consacrant avant l’heure l’un des tous premiers jardins d’acclimatation de France. Dans ce laboratoire à ciel ouvert, savamment irrigué par une ancienne source d’eau gauloise (toujours présente) et les eaux de l’Amasse, Pacello allait importer et développer les premières orangeries en France, introduire les premiers pêchers et créer la fameuse reine-claude, en l’honneur de la reine Claude de France, épouse de François I er , qui trouvait la prune française bien trop amère. En 1515, François I er offrit à DomPacello le domaine; ce présent royal inhabituel récompensait ainsi les travaux inestimables de ce moine napolitain, trop méconnu aujourd’hui. Le château 29 allée du Pont-Moulin (accès piéton uniquement) - t 02 47 30 33 29 - www. chateau-gaillard-amboise.fr - d’avr. à déb. nov. : 13h-19h - 12 € (7-18 ans 8 €). Après des années de travaux de restauration titanesques qui ont nécessité l’expertise d’une cinquantaine de métiers d’art et la collaboration de plus de 300 artisans, le château est ouvert au public. La façade a , d’inspiration italienne avec ses hautes fenêtres àmeneaux (double traverse) et ses décors sculptés (corniche à quadruple frises), semble avoir été taillée en haut-relief dans le fond de tuf auquel elle s’adosse. À l’intérieur, chaque détail a été pensé, travaillé avec un constant souci d’exactitude his- torique (pigments naturels, chaux d’ocre jaune, etc.). Ainsi, pas moins de 8000 vitraux ont été exécutés en verre de St-Just, soufflés à la bouche selon les techniques de l’époque, en se basant sur des archives relatives à l’histoire du château. Quant au mobilier, il est en grande partie d’époque sauf pour les pièces rarissimes qui ont été refaites à l’identique par les meilleurs artisans. a Les jardins Le domaine compte aujourd’hui 170 orangers et citronniers répartis dans les serres, l’orangerie et sur les terrasses. Main de Bouddha, citronniers Combava, pomme d’Adam, cedrat, orangers Moro, Caviar rose donnent une idée de cet éclectisme. Côté jardins, les Carrés Pacelliens , plantés de trèfles, de roses et de simples (avec 2 aromatiques et unmédicinal) s’appuient sur les techniques de la permaculture (cohabitation vertueuse des plantes), fidèles aux principes avant-gardistes de Pacello qui n’entendait pas dominer, mais apprivoiser la nature. Terre cuite concassée, marbre blanc, bris d’ardoise de Trélazé, tuffeau pilé,… marquettent cette composition géométrique que cernent plus de 3 000 petits houx faisant bordure, comme au Moyen Âge avant l’utilisation du buis. Enfin, les Grands parterres royaux  : ils annonceraient, dans cette perspective axée sur l’entrée du château à l’aune d’une géométrie parfaite, l’ordonnancement des futurs jardins à la Française.

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