Crédit Agricole Magazine n°180

Publication animée

JUILLET-AOÛT 2023 N°180

AGRICOLE ET AGROALIMENTAIRE NUMÉRO SPÉCIAL PROJET SOCIÉTAL

RÉUSSIR LES TRANSITIONS

ENGAGÉS ET RESPONSABLES

Sommaire

LE PROJET SOCIÉTAL DU CRÉDIT AGRICOLE Trois priorités déclinées en #10 engagements collectifs :

AGIR POUR LE CLIMAT ET LA TRANSITION VERS UNE ÉCONOMIE BAS CARBONE

RENFORCER LA COHÉSION ET L’INCLUSION SOCIALE

#4 Proposer une gamme d’offres qui n’exclut aucun client pour favoriser l’inclusion sociale et numérique. #5 Contribuer à redynamiser les territoires les plus fragilisés et réduire les inégalités sociales. #6 Favoriser l’insertion des jeunes par l’emploi et la formation. #7 Amplifier la mixité et la diversité dans toutes les entités du Crédit Agricole ainsi qu’au sein de sa gouvernance.

#1 Atteindre la neutralité carbone d’ici 2050. #2 Conseiller et accompagner 100 % de nos clients dans leur transition énergétique. #3 Intégrer des critères de performance extra-financière dans 100 % de l’analyse de nos financements aux entreprises et aux agriculteurs.

Dans ce numéro : RÉUSSIRLESTRANSITIONS AGRICOLEETAGROALIMENTAIRE #8 Dans un contexte de changement climatique impactant la biodiversité, accompagner l’évolution des techniques vers un système agroalimentaire compétitif et durable par le lancement d’un fonds dédié. P. 4

#9 Permettre à l’agriculture française de contribuer pleinement à la lutte contre le changement climatique et, pour cela, structurer la plateforme française d’échange de crédits carbone de la ferme France. P. 8

#10 Contribuer à renforcer la souveraineté alimentaire en promouvant l’installation des nouvelles générations d’agriculteurs. P. 13

Revue bimestrielle éditée par la Fédération nationale du Crédit Agricole, 48, rue La Boétie, 75008 Paris, Tél. : 01 49 53 43 23. ISSN 1243-9193. Directeur de la publication Grégory Erphelin Directrice de la rédaction Bénédicte Gouvert Rédactrice en chef Véronique de Villepin, avec l’aide de David Boutillier

Photos © Cedric Helsly - iStock - © Franck Vogel Abonnements 01 49 53 44 30 Conception graphique et réalisation Imprimeur : Fabrègue Groupe Sprint Rue de la Fontaine Tanche - 87500 Saint-Yrieix-la-Perche. Achevé d’imprimer en août 2023. Dépôt légal : août 2023. Tiré à 12 000 exemplaires JUILLET-AOÛT 2023 N°180

Édito

Pour nourrir l’humanité L’agriculture et l’agroalimentaire se situent aujourd’hui à l’interface de nombreux enjeux climatiques, environnementaux, sociaux, économiques et géopolitiques. Les systèmes alimentaires ont notamment été soumis, en 2022, à d’importants bouleversements : le conflit en Ukraine a fait grimper le prix des denrées de base et de l’énergie, les crises sanitaires ont touché les filières animales, et les phénomènes climatiques extrêmes ont lourdement impacté certaines productions agricoles. Être le partenaire historique des agriculteurs – nous en accompagnons huit sur dix – et de la filière agroalimentaire, nous engage et nous confère de grandes responsabilités : contribuer activement à les soutenir dans les défis qui s’imposent. Dans le cadre de son projet sociétal, le groupe a réaffirmé son engagement à réussir les transitions agricole et agroalimentaire. Il se décline en trois marqueurs : accompagner l’évolution des techniques vers un système agroalimentaire compétitif et durable, permettre à l’agriculture française de contribuer pleinement à la lutte contre le changement climatique et concourir à renforcer la souveraineté alimentaire. Afin d’y répondre, les Caisses régionales et les entités de Crédit Agricole SA expérimentent et développent des pratiques, coordonnent leurs efforts et leurs savoir-faire, souvent en lien avec des partenaires. La première finalité de ces activités est de nourrir l’humanité : c’est une ambition noble et utile. Voici quelques illustrations de nos engagements.

Dominique Lefebvre

Président de la Fédération nationale du Crédit Agricole et de Crédit Agricole SA

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N ° 8 ENGAGEMENT DU PROJET SOCIÉTAL DE FINANCEUR

#8. Dans un contexte de changement climatique impactant la biodiversité, accompagner l’évolution des techniques vers un système agroalimentaire compétitif et durable par le lancement d’un fonds dédié. P our accompagner l’évolution des techniques vers un système agri cole et agroalimentaire compétitif et durable, le Crédit Agricole a annoncé la création d’une enve loppe d’investissement d’unmilliard d’euros. Pour atteindre cette cible, il a engagé des travaux dès 2022, afin de construire une gamme d’instruments de financement dédiée qui couvre un large spectre enmobilisant les exper tises du groupe et ses partenaires. Ce dispositif unique a été défini selon un cadre d’intervention bâti autour de sa vision des transi tions agricoles et agroalimentaires, qui repose sur cinq piliers. L’objectif est de pouvoir accompagner aussi bien en tant que financeur qu’investisseur tous les acteurs de la chaîne de valeur, du champ à l’assiette, sans oublier les entreprises porteuses d’innovation. Le premier outil annoncé en 2022 est désormais lancé. Il s’agit d’AmbitionAgri-Agro Investissement porté par Idia Capital Investissement. Dans les prochainsmois, devraient suivre un fonds de dette privée à destination des entreprises agroalimen taires, un fonds de capital innovation sans oublier une nouvelle gamme d’outils spécifiques dédiée à l’accompagnement des agriculteurs. Cemarqueur est porté par deux sponsors: Nicolas Mauré, président de la Caisse Toulouse 31, et Emmanuel Vey, directeur général de la Caisse Champagne-Bourgogne.

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À INVESTISSEUR !

Notre vision des transitions

Le Crédit Agricole investisseurengagé E n février dernier, le Crédit Agricole lançait Ambition Agri-Agro Investissement, un fonds d’investissement bancaire dédié aux transitions agricoles et agroalimentaires. Doté de 270 M€ par les entités du groupe, ce fonds est géré par Idia Capital Investissement pour répondre aux besoins de finan cement en capital de l’ensemble des entreprises de la chaîne de valeur agroalimentaire, en France et en Italie, qui s’inscrivent dans des stratégies de transitions ambitieuses. Il accompagne ledéveloppement desPME, ETI et coopératives françaises et italiennes engagées dans les transitions agricoles, afin de les soutenir activement dans leur démarche de transformation vers davantage de durabilité. Dédiés à des opérations de capital développement et transmission, les tickets d’investissement seront compris entre cinq et 45 M€ pour une durée d’ac compagnement de cinq à dix ans. En tant qu’inves tisseur minoritaire, Idia Capital Investissement participera activement à la gouvernance des entre prises. «Nous voulons être créateurs de valeur sur le plan sociétal et d’impact sur le plan environnemental», commente Anne-Caroline Pace-Tuffery, directrice générale d’Idia Capital Investissement. Pour qualifier le caractère durable de l’investissement, chaque entreprise cible devra répondre en particulier à deux critères obligatoires en lien avec deux piliers de la stratégie d’investissement : contribuer à la transition vers une alimentation bas carbone et préserver les ressources naturelles. De plus, l’entreprise s’engagera à respecter au moins trois critères de progrès, les plus pertinents pour elle et selon une période définie, sur les piliers des transitions agricoles et agroalimentaires priorisés par le Crédit Agricole. ✔

• Faire évoluer nos modes de consommation: maîtriser les risques dans la chaîne d’approvisionnement, protéger la santé des consommateurs et améliorer la transparence. • Produire via une économie circulaire: développer les circuits courts, réduire le gaspillage alimentaire et l’impact des emballages. Un comité d’orientation transition est chargé de vérifier l’adéquation des dossiers présentés avec la thèse d’investissement, dont le regard complète celui des financiers. Il est composé des responsables du Comité de l’agriculture et de l’agroalimentaire, des sponsors de ce marqueur, de représentants de la FNCA et de Casa.

• Promouvoir l’attractivité du métier d’agriculteur : améliorer la qualité de vie des agriculteurs et accompagner le renouvellement des générations d’agriculteurs. • Contribuer à la transition vers une alimentation bas carbone: atténuer les impacts climatiques et s’adapter au changement climatique ; accompagner les projets de production d’énergie renouvelable. • Préserver les ressources naturelles : préserver la biodiversité, les sols, les ressources en eau et protéger le bien-être animal.

MONTANT DU FONDS Ambitions Agri-Agro Investissement géré par Idia Capital Investissement 270 M€

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Synergies groupe : Tea Time! Via son nouveau fonds Ambition Agri Agro Investissement, Idia Capital Investissement et Crédit AgricoleRégions Investissement (1) accompagnent Dammann Frères dans la poursuite de son développement et en intensifiant sa présence en Europe et à l’international. F ondée en 1925, Dammann Frères est l’une des plus anciennes maisons de thé françaises. Spécialisée dans l’importation, l’élaboration et

de CA Italia, la société commercialise ses produits via son site internet, neuf magasins en propre, 19 fran chises et 228 corners en France et à l’étranger. Située à Dreux et client historique de la Caisse régionale Val deFrance, DammannFrèresproduit plusde1000 tonnes de thé chaque année, soit plus de 140 millions de sachets par an. L’entreprise possède l’une des gammes lesplus largesdumarché, cequi lui apermisdegénérer un chiffre d’affaires de 40millions d’euros en 2022.

la vente de thés, d’infusions et d’accessoires, l’entre prise distribue historiquement ses produits dans les cafés, les hôtels, les restaurants et les épiceries de luxe en France. Depuis 2007, et sous l’impulsion de son nouvel actionnairemajoritaire le groupe Illy, client

Très engagé en matière de RSE, Dammann Frères a enclenché une démarche de certification B-Corp, label attribué aux entreprises respectant des normes environnementales et sociales élevées. Par ailleurs, la société se donne l’objectif de devenir entreprise àmission, en se dotant d’une raison d’être: «Cultiver le lien entre l’humain et les plantes, pour une qualité de vie supérieure» . Dans ce cadre, la société se fixe des objectifs sociaux et environnementaux ambitieux, afin de produire un impact positif et signi ficatif dans l’exercice de ses activités. ET D’UN! Premier investissement réalisé par le fonds AmbitionAgri Agro Investissement lancé début 2023 par Idia Capital Investissement, cette opération a pour objectif d’accompagnerDammannFrères dans la poursuite de son développement, en renforçant sa position d’acteurmajeur duthépremiumenFranceet en intensifiant saprésenceenEuropeet à l’international. Cela se traduira également par le démé nagement du siège social et du site de production dans des locaux permettant d’optimiser la productivité tout enpréser vant les aspects environnementaux. En accord avec la thèse d’investissement dufondsAmbitionAgriAgroInvestissement

(1) Filiale commune de onze Caisses régionales sur le quart est de la France, Crédit Agricole Régions Investissement (Carvest) accom pagne les entreprises régionales dans la mise en œuvre d’opérations de capital développement et de capital transmission. Investisseur minoritaire, Carvest gère aujourd’hui 300 M€ répartis dans près de 150 participations régionales.

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N ° 8 ENGAGEMENT DU PROJET SOCIÉTAL

INNOVATION

(lire page 5) ainsi qu’avec les démarches B-Corp et entreprise àmission lancées, Dammann Frères s’est engagéàrespecterdeuxcritèresobligatoires: contribuer à la transition vers une alimentation bas carbone et préserver les ressources naturelles, en lançant une missiondediagnostic de ses impacts sur labiodiversité, puis en mettant en œuvre un plan d’actions pour répondre aux enjeux ainsi identifiés. Cette première opération franco-italienne illustre l’engagement du Crédit Agricole à accompagner les industries agroalimentaires vers un système compétitif, plus durable et éthique. ✔ Bientôt deux ! Le groupe Crédit Agricole, aux côtés de KKR et de Bpifrance, financera l’achat de United Malt, quatrième producteur mondial de malt, par Malteries Soufflet, deuxième principal opérateur de l'industrie mondiale du malt et filiale d'InVivo Group. Malteries Soufflet souhaite ainsi créer une plateforme mondiale de premier plan dans le secteur du malt et accélérer sa stratégie de croissance et de création de valeur. Cette opération, annoncée le 3 juillet, dont la finalisation de l’accord devrait prendre quelques mois, serait la seconde du fonds Ambition Agri Agro Investissement. À ce titre, elle intègre pleinement la thèse d’investissement et répondra entre autres aux deux critères obligatoires, à savoir la prise en compte de l’empreinte carbone et son amélioration, ainsi que la préoccupation accordée par l’entreprise à l’eau, sa ressource la plus essentielle.

Contre le gaspillage, l’IA Smartway, une start-up nantaise accompagnée par le fonds CA Innovations & Territoires de Supernova Invest, par Unexo (1) et cliente de la Caisse Atlantique Vendée, déploie une solution d’intelligence artificielle auprès d’Auchan pour lutter contre le gaspillage alimentaire. R epérer dans les rayons les produits dont la date limite de consommation approche, choi sir la bonne option pour les valoriser entre la vente remisée ou le don, appliquer le bon taux de réduction, imprimer les étiquettes… la plateforme technologique de Smartway permet aux équipes des magasins d’accroître les volumes valorisés, soit à la venteen tant queproduitsàconsommer rapidement, soit sous forme de dons, tout en réduisant par quatre le temps d’intervention des collaborateurs. Avec la volonté de tendre vers le 0 % de produits gaspillés d’ici à 2032, Auchan a généralisé les rayons antigaspi et déploie les solutions intelligentes déve loppées par Smartway dans l’ensemble des pays où l’enseigne opère. Surtout initiée en Roumanie et en France, cette gestion digitalisée, fondée sur l’intelligence artificielle, de la casse alimentaire permet déjà de sauver dans ces pays 70 millions de produits par an, soit 33500 tonnes et d’éviter l’émission de 82700 tonnes de CO 2 . Ce dispositif innovant sera étendu à huit pays supplémentaires. Depuis plusieurs années, le Crédit Agricole est aux côtés de Smartway (Zéro Gâchis). Il avait participé à la première levée de fonds de la jeune entreprise, grâce à Supernova Invest, Idia Capital Investissement, Unexo et la Caisse Atlantique Vendée, dont il est client. ✔ (1) Société de gestion, filiale des Caisses régionales du Grand Ouest, accompagne les entreprises dans leur projet d’accélération commerciale, de développement et de transmission.

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N ° 9 ENGAGEMENT DU PROJET SOCIÉTAL

L’AGRICULTURE, SOURCE

#9. Permettre à l’agriculture française de contribuer pleinement à la lutte contre le changement climatique et, pour cela, structurer la plateforme française d’échange de crédits carbone de la ferme France.

+ 4 degrés Le Conseil national de la transition écologique (CNTE), instance consultative en matière de politiques

L es gaz à effet de serre (GES) sont responsables du réchauffement climatique et ses impacts écono miques sont déjà importants. Dans ses derniers travaux, le prix Nobel d’économie William Nordhaus estimait qu’une hausse des températures de 6 °C mènerait à une perte de PIB de 8,5 %, en 2100, dans le monde. À cette même échéance, suivant le Giec, 8%des terres agricoles actuelles seraient climatiquement inadaptées, 30 %selon un scéna rio pessimiste (1) . La réduction des émissions et la décarbonation de l’économie ne sont donc plus une option si nous voulons limiter le réchauffement à 2 °C, comme cela est imaginé dans les différents scénariosqui se fondent sur l’atteintede laneutralité carbone en 2050, dans laquelle s’est engagée l’Union européenne. L’agriculture est concernée: en 2021, elle déga geait 19 %des émissions de GES en France (2) . La Stratégie nationale bas carbone (SNBC), établie

environnementales, retient l’hypothèse d’un réchauffement climatique mondial

par les pouvoirs publics, table sur une baisse de 46 % des émissions liées aux activités agricoles en 2050 par rapport à celles mesurées en 2015. La forêt et l’agriculture occupent une position spécifique en étant elles-mêmes sources de solu tion: des puits de carbone. ClaudeVivenot, président duComitéde l’agriculture et de l’agroalimentaire et de la Caisse de Lorraine, et Pascal Delheure, rapporteur du Comité de l’agriculture et de l’agroalimentaire et directeur général du CANormandie, sponsors de cet enga gement du projet sociétal, relaient les convictions du Crédit Agricole: «C'est ensemble, avec nos partenaires, les agriculteurs et toutes les autres parties prenantes, que nous réussirons à relever ce défi de la neutralité carbone.» ✔ (1) L’Opinion, L’agriculture française confrontée au défi du changement climatique, 6 juin 2023 (2) https://www.reussir.fr/planification-ecologique-quelle-baisse-de missions-de-co2-demandee-lagriculture-dici-2030

d'environ 3 °C d'ici à la fin du siècle et une estimation de 4 °C pour la France métropolitaine. Cette hausse aurait des impacts significatifs : une multiplication des sécheresses, une réduction de l'enneigement, des restrictions d'eau, une hausse du coût des inondations, un risque d'extinction des espèces endémiques et une baisse du produit intérieur brut de la France comprise entre 6,5 % et 13,1 %. Source : ministère de la Transition écologique et de la cohésiondes territoires/ EcoCasa.

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«Une suite logique» Ollivier Pian, éleveur dans les Côtes d’Armor Installé depuis 1999 à Yvignac-la-Tour, Ollivier Pian a entamé sa conversion en agriculture biologique en mai 2019. Avec 80 hectares et 70 vaches laitières, il livre, depuis novembre 2020, du lait bio à Lactalis. Il s’est ensuite engagé dans la réduction des gaz à effet de serre, «une suite logique» , selon lui. Dans le cadre de la chambre régionale d’agriculture, il a réalisé un bilan carbone de son exploitation, puis a poursuivi la démarche en s’engageant avec France Carbon Agri. Il a engagé trois types d’actions sur son exploitation pour réduire les gaz à effet de serre. Avec l’arrêt des achats d’engrais minéraux et de concentrés pour les vaches laitières, il nourrit ses animaux de manière autonome grâce à des légumineuses produites dans ses prairies et complète les rations en céréales de protéagineux. Il optimise également le renouvellement du troupeau en diminuant l’âge de vêlage des génisses. Pour augmenter la capacité de stockage du carbone par le sol, l’éleveur a accru la surface des prairies, principalement temporaires (en place pour cinq ans), et a transformé une partie de ses prairies temporaires en prairies permanentes afin de maximiser la séquestration. Enfin, il a planté des haies bocagères qui apportent également de l’ombre au troupeau en cas de forte chaleur et en prévision d’une hausse des températures, et regarni des anciennes haies.

DE SOLUTIONS Partenaires de la transitionbas carbone F in février, au Salon international de l’agriculture, le Crédit Agricole a annoncéuneprisedeparticipationau

à l’engagement que nous avons pris dans le cadre de notre projet sociétal», a complété Claude Vivenot, président du Comité de l’agriculture et de l’agroalimentaire et de la Caisse de Lorraine. Le Crédit Agricole sait que pour accompagner les exploita tions vers la décarbonation et la séquestration du carbone, il est indispen sable de travailler collectivement. Depuis le 1 er mai, ce rapprochement s’illustre également par l’accueil des équipes de FCA au sein du Village by CA Paris. ✔

capital deFranceCarbonAgri (FCA) avec la volonté d’intégrer le collège desmembres fondateursdumandataireleaderdesprojets bascarbone. Lorsde lasignatureduparte nariat,SamuelVandaele,présidentdeFrance Carbon Agri, a exprimé la «fierté de voir le Crédit Agricole rejoindre le capital de France CarbonAgri, qui passe ainsi de douze à treize actionnaires. C’est un signal fort adressé aux agriculteurs qu’un partenaire économique de premier ordre rejoigne cette coalition unique. LeCréditAgricoleapporteradescompétences financièressupplémentairesàFranceCarbon Agri pour continuer à être leader demain du marchéducarbone». «Il s’agit pour nous d’une première étape puisque nous souhaitons poursuivre et renforcer ce partenariat avec France Carbon Agri en travaillant notamment à la structu ration dumarché du carbone, conformément

À gauche, Samuel Vandaele, à droite, Claude Vivenot.

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Le bilan carbone: un label en quête d’harmonisation L e bilan carbone d’une exploitation est l’évaluation de la quantité de gaz à effet de serre (GES) en équivalent CO 2 émise en un an par son activité. Les GES sont de trois types: CO 2 , méthane (bovins, effluents) et protoxyde d’azote (engrais, effluents, résidus des cultures). Un bilan carbone fournit notamment l’empreinte carbone brute de l’exploitation à laquelle on enlève le stockage de carbone calculé, afin d’obtenir son empreinte nette. De nombreusesméthodes sont proposées pour lamesurer. Certaines sont certifiées Label bas carbone, d’autres sont en coursdecertification.LaméthodeCarbonAgri, labelliséedepuis 2019, est par exempleutiliséedans l’outil dediagnosticcarbone CAP’2ER, à l’originedédiéaux ruminantset développépar l’Ins titut de l’élevage. Cet outil commence à intégrer lesméthodes certifiéesd’autres filières (grandescultures) et s’étendprogres sivement à d’autres pays européens. ✔

La SNBC pour l'atteinte de la neutralité en 2050

2050, la SNBC ne prévoit pas la suppression totale des GES de l’agriculture, car ces gaz ont la particularité de ne pas être issus de la consommation d’énergie. La SNBC envisage un développement de l’agroécologie, de l’agriculture de précision ou une réduction des consommations d’énergie pour diminuer les émissions du secteur une prochaine mouture de la stratégie nationale bas carbone (SNBC 3) sont en cours. Source : Citepa, inventaire format Secten 2020, ministère de la Transition écologique. de l’agriculture. Des travaux pour

Instaurée par la loi du 17 août 2015 relative à la transition énergétique pour la croissance verte, la stratégie nationale bas carbone (SNBC) est la feuille de route de la France pour conduire la politique d’atténuation du changement climatique. La SNBC 2, inscrite dans la loi du 8 novembre 2019 relative à l’énergie et au climat, fixe l’objectif de l’atteinte de la neutralité carbone en 2050. La SNBC vise une division par deux des émissions du secteur agricole entre 1990 et 2050 (- 46 % entre 2015 et 2050). Alors que les autres secteurs économiques ont pour objectif de décarboner totalement leur production à l’horizon

LE SECTEUR AGRICOLE ET FORESTIER EST À LA FOIS ÉMETTEUR ET CAPTEUR DES GAZ À EFFET DE SERRE RÉPARTITIONSECTORIELLE DES ÉMISSIONS DE GAZ À EFFET DE SERRE ENFRANCE EN2019

Enmillions de tonnes de CO 2 eq

TRANSPORTS

AGRICULTURE

RÉSIDENTIEL/ TERTIAIRE 18%

INDUSTRIE MANUFACTURIÈRE 18%

INDUSTRIE DE L’ÉNERGIE 10%

DÉCHETS

31%

19%

3%

ÉMISSION ET ABSORPTION DE CO 2 DU «SECTEUR DES TERRES»

PRINCIPALES ÉMISSIONS DE GAZ À EFFET DE SERRE EN AGRICULTURE

Le secteur agricole et forestier présente la particularité d’être à la fois émetteur mais aussi capteur de gaz à effet de serre grâce à la photosynthèse. Les stockages de carbone sont appelés des puits de carbone. Le carbone est stocké dans la biomasse et dans les sols par l’accumulation de matière organique.

42% N 2 Oprotoxyde d’azote

45% CH 4 méthane

13% CO 2 dioxyde de carbone

Produits dubois

Fermentation énergétique (digestion des ruminants), stockage des effluents

Engrais azotés, effluents d’élevage, résidus de culture

Consommationd’énergie de la ferme: enginsagricoles, serres chauffées, bâtiments d’élevage, tanksà lait, etc.

Forêts

Artificialisation (changement d’usage des forêts ou des prairies)

Terres cultivées (retournement des prairies + pratiques culturales)

Prairies

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Source: Citepa, rapport Secten 2020

N ° 9 ENGAGEMENT DU PROJET SOCIÉTAL

L’agriculture au cœur du défi

Début février, la Journée de l’agriculture et de l’agroalimentaire, conjointement organisée par la FNCA et Crédit Agricole SA, avait pour thème la question du carbone et le défi qu’il constitue pour la filière. Retours sur quelques interventions et initiatives. « N otre maison brûle et nous regardons ailleurs ». Dominique Lefebvre a intro duit la Journée de l’agriculture et de l’agroalimentaire du Crédit Agricole par cette phrase prononcée il y a plus de vingt ans par Jacques Chirac au Sommet de la Terre à l’ONU. Après une année 2022 marquée par des incidents climatiques inquiétants, le président de la FNCA et de Crédit Agricole SA a appelé au «combat pour relever la question du climat» . Pour aider les agriculteurs, le Crédit Agricole doit occuper tous les terrains – financiers et assurantiels. Lemonde de l’agriculture, souvent pointé du doigt, doit «nouer un dialogue avec l’ensemble des parties prenantes pour faire avancer les choses» . Par sa connaissance, le Crédit Agricole a le pouvoir de «relier les besoins et les ressources, un défi passionnant» , souligne le président. LA CARTE DE FRANCE DU CARBONE Jean-Marc Jancovici, fondateur du think tank The Shift Project, enfonce le clou. Si aujourd’hui, l’agriculture

représente près de 20 %des émissions mondiales de gaz à effet de serre (GES) selon le Giec, elle est aussi source de solutions. Avec près des deux-tiers du territoire français consacrés à la production agricole, l’agriculture et l’agroalimentaire sont des filières pivots de la transition écologique, ce qui nécessite demobiliser tous les acteurs de la chaîne pour trans former les modèles de production par de nouvelles pratiques. «Une carte de la France en tonne de carbone par hectare a été dressée», explique Jean-Baptiste Dollé, le chef du service environnement de l’Institut de l’élevage. Les sols et les prairies sont autant de puits de carbone que les forêts. Des méthodes sont d’ores et déjà proposées aux agriculteurs pour réduire leur production de GES et s’inscrire dans le label bas carbone. L’expérience française, en avance au niveau européen, est à valoriser dans le cadre législatif européen en construction. Un autre enjeu… En Mayenne, pour compenser les émissions de carbone de l’entreprise régionale Mbpack, spécialiste des emballages alimentaires, Christophe Bouvet, éleveur de bovins, a signé en 2020 une convention de partenariat avec l’association Solénat. L’éleveur a ainsi bénéficié d’une compensation financière en contrepartie d’un engagement à entretenir ses treize kilomètres de haies. Dans le Grand-Est, le président de la chambre d’agriculture régionale, Maximin

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••• Charpentier, a, quant à lui, exposé le développement d’un carburant issu de la biomasse et sa distri bution locale. DES RÉPONSES MULTIPLES GRÂCE AUX ÉCOSYSTÈMES LOCAUX

Il faut s’enrichir des diverses initiatives, en nous appuyant sur nos expertises et nos écosystèmes locaux. Grégory Erphelin

Les acteurs et les solutions sont bel et bienmultiples. « Il faut s’enrichir des diverses initiatives, en nous appuyant sur nos expertises et nos écosystèmes locaux» , affirme Grégory Erphelin, directeur général de la FNCA. Ainsi, la Caisse de Loire Haute-Loire a réalisé une enquête auprès de mille agriculteurs pour recueillir leur perception des enjeux liés à la transition agricole : 80 % d'entre eux pensent qu’ils doivent répondre rapidement à ces défis. Devant cette expression des attentes des agriculteurs, la directrice générale, Gaëlle Regnard, en déduit la nécessité de faire évoluer les compétences, pas seulement de banquier, mais aussi d’ingénieur, pour accompagner les agriculteurs dans la transition énergétique. Pour la réussir, Éric Vial, président du Crédit Agricole des Savoie, souligne que le groupe doit apporter des réponses personnalisées selon la spécificité de chaque territoire tout en s’appuyant sur l’innovation au sein des filières: «Il est important de valoriser le lien avec les Caisses locales pour remonter les initiatives et informer les administrateurs. » En Bretagne, région où l’agroa limentaire est l’une des principales industries, «on a la volonté d’agir au risque de se faire désintermé dier » , exprime Olivier Desportes, président de la

Caisse des Côtes-d’Armor. La Caisse a créé une démarche RSE agricole, convaincue que l’agriculture est porteuse de solution : 450 producteurs sont aujourd’hui accompagnés. Cet événement a été l’occasion de présenter les travaux en cours sur le développement d’instruments financiers ou d’innovation dédiés aux transitions. À l’issue de cette journée riche de convictions et de projets, Claude Vivenot, président du Comité de l’agri culture et de l’agroalimentaire et de la Caisse de Lorraine, a souligné la nécessité de travailler ensemble pour accompagner tous les acteurs. L’agriculture est bien aux sources de ce collectif qui irrigue de son expertise les niveaux local, national et international. Pour sa part, Pascal Delheure, rapporteur de cemême comité et directeur général du Crédit Agricole Normandie, a mis en évidence la capacité du groupe à semobiliser sur un sujet aussi complexe, car le vivant ne se travaille pas comme n’importe quel autre domaine. La transition environnementale demande une vision globale pour «passer du PowerPoint à l’ex ploitation sur le terrain» . ✔

Dominique Lefebvre:

«Tout réinventer face à l’urgence.»

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N ° 10 ENGAGEMENT DU PROJET SOCIÉTAL

SOUVERAINETÉALIMENTAIRE, MISSION: RECONQUÊTE #10. Contribuer à renforcer la souveraineté alimentaireenpromouvant l’installationdes nouvelles générations d’agriculteurs. A u cours des derniers mois, notre système alimentaire a connu d’im portantes secousses (pandémie, guerre en Ukraine, inflation et phénomènesclimatiques)auxquelles s’ajoutent deux défis: la nécessité Marc Fesneau, estégalement celui de laSouveraineté alimentaire. En tant que banque et partenaire historique des agriculteurs et de la filière agroalimentaire, leCrédit Agricole se doit d’y contribuer activement.

Il a identifiéquatre levierssur lesquels ilpeutagirpour renforcer la souveraineté alimentaire de la France: favoriser le renouvellement des générations et accompagner lesvocations, valoriser lemétierd’agri culteur et améliorer ses conditions de réalisation, pérenniser et assurer la viabilité de l’exploitation, et produire une alimentation saine et durable. Ce marqueur et ses chantiers sont placés sous la responsabilitédeBenoît Fayol, président de laCaisse Charente-Périgord, et dePascal Delheure, directeur général du CANormandie et rapporteur du Comité de l’agriculture et de l’agroalimentaire. ✔ (1) Compétitivité de la ferme France, rapport sénatorial n° 905 déposé le 28 septembre 2022.

d’engager les transitions et le renouvellement des générations. En vingt ans, nos importations alimentaires ont doublé (1) . En résultent des ques tions sur notre dépendance, notre capacité à produire, la disponibilité des ressources et celle de la main-d’œuvre. La souveraineté alimentaire repose sur une politique conduite au plus haut niveau de l’État et par l ’ensemble des par ties prenantes de la chaîne de valeur de l’alimentation de l’agri culteur au consommateur, du champ à l’assiette. Preuve de cette prise de conscience, notons que, depuis un an, le ministre de l’Agriculture,

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01. LERENOUVELLEMENT DESGÉNÉRATIONS

Accompagner à la fois les départs à la retraite des exploitants et permettre l’installation de l’ensemble des porteurs de projet quel que soit leur profil (jeune, reconversion professionnelle, etc.) ou quel que soit leur projet (toutes les formes d’agriculture).

Nos convictions Benoît Fayol, président de la Caisse régionale Charente-Périgord

communiquer sur lemétier d’agriculteur. Ce formidablemétier, qui fait souvent l’objet de critiques, connaît une crise de vocations chez les jeunes. Avec l’ensemble des organisations professionnelles, nous devons participer à une communication positive afin de redorer le blason de ceux qui, au quotidien, nous nourrissent et font vivre les territoires. Notre réseau d’administrateurs, dont certains sont agriculteurs, pourrait y prendrepart, en participant à susciter des vocations, à donner envie de l’exercer. Notre souveraineté alimentaire en dépend. Il ne faut pas l’oublier, cette souveraineté alimentaire est la base de la stabilité économique, politique et sociale d’un pays. Nous devons en être acteurs. Notre pays a une longue histoire agricole derrière lui et nous sommes le Crédit Agricole. Nous finançons et accompagnons depuis plus de cent ans toutes les agricultures et

«Par son histoire et son ADN, le Crédit Agricoleaune responsabilité quan t au renouve l l emen t des générations pour l’agriculture du pays. C’est une conviction profonde. Face à des installations, dont les reprises seront plus compliquées notamment en raison des montants engagés, nous devons être intelligents

et agiles pour apporter des solutions supportables pour que le jeune agriculteur puisse vivre de son métier. Dans ce contexte, nous avons par exemple entamé des réflexions avec la profession sur les sujets de portage du foncier et du capital desentreprisesagricoles. J’ai une autre conviction: nous devons , co l lec t i vement ,

tous les clients quels qu’ils soient : les installations, les coopératives, les agriculteurs dans les transitions, etc. Il faut donc, face à cet enjeu qui est l’affaire de tous, être comme nous l’avons toujours été, engagés et prêts à assumer les responsabilités qui sont les nôtres. »

58 % DES AGRICULTEURS ONT PLUS DE 50 ANS

25 % DES AGRICULTEURS ONT PLUS DE 60 ANS

Source: Recensement agricole

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I ndustrialiser et déployer largement les Cafés de l’installation et de la transmissiondédiés aux agriculteurs est l’unedes trois idées retenues dans le cadre de l’appel à projets sur la souveraineté alimentaire, organisé par la Fédération nationale du Crédit Agricole (FNCA). Cette proposition est co-soutenue par Jean-Baptiste Devine, directeur des professionnels et patrimoniaux de la Caisse du Languedoc, et par Thierry Bierne, vice-président de laCaissedeChampagne-Bourgogne et céréalier, qui témoigne à la suite de la première expérimentation. «En touchant deux périodes très importantes, l’installation et la transmission d’une exploitation, nous souhaitons apporter et renforcer l’information auprès des agriculteurs qui approchent de la retraite et des jeunes, notamment des “Nima” (non issus du milieu agricole) qui sont de plus en plus nombreux dans notre région et porteurs de projets de niche. Nous avons organisé un premier test à l’échelle du département de l’Yonne très récemment et je pense que nous pourrions à l’avenir prévoir des Cafés de l’installation et de la transmission sur de plus petites zones géographiques. Notre but est de toucher le public au cœur du territoire. Nous avons fait connaître la tenue du Café via les agences, les réseaux sociaux et les présidents des Caisses locales de l’Yonne. Nous pourrions envisager d’adresser des invitations personnelles afin de rassembler le plus grand nombre possible. Sous la forme de speed dating, les participants ont échangé avec, côté Caisse régionale, le chargé de l’agriculture du département et une chargée de transmission, un représentant du point accueil installation de la chambre d’agriculture, de Jeunes Agriculteurs, de Cerfrance, de la MSA et de la Safer, un notaire et un avocat. Les premiers retours ont été positifs, entre autres parce que tous les experts étaient rassemblés en unmême lieu. La Caisse régionale du Languedoc a organisé un Café de l’installation et de la transmission à la fin du mois de juin, à l’issue duquel nous en avons tiré des améliorations en vue de déployer ce dispositif utile.» ✔ Pour une installation et une transmission plus fluides N ° 10 ENGAGEMENT DU PROJET SOCIÉTAL

Quels sont les leviers suggérés par Jeunes Agriculteurs?

Arnaud Gaillot, président de Jeunes Agriculteurs

«Aujourd'hui, il faut créer un choc d'attractivité pour attirer dans le métier et ouvrir nos fermes aux écoles, aux experts ! Créer l'école du xxi e siècle pour l'agriculture et faire de la formation continue un réflexe pour nos acteurs agricoles», a exprimé Arnaud Gaillot, lors du discours de clôture du congrès national qui s’est tenu début juin. Face au défi du renouvellement des générations, le président de Jeunes Agriculteurs souhaite «mettre la jeunesse dans les meilleures conditions pour l’avenir», thème du récent congrès du syndicat. Différents axes sont suggérés, à commencer par le rapprochement des jeunes du monde agricole. Puis, pour accueillir, orienter et accompagner les agriculteurs, les étudiants et les salariés en matière d’émergence, d’installation, de formation et de transmission, le syndicat propose la création d’une entité unique pour coordonner les différents dispositifs sur l’installation et sur la transmission et assurer un suivi tout au long de la carrière des agriculteurs. Ensuite, un diagnostic de transmissibilité pourrait être établi dans les cinq à dix ans avant la transmission. Ce «bilan de santé» de l’exploitation analyserait l’ensemble des composantes (humaine, technique, climatique, économique, etc.) et faciliterait l’accompagnement des cédants et les orienterait dans leurs choix. Elle pourrait être accompagnée de préconisations, notamment au regard du changement climatique. Autre élément : l’établissement d’un plan d’entreprise évaluant la durabilité économique, sociale et environnementale du projet et incluant une cartographie des risques et les réponses à y apporter. Une politique d’installation et de transmission volontariste est attendue en matière fiscale et sociale. Enfin, il est souhaité plus de flexibilité dans les mesures existantes concernant l’accès au foncier. Même si, en France, celui-ci reste parmi les moins chers d’Europe et est encadré par des règles protectrices, le coût d’installation est de plus en plus élevé.

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02. VALORISERLEMÉTIERET

AMÉLIORERLESCONDITIONS Favoriser le bien-être des agriculteurs en les accompagnant, afin de s’adapter aux changements et en facilitant l’exercice des métiers agricoles.

DuCES auCAS Le 1 er juin, à Saint-Pol-de Léon (29), sur le site de la Sica (légumes Prince de Bretagne), le Village by CA Finistère a rassemblé des structures coopératives et privées dans les domaines du végétal (maraîchage, horticulture) et animal (lait, porc, volaille principalement) pour faire connaître des solutions innovantes. Lors de cet événement, baptisé Customer Agricultural Show, clin d’œil au Consumer Electronics Show de Las Vegas, les décideurs, les responsables innovation, les techniciens ou les exploitants agricoles ont pu apprécier l’importance de l’innovation agricole et la diversité de cette filière au sein du réseau des Villages by CA. En témoignent le post de David Boutillier, responsable agriculture et agroalimentaire de la FNCA, et la vidéo réalisée par la Caisse du Finistère (flashcode).

Agricole, fidèle à ses racines et à ses Villages, a décidé de soutenir en particulier une tentative d’innovation, incubée en l’occurrence dans l’un de ses Villages by CA, en s’associant avec les chambres d’agriculture.» LA ROBOTIQUE AU SERVICE D'UNE MEILLEURE GESTION DE L'EA U Grâce à Oscar, le premier robot d'irrigation autonome et polyvalent pour les cultures d'industries euro péennes, Osiris Agriculture propose un service clé en main, qui aide les agriculteurs à optimiser l'irri gation, la fertilisation et la protection des cultures. L’ambition des trois fondateurs, fils d’agriculteurs, est de proposer des outils à la fois robustes et précis qui aideront les agriculteurs à prendre la meilleure décision à la plante près. Économies d’eau (30 %

L’atout innovation A u Salon international de l’agriculture, Grégory Erphelin, directeur général de la Fédération nationale du Crédit Agricole, a remis le prix du concours Agreen start-up, organisé par les chambres d’agriculture dont le Crédit Agricole est partenaire, à Osiris Agriculture accéléré au Village by CA Nord de France. «L’agriculture fait face à des défis colossaux, mais aussi extrêmement enthousias mants: la souveraineté alimentaire, le défi climatique, le renouvellement des générations et, bien sûr, des exploitations qui doivent être pérennes et donc viables économiquement. Le Crédit Agricole accompagne toutes les transitions au plus près des territoires et l’un des moyens de l’accompagner est d’innover. Et donc le Crédit

environ), d’énergie (20 %) et de temps (7 heures de travail par hectare sont libérés entre juillet et août) sont les promesses d’Oscar face aux prouesses d’un enrouleur classique. ✔

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N ° 10 ENGAGEMENT DU PROJET SOCIÉTAL

Laréelle forcede frappede la filière agri-agroduréseaudesVillagesbyCA

102 en filière agro

77 en filière agri

179 START-UP AGRI AGRO 1 re filière du réseau des Villages by CA (en nombre de start-up, soit 13,4 %)

=

+

6 VILLAGES BY CA avec l’agriculture pour dominante (Brest, Saint-Brieuc, Chessy, Lille, Dijon, Parme)

2 ANTENNES DÉDIÉES (Agreen Lab’o et le Zesteur)

3 VILLAGES BY CA entièrement thématisés (Châteaudun, Contres et Caen)

66 PARTENAIRES industriels, grandes coopératives, Inrae et laboratoires pharmaceutiques

1 ER APPEL À CANDIDATURES dédié à la filière, réalisé par quatre Villages by CA, entre janvier et début avril

EN 2023 Renforcement de notre présence dans les salons (Sia, Space, Innov Agri et Sommet de l’élevage)

Le bien-être des agriculteurs

D epuis deux ans, trois Caisses régionales (Franche-Comté, Nord de France et Normandie) ont étendu le dispositif Point Passerelle aux agriculteurs et aux professionnels à travers un accompagnement sur mesure. Cette démarche humaine apporte des solutions extra-bancaires en relais des solutions bancaires classiques proposées par le conseiller dédié à cette clientèle. S’intéresser aux personnes Nicolas Pilard, conseiller Passerelle entrepreneurs au Crédit AgricoleNormandie «Le Point Passerelle dédié aux agriculteurs et aux entrepreneurs existe depuis deux ans à la Caisse régionale. Il vient compléter le dispositif Coup dur agri et pro qui leur vient en aide au niveau bancaire. L’un n’allant pas sans l’autre. Tout comme les particuliers, les agriculteurs traversent des accidents de la vie : maladie, séparation, divorce, etc. Quand leurs clients subissent un aléa de la vie, les conseillers du marché

agricole me contactent. Je viens en appui, en support et, surtout, en coordination de solutions extra-bancaires, le conseiller d’agence restant le lien privilégié en accompagnement de la situation délicate. Je mets en relation la personne avec des organismes extérieurs (médecins, assistantes sociales, psychologues, principalement des travailleurs sociaux) pour trouver des solutions comme l’aide au remplacement, la prise de repos, ou encore des aides sociales tel le RSA… Je travaille également avec les chambres d’agriculture des trois départements qui font appel à moi lorsqu’elles rencontrent des clients en difficulté. Je fais alors le lien entre la chambre consulaire, les agriculteurs et les conseillers bancaires : je suis la porte d’entrée des structures externes et la courroie de transmission pour faciliter la mise en œuvre des actions décidées. En deux ans, j’ai rencontré une soixantaine de cas – presque autant d’entreprises sauvées. La maladie, l’épuisement moral, psychologique et physique sont les situations les plus fréquentes. Le mal-être est de plus en plus visible. C’est celui de l’agriculteur qui travaille 7 jours/7, sans temps de repos et qui gagne très mal sa vie... Ce sont souvent des personnes seules qui ont pris la suite de leurs parents; à leur disparition, ils perdent des repères et des soutiens et se retrouvent sans aide.

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Dumal-être aumieux-être Le 20 avril dernier, la Mutualité sociale agricole (MSA) organisait une convention dans le cadre du suivi du plan interministériel de lutte contre le mal-être des agriculteurs. Les dispositifs existants ont été rappelés, dont Agri’écoute, insuffisamment connu, et Agri Sentinelles, un réseaumultipartenarial qui forme des volontaires impliqués dans la prévention contre le suicide. Le métier d’agriculteur comporte plusieurs casquettes. Celle de dirigeant entraîne des prises de décisions qui ont des conséquences sur l’organisation et le bien-être de chacun, donc sur la performance de l’activité. Contre cette solitude, il est important de s’exprimer, que ce soit dans un cercle restreint ou plus large, d’autant plus que l’agriculture est souvent pointée du doigt alors qu’elle est soumise à des défis immenses. En parler positivement améliore l’image et le bien-être de ces professionnels très attachés à leur métier, qui ne comptent pas leurs heures. Leur santé est bien le premier capital immatériel de l’exploitation agricole.

Apporter une réponse rapide à un conseiller qui s’interroge permet d’éviter le pire, ce que j’ai vécu la semaine dernière… Les agriculteurs cotisent à la MSA, mais beaucoup ignorent le soutien auquel ils peuvent avoir recours, ou n’osent tout simplement pas. Ce n’est pas dans leur culture de demander de l’aide. Environ 80 % d’entre eux sont toujours en activité. Certains ont arrêté à cause de problèmes de gestion, d’autres se sont réorientés vers un nouveaumétier. J'ai un rôle social, je suis également Agri Sentinelle (1) pour la région. Cela m’intéresse énormément et donne une autre image de ce que la banque peut faire. C’est le rôle humain du Crédit Agricole porté par ses valeurs. » ✔ (1) Les Agri Sentinelles forment un réseau multipartenarial qui vise à sensibiliser, former, outiller des volontaires qui travaillent au contact des agriculteurs pour s’impliquer dans la prévention du suicide.

Humain et utile Christine Grillet, présidente de la Caisse régionale de Franche-Comté

«Depuis 2017, à la Caisse de Franche-Comté, nous avons décliné l’accompagnement extra-bancaire des Point Passerelle aux agriculteurs. Nous avons constaté que, grâce à ce dispositif, 90 % des personnes accompagnées ont été remises sur les rails. Nous sommes donc convaincus de son utilité qui accompagne de la manière la plus humaine et personnalisée possible les agriculteurs traversant des difficultés. »

«Les agriculteurs sont des passionnés qui adorent expli quer leur métier. Bien-être animal, emploi de pesticides, gestion de l’eau, etc., les sujets de fond sont abordés. Ils travaillent dur et n’ont pas pris le temps de faire savoir comment ils réalisent leur métier, sans oublier l’état d’esprit du " pour vivre heureux, vivons cachés" . Il y a un vrai enjeu à ce qu’ ils reprennent la main sur leur communication pour montrer ce qu’est réellement leur métier – et sa complexité. Rien n’est enseigné sur la manière dont est produite notre alimentation! Un stage agricole devrait être obligatoire pour tous, dès l’école. Le secteur agroalimentaire a montré ce que les gens voulaient voir et véhiculé une image faussée. Je remarque que les jeunes qui s’installent sont très qualifiés notam ment sur les enjeux environnementaux et en matière de technologie. Ce sont des entrepreneurs à part entière au même titre que les startupers.» ✔ http://www.lacledeschamps-podcast.fr

VALORISER LE MÉTIER

Les gens des villes et les gens des champs

I l était une fois une petite-fille et fille d’agriculteurs, Louise Lesparre, partie étudier à la ville le commerce et le marketing. Là, elle découvre la «totale déconnexion» entre le monde agricole et le mondeurbainet tented’y remédier grâceàdespodcasts, LaClédeschamps, auxquelselleseconsacrepleinement après la pandémie. Ils n’ont qu’un seul but: renouer le lien entre les gens des villes et les gens des champs et sortir dumanichéisme entre «la gentille agriculture bio et laméchante agriculture conventionnelle» . Louise Lesparre a rencontré et interviewé 150 agriculteurs de toutes les filières. Elle organise également des formations pour des collaborateurs d’entreprises qui travaillent sur des produits agricoles, sans jamais avoir mis un pied dans une exploitation. Ils commencent par suivre un e-learning, conçu par des experts, qui explique les challenges que les agriculteurs doivent relever, puis passent une journée en immersion à la ferme dans un esprit de team building .

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Assurer le maintien d’une agriculture porteuse de valeur ajoutée sur les territoires et permettre la pérennité des exploitations au travers de la gestion des risques, des contrats de filières, de la gestion de l’eau, de la protection du foncier agricole, des pratiques culturales, de la diversification des productions (protéines végétales, etc.), de la modernisation des bâtiments et des outils de production. 03. PÉRENNISERETASSURERLA VIABILITÉDESEXPLOITATIONS

Assurances climatiques

Un nouvel outil Pour renforcer la démarche conseil enmatière de transitions agricoles, des outils dédiés aux conseillers sont en cours de réalisation. Parmi ceux-ci, le questionnaire Transitions agri issu d’un groupe de travail transverse (projet sociétal, direction de l’agriculture et de l’agroalimentaire de Casa et de six Caisses régionales) et des travaux du socle commun de transition. Conçu comme un outil de dialogue, le questionnaire permettra d’évaluer la maturité des agriculteurs, quels que soient l’exploitation et son secteur d’activité, sur les sujets de transition et de les accompagner sur cette voie grâce à des offres et des partenariats dédiés. Depuis avril 2023, le questionnaire se déploie dans les Caisses régionales. Il sera ensuite intégré aux outils des conseillers dont Trajectoires Agri.

à 103000, pour les prairies de 50000 hectares à 350000 et pour les grandes cultures de 770000 hectares à plus d’un million. Au total, les surfaces assurées se sont accrues de 68 %, passant de 887000 à 1,5 Mha. De plus, le niveau de franchise souscrit s’est globalement abaissé par rapport à 2022, passant de 25 % à 20 % pour l’essentiel en 2023. C’est un élément très important, car il favorise une meilleure sécurisation de la ferme France et place le Crédit Agricole en tant que tiers de confiance. L’année dernière, l’agriculture française a été particulièrement exposée aux différents épisodes climatiques. Cela a démontré l’urgence d’accompagner les exploitations agricoles pour garantir leur résilience et donc leur pérennité. L’une des premières réponses réside dans la mise en œuvre d’une démarche globale de gestion des risques. Le nouveau dispositif de l’assurance récoltes, associé aux outils de prévention, protection ou d’épargne de précaution (DEP), apporte une meilleure sécurisation des exploitations. Cependant, la gestion des risques n’est qu’un des leviers sur lequel s’appuyer. Elle doit venir en complément d’une réflexion plus globale d’adaptation de l’exploitation avec l’évolution des pratiques culturales ou la sélection de variétés ou d’espèces adaptées aux nouvelles conditions climatiques. »

«La ferme France estmieux sécurisée. » Jean-Michel Geeraert, directeur des marchés de l’agriculture et de la prévention de Pacifica

«La première campagne de commercialisation des assurances récoltes et prairies est une réussite. C’est un beau challenge gagné par chaque collaborateur de Caisse régionale. Les pouvoirs publics, le cabinet du ministre et les organisations professionnelles sont unanimes : ils ont relevé le formidable élan et l’enthousiasme de toutes les Caisses régionales de Crédit Agricole. Le groupe recensait, en 2022, 12500 contrats ; en 2023, il en compte plus de 22000. Les surfaces assurées sont passées, pour l’arboriculture de 2700 hectares à 13600, pour la viticulture de 65000 hectares

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