Echappées Belles - La Côte Atlantique
LA ROCHELLE ET L’Î LE DE RÉ VUES PAR… J ÉRÔME P I TOR I N
Ré a toujours été « mon petit refuge », mon port d’attache, auquel j’accédais enfant en prenant le bac le temps d’une courte traversée (15 minutes) sur les eaux du pertuis d’Antioche. Le temps me paraissait interminable avant que la voiture de mes parents puisse trouver sa place sur le ponton du ferry. La traversée, au goût d’aventure, contribuait au plaisir d’accéder enfin à cette île sauvage. La « petite Ré », c’est le paradis de la « petite Reine ». Ce sont près de 140 km de pistes cyclables qui sillonnent tantôt les dunes (Saint-Clément), les pinèdes (Bois de la Plage), l’océan, les vignes (Sainte-Marie), les marais salants, les zones ostréicoles, la réserve ornithologique, l’abbaye des Châteliers (La Flotte) et, de délicieux villages qui sont l’âme de l’île. La Couarde, Loix, Saint- Clément-des-Baleines, Ars, Saint- Martin… leurs fameuses venelles pavées sont bordées de roses trémières caressant les façades des habitations blanchies à la chaux… Ré, c’est au bonheur des plages, qui habillent tout son pourtour. Ne le répétez pas, mes préférées sont celles de Gros Jonc, Petit Sergent, La Conche. C’est le plaisir de sillonner les quais des petits ports, de se hisser au sommet du phare des Baleines, de découvrir les fortifications Vauban de Saint- Martin, de flâner dans les marchés animés tel celui face au Fiers d’Ars ou encore de La Flotte. Je séjourne ici au moins une semaine par an, en camping et à vélo, pour retrouver ce sentiment de liberté, cette connexion avec la nature.
On les peut aimer avec affection et passion, mais différemment. La Rochelle et l’île de Ré, deux lieux, deux ambiances, deux identités distinctes, mais le couple reste pour moi intimement lié – voire relié depuis la construction du pont en 1988 – l’un à l’autre comme peuvent l’être deux parents. La Rochelle rime avec rebelle. Ce bastion du protestantisme, levé comme un seul homme contre Richelieu lors du siège de 1627-28, a le regard tourné vers le large, vers cet océan Atlantique qui fera sa richesse et sa puissance marchande. Avec le commerce de « l’or blanc » en direction des grands cités d’Europe, la Hanse, puis avec le commerce triangulaire, dont on découvrira l’histoire au musée du Nouveau Monde. Toute la ville est une invitation à visiter un patrimoine d’exception. Le Vieux-Port, flanqué de trois tours et protégé de remparts, symbolise le caractère insoumis de la cité. Au fil de ses rues médiévales, les façades d’hôtels particuliers, les arcades en pierres blanches qui quadrillent le cœur de ville entre les rues Mercier et du Palais, offrent une luminosité à nulle autre pareille. Autre joyau architectural, l’hôtel de ville ( xii e siècle), le plus ancien de France encore en fonction ; victime d’un incendie en 2013, sa restauration offre à nouveau au regard son magnifique portail gothique flamboyant, sa grande galerie Renaissance ( xvi e - xvii e siècles), l’escalier d’honneur ou sa tour beffroi.
Terre de marins, de régatiers, de navigateurs au long cours, La Rochelle, fille de l’océan, vibre au diapason de la vie maritime. Ainsi, elle accueille, chaque mois de septembre, un renommé salon nautique international se tenant dans le port des Minimes (plus grand port de plaisance d’Europe), le Grand Pavois. Grâce à son aquarium, le plus visité de France, vous voyagerez sur toutes les mers du globe. Et si vous ne deviez avoir que deux repères, ils seront le phare de Bout du Monde (réplique de celui qui se trouve en Patagonie) face à la pointe des Minimes et l’enseigne de l’établissement de Christopher Coutanceau. Ce « cuisinier- pêcheur » rochelais, qui milite pour une pêche responsable, a décroché en 2020 sa troisième étoile. Face aux tours Saint-Nicolas et de la Chaîne se trouve l’île de Ré. Ré la blanche, surnommée ainsi pour ses lumières intenses si particulières, qui se reflètent sur les façades ou sur son sable blond clair. Il m’est difficile de porter un regard objectif tant mon attachement à ce bout de terre en forme d’hippocampe – de seulement 89 km 2 – est affectif. J’y ai fait mes premiers pas sur la plage de la Conche, alors qu’elle n’était qu’une île de campeurs. Elle l’est restée, en partie, même si ce petit trésor a vu se construire, ces cinquante dernières années, une myriade de villas pour accueillir les vacanciers tombés sous son charme. L’île, qui recense à peine 20 000 Rétais y vivant à l’année, peut voir sa population multipliée par dix en période estivale…
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