20 ans du Crédit Agricole Normandie Seine - Une fabuleuse aventure collective

Publication animée

Crédit Agricole Normandie-Seine Une fabuleuse aventure collective

Crédit Agricole Normandie-Seine Une fabuleuse aventure collective

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PRÉFACE

à

sa naissance, notre Caisse Régionale s’est choisi un nom, qui, par la simple juxtaposition de deux termes – la Normandie et la Seine –, lie son destin à celui de son territoire. En 2001, la volonté partagée était de créer une Caisse Régionale unique, à même de fédérer nos forces et de porter nos ambitions pour les dépar- tements de l’Eure et de la Seine-Maritime. Normandie-Seine, c’est la région et le fleuve, la terre et l’eau, la permanence de l’idéal mutualiste face aux mutations accélérées du monde bancaire… Vingt ans plus tard, l’identité visuelle imaginée pour célébrer cet anniversaire souligne cette dualité. Tel le pommier, la banque est d’abord « terrienne », fière de ses racines et de ses valeurs, mais aussi nourricière et féconde par ses activités. Tel le fleuve, elle a toujours su s’adapter à son environnement, avancer quelles que soient les difficultés, et se réinventer dans un esprit de conquête, autant que d’ouverture et d’attention au monde. En 2021, Crédit Agricole Normandie-Seine célèbre vingt ans de transformation et d’action dans l’intérêt de ses clients et de la société. Après l’événement qui nous a tous réunis, salariés et élus, le 30 novembre dernier, nous avons souhaité refermer cette année anniversaire avec l’édition d’un beau livre, nourri de nombreux témoignages, et qui raconte l'histoire de notre Caisse Régionale, tout en dessinant le « portait intime » de notre territoire. Crédit Agricole Normandie-Seine, une fabuleuse aventure collective éclaire le chemin parcouru, avec sincérité, fierté et gratitude pour les hommes et les femmes qui y ont contribué. En deux décennies, administrateurs et collaborateurs, unis dans une communauté de liens et de destin, ont beaucoup travaillé, à tous les niveaux de l’entreprise, pour faire de Normandie-Seine la banque préférée des Haut-Normands, à la fois proche de ses clients, puissante et innovante. À travers cet ouvrage, nous avons aussi voulu nous tourner vers l’avenir, avec confiance et audace face aux opportunités et aux défis qui nous attendent. Revenir sur cet héritage nous rend plus forts et plus unis que jamais à l’heure où s’ouvre une nouvelle décennie. Nous espérons que vous éprouverez autant de plaisir à (re)découvrir les grandes étapes de cette épopée, que nous en avons eu à les vivre et à les retracer. Tel un coup de pinceau sur la toile, ces vingt années sont finalement passées très vite, mais laisseront à coup sûr une empreinte inoubliable.

Nicolas Denis, Directeur général

Pascal Lheureux,

Président

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SOMMAIRE

1 IL ÉTAIT UNE CAISSE RÉGIONALE…

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Portrait : Pascal Acquaviva , Directeur général 1995-2000

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Portrait : Henri Pavie , Directeur général 2001-2003

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Portrait : Philippe Lepicard , Président 2001-2006

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Avant la fusion : un siècle d’histoire

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2 UN TERRITOIRE SINGULIER, UNE RÉGION PLURIELLE

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Normandie-Seine « Côté terre »

43 53

Normandie-Seine « Côté eau »

Normandie-Seine « Côté feu »

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Normandie-Seine « Côté air »

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3 20 ANS DE TRANSFORMATIONS

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Ils ont fait Crédit Agricole Normandie-Seine ! Michel Rallet , Directeur général, 2003-2007

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Ils ont fait Crédit Agricole Normandie-Seine ! Frédéric Thomas , Directeur général, 2007-2015

90

Ils ont fait Crédit Agricole Normandie-Seine ! Philippe Lethrosne , Président, 2006-2014

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4 20 ANS D’ACTION DANS L’INTÉRÊT DE NOS CLIENTS ET DE LA SOCIÉTÉ

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Pour le territoire

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Pour les hommes

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Rencontre : Françoise Boscus-Galasso , Directrice générale adjointe depuis 2017

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Pour l'environnement

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5 NOUVELLE DÉCENNIE, NOUVEL HORIZON. ENSEMBLE, ÉCRIVONS LA SUITE DE L’HISTOIRE !

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Rencontre : Nicolas Denis , Directeur général depuis 2016

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Rencontre : Pascal Lheureux , Président depuis 2014

Remerciements

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IL ÉTAIT UNE CAISSE RÉGIONALE

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1 IL ÉTAIT UNE CAISSE RÉGIONALE…

l est un peu plus de 20 h, ce 20 avril 2001, quand les administrateurs de la toute nouvelle « Caisse Régionale de Crédit Agricole Normandie-Seine » quittent le Zénith de Rouen. Dans la poche ou dans la main, chacun a le galet presse-papiers qui lui a été offert pour immortaliser l’événement : cette journée « à marquer d’une pierre blanche » célébrait à la fois un mariage, celui des caisses de l’Eure et de la Haute-Normandie, et une naissance, celle de l’entité Normandie-Seine. i

Pour prendre toute la mesure de cette journée historique, il faut remonter quelques années en arrière. À la fin des années quatre-vingt, l’heure est aux fusions dans le monde bancaire. Le Crédit Agricole, qui compte alors 94 Caisses régionales, encourage fortement ces rapprochements pour permettre l’émergence de nouvelles entités régionales mieux dimensionnées et plus rentables. Les recommandations de la Charte des fusions, édictée en 1994 par la Caisse nationale de Crédit Agricole, sont claires : la circonscription d’une caisse fusionnée doit couvrir deux à trois départements, au moins 400 000 à 500 000 habitants, mais pas plus d’un chef-lieu de région.

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UNE FABULEUSE AVENTURE COLLECTIVE

NOM DE CODE : « OBJECTIF 216 »

À cette époque, nombre de caisses régionales ont le plus souvent une échelle « départementale » d’un point de vue géographique ou administratif. C’est le cas de celle de l’Eure qui rayonne sur le département du même nom, comme de celle de Haute- Normandie qui ne couvre en fait que le territoire de la Seine-Maritime. L’une et l’autre partent alors en quête du « bon partenaire »… Certains, dans l’Eure, lorgnent un temps vers l’Eure-et-Loir ou le Calvados, d’autres évoquent un rapprochement avec l’Oise : autant d’options, pertinentes sur le papier ou plus improbables, qui sont restées sans suite. Côté Seine-Maritime, la Caisse Régionale a également mené un projet d’union avec le Calvados dans les années quatre-vingt-dix, puis un autre avec l’Oise et la Somme, mais sans les concrétiser non plus (voir ci-contre). Pour commencer, ces hypothèses ne suivaient pas vraiment les principes du Groupe puisque Caen, d’une part, et Amiens, d’autre part, sont des capitales régionales comme Rouen. Et, d’un strict point de vue géographique, ce n’était pas très cohérent soit par manque d’homogénéité soit en raison d’une trop grande distance. De plus, pourquoi vouloir marier de force Normands et Picards quand le prétendant a priori le plus légitime est de l’autre côté du fleuve ? Après tout, « Haute-Normandie » c’est aussi le nom de la région administrative regroupant l’Eure et la Seine-Maritime ( jusqu’en 2015) … Pascal Lheureux, alors administrateur à la Caisse Régionale de Haute-Normandie et futur président de Normandie-Seine (élu en 2014), se souvient : « Les relations ont longtemps été courtoises, mais plutôt froides entre nos deux départements. Une politique du “dos tourné” qui tenait plus aux hommes qu’à la réalité et se nourrissait de préjugés de part et d’autre. » Pourtant, chaque caisse a ses atouts, complémentaires qui plus est, et il est vite devenu évident aux yeux des dirigeants de l’époque que, si rapprochement il y avait, ce serait celui-là.

60 + 76 + 80 = 216 En toute simplicité, un projet de fusion des Caisses régionales de l’Oise, de la Seine-Maritime et de la Somme avait été baptisé « Objectif 216 » en référence aux numéros des départements. Certains témoins de l’époque ont encore la balle de golf, estampillée « 216 », qui avait été fabriquée pour symboliser ce rapprochement…

POURTANT, CHAQUE CAISSE A SES ATOUTS, COMPLÉMENTAIRES QUI PLUS EST…

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1 IL ÉTAIT UNE CAISSE RÉGIONALE…

Après des difficultés financières au milieu des années 1990, la Caisse Régionale de Haute- Normandie a retrouvé une situation solide à l’issue d’un plan de redressement conduit par son directeur général, Pascal Acquaviva. De plus, elle est implantée sur un territoire à fort potentiel, avec en particulier deux grandes métropoles industrielles à mieux couvrir : Rouen et Le Havre. De son côté, la Caisse Régionale de l’Eure dispose déjà d’une part de marché importante sur son territoire, mais son développement à venir s’annonce contraint avec un bassin de seulement 600 000 habitants et un chef-lieu d’envergure moyenne, Évreux. Ainsi, à la veille de la fusion qui allait consacrer la naissance de la Caisse Régionale de Crédit Agricole Normandie-Seine, les intérêts des deux caisses convergent. Elles ont tout à gagner à bâtir ensemble une belle caisse régionale pour mieux se développer sur le territoire, mais aussi dans un premier temps, faire face aux investissements technologiques nécessaires et gérer le passage aux 35 heures, qui sont les deux grands sujets de l’époque. Dès lors, les négociations s’engagent. Dans le courant de l’année 1999, à l’initiative de Pascal Acquaviva, Directeur général de la Caisse de Haute-Normandie , une première rencontre a lieu avec son homologue de l’Eure, Henri Pavie, puis avec les présidents des deux caisses, Jacques Thirouin pour l’Eure, Philippe Lepicard pour la Haute-Normandie. Ce dernier, président de fraîche date, est convaincu du bien-fondé de ce rapprochement comme il le rappelle vingt ans plus tard : « Les fusions dans le Groupe n’étaient pas un fait de mode, mais une nécessité, à la fois pour une question de dimension et de solidité financière. L’unité constituée par cette fusion, si elle réussissait, allait représenter 2,5 % du groupe Crédit Agricole, soit la moyenne des 40 caisses existantes dans les années quatre-vingt-dix. Elle devait donc pouvoir remplir son rôle d’établissement bancaire régional de plein exercice. »

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UNE FABULEUSE AVENTURE COLLECTIVE

Grâce aux efforts et à la compréhension de tous, dirigeants, salariés et élus, nous avons réussi cette fusion et donné

à Crédit Agricole Normandie-Seine la pleine maîtrise de son destin.

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PORTRAIT

PASCAL ACQUAVIVA DIRECTEUR GÉNÉRAL 1995-2000

c

ourant 1999, c’est à son initiative que les Caisses Régionales de l’Eure et de la Haute-Normandie ont commencé à envisager un avenir commun. Mais la contribution de Pascal Acquaviva à ce qui allait devenir Crédit Agricole Normandie-Seine a commencé bien avant les préliminaires de la fusion. Entre 1995 et 1998, il fut l’instigateur d’un plan de redressement réussi qui marqua durablement l’organisation de l’entreprise et les équipes. Après des études de sciences économiques, Pascal Acquaviva a fait le choix de com - mencer sa carrière au Crédit Agricole, par goût autant que par conviction. « La banque m’attirait en tant que métier de contact, j'aimais bien l'idée d'avoir cette ouverture aux autres. Et j'ai choisi le Crédit Agricole en particulier pour son statut mutualiste : que l'objectif affiché ne soit pas la recherche du profit, mais l’intérêt général, c’était impor - tant à mes yeux » , confie-t-il. En 1972, il entre à la Caisse Régionale d’Île-de-France au poste de chef de section. Sa première décision est de reprendre ses études en parallèle pour compléter sa forma - tion : CAP puis Brevet professionnel de banque en 1975, et il sort major de sa promotion de l’Institut technique de banque en 1977. Après 17 années en Île-de-France, il poursuit sa carrière à la Caisse régionale de Reims. Au cours de ces longues expériences, il croise la route de deux figures éminentes du Crédit Agricole, qu’il considère encore comme ses « maîtres à penser », Lucien Douroux et Marc Didierjean : « Chacun à leur manière, ils m’ont inspiré, cela a été une chance extraordinaire de travailler à leurs côtés. » À Reims, avec Marc Didierjean, il conduit notamment trois fusions successives et réussies (avec Laon, Chalon, puis Charleville), donnant naissance à l’actuel Crédit Agricole Nord-Est. Pour autant, à son arrivée à la Caisse Régionale de Haute-Normandie le 1 er juin 1995 au poste de Directeur général adjoint, l’idée d’une fusion n’est absolu- ment pas à l’ordre du jour, ni même dans son esprit. Elle ne le sera pas davantage,

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moins de six mois plus tard, lorsqu’il est nommé Directeur général, à la suite du décès de Michel Lecanuet. La mission qui l’attend est autrement plus délicate, puisque la Caisse traverse alors d’importantes difficultés financières : « Je n’avais jamais connu une situation comparable et j’ai été surpris de constater que ni l'équipe de direction autour de Michel Lecanuet, certes très affaibli par la maladie, ni les commissaires aux comptes n'ont su ou pu agir à temps. Beaucoup étaient dans le déni… » Le plan de redressement qu’il met alors en place repose sur trois axes : informer, expliquer, impliquer. Il commence par réunir tout le personnel à Luneray : « Seul face à 900 personnes, je me suis livré sans aucun détour à une explication directe sur les problèmes rencontrés afin de convaincre les derniers sceptiques et surtout de lancer un appel à la mobilisation. » Après la pédagogie, place à l’action, qui doit impliquer tout le personnel, en com - mençant par le plus haut niveau : gel de la rémunération du Directeur général, baisse des primes de l'équipe de direction et suppression des voitures de fonction sous utilisées… À ces mesures emblématiques et à une « chasse au gaspillage » géné- ralisée, s’ajoutent la réforme des caisses locales, la restructuration des directions et du périmètre des agences. Toutes ces actions cumulées ont porté leurs fruits, permettant à la Caisse Régionale de retrouver une situation financière satisfaisante dès 1998. « Je salue l’engagement des équipes pendant ces deux années très tendues. Nous en sommes ressortis plus forts, plus soudés et avec une vigilance accrue qui nous a beaucoup servi par la suite » , ajoute-t-il. Ce n’est que l’année suivante, en 1999, que Pascal Acquaviva envisage pour la pre- mière fois l’idée d’un rapprochement avec sa voisine de l’Eure. Le contexte s’y prête pour deux raisons : d’une part les deux caisses avaient décidé, séparément, de migrer leur informatique sur deux systèmes différents, d’où d’énormes surcoûts (en grande partie réduits en cas de fusion), d’autre part les 35 heures se mettaient en place. « Nous avions tout à gagner à gérer ces deux situations ensemble, en ne formant plus qu’une seule et même entreprise, plutôt que de travailler chacun dans notre coin. Ma démarche était avant tout pragmatique » , précise-t-il. Après avoir obtenu l'accord de principe de son Président et du Conseil d'administration, il contacte donc Henri Pavie pour lui en faire la proposition et lancer officiellement le processus.

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SON COUP DE CŒUR

Aguerri par son expérience antérieure à Reims, Pascal Acquaviva s’investit pleinement dans la définition des principes fondateurs de la fusion. « Dans toute fusion, il y a quatre questions à régler en priorité : les deux directeurs généraux et les deux présidents » affirme-t-il encore aujourd’hui. En proposant d’emblée de se retirer pour laisser Henri Pavie assurer la direction de la Caisse régionale de Haute-Normandie pendant la phase de transition, puis diriger la future entité, Pascal Acquaviva a donc grandement facilité les choses. « Jusqu’à mon départ, j’ai eu le souci constant d’informer et d’expliquer pour favoriser l'adhésion du plus grand nombre à ce projet. J'ai heureuse- ment pu compter sur des partenaires sociaux ouverts et constructifs. » Le 1 er août 2000, il referme donc la page normande de sa carrière, sans regret, et avec la satisfaction du devoir accompli. Il rejoint ensuite Crédit Agricole SA comme directeur central en charge du développement des nouvelles technologies, avant de prendre la responsabilité du réseau de banque de détail dans toute l'Europe. Retraité depuis 2006, il partage aujourd’hui son temps entre Paris et Londres.

Pour moi, qui ait été élevé en milieu urbain, la Normandie fut d’abord la poursuite de la découverte du monde rural. Pendant cinq ans, j’ai énormément apprécié la richesse des relations que j’ai pu nouer avec les élus de terrain. Le Crédit Agricole m'a donné la chance de vivre des expériences humaines extraordinaires.

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UNE FABULEUSE AVENTURE COLLECTIVE

LES PRINCIPES FONDATEURS DE LA FUSION

Création d’une nouvelle caisse régionale : aucune caisse régionale n’absorbera l’autre, les deux anciennes entités régionales seront dissoutes. Unité de l’entreprise sur les deux départements : il ne subsistera pas de structure juridique départementale. Maintien de la proximité avec la création d’un comité départemental dans chacun des départements, qui est notamment chargé de l’examen des dossiers de crédits et de l’animation mutualiste. Représentation paritaire des deux départements à l’assemblée générale, au conseil d’administration et au bureau. Répartition harmonieuse des fonctions de siège entre les deux sites d’Évreux et de Bois-Guillaume. Équilibre préservé entre les bassins d’emploi et maintien global des emplois grâce aux opportunités nouvelles de développement.

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1 IL ÉTAIT UNE CAISSE RÉGIONALE…

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S’ensuit une seconde rencontre entre les parties prenantes, puis une troisième…Jusqu’à ce soir de la mi-décembre 1999, à l’Hôtel de Dieppe à Rouen, où est actée la décision d’engager un processus d’union à l’échéance de 2001. Elles ont pris la précaution de mettre dans la confidence les deux vice-présidents, Claude Grenet (Haute-Normandie) et Alain Pluchet (Eure), ce qui s’avérera décisif pour la suite du processus… En effet, en janvier 2000, lors d’un voyage du conseil d’administration en Amérique du Sud, Jacques Thirouin décède subitement au pied d’un glacier. Nommé pour assurer l’intérim, Alain Pluchet annonce en février son intention d’honorer la promesse faite quelques semaines plus tôt à la Caisse de Haute-Normandie. C’est l’officialisation des fiançailles ! Vingt ans après, Henri Pavie évoque la force du « pacte » de décembre 1999 : « Pascal Acquaviva et moi-même partagions la vision d’une grande banque régionale sur un ter - ritoire homogène, avec des clientèles diversifiées, des caisses locales dynamiques, des moyens multipliés par la convergence de systèmes d’information jusque-là incompatibles et par la mise en commun des compétences et fonds propres des deux entreprises. » Il est également convenu qu’il dirige la future entité. Dans cette optique, Pascal Acquaviva propose de se retirer dès l’été 2000 pour qu’Henri Pavie prenne la direction de la Caisse de Haute-Normandie, en plus de celle de l’Eure, afin d’engager le processus de fusion et d’assurer la transition. Lors d’une réunion conjointe des bureaux des deux conseils d’ad- ministration le 23 février à Louviers, une « déclaration d’intention » établit les principes fondateurs de la fusion. (•••)

… ENGAGER UN PROCESSUS D’UNION À L’ÉCHÉANCE DE 2001.

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Ce fut une période intense où nous avons franchi le pas et réalisé un projet ancien, qui était longtemps resté figé sans qu’on sache vraiment pourquoi… Présidents et directeurs ont fini par unir leurs forces pour affronter le monde bancaire nouveau qui se profilait avec les années 2000.

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PORTRAIT

HENRI PAVIE DIRECTEUR GÉNÉRAL 2001-2003

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irecteur général de la Caisse Régionale de l’Eure de 1994 à 2001, successeur de Pascal Acquaviva à la tête de celle de Haute-Normandie un an avant la fusion, puis premier Directeur général de Normandie-Seine ( jusqu’en 2003), Henri Pavie est un personnage incontournable de cette épopée. Natif de la Nièvre, il a toujours entretenu un lien particulier avec le territoire normand… Henri Pavie a tout juste 30 ans en 1974, quand le parcours de formation des cadres de direction du Crédit Agricole l’amène à venir faire un stage à Rouen sur le finance - ment de l’habitat. Il enchaîne avec un poste d’attaché de direction, puis de directeur chargé des crédits, et ces cinq années passées à la Caisse Régionale de Haute- Normandie ne lui laissent que de bons souvenirs. Vingt ans avant que les fusions soient à l’ordre du jour au Crédit Agricole, l’idée de faire « une grande caisse régionale » avec l’Eure lui semblait déjà souhaitable. Il tisse un premier lien entre les banques des deux départements en 1977, en créant un ser- vice de promotion immobilière commun, financé à parts égales par les deux caisses. Tout un symbole ! Mais à cette époque, on est encore bien loin des préliminaires de la fusion. En 1980, changement de cap pour Henri Pavie qui part diriger l’IFCAM, l’université du groupe Crédit Agricole, avant d’accepter la direction générale de la Caisse Régionale de Crédit Agricole de La Réunion. Il n’est pas un nouveau venu dans ce département d’outre-mer pour y avoir effectué son service national au Crédit Agricole à la fin des années soixante. Il y reste dix ans, jusqu’en 1993, tout en continuant à entretenir des liens étroits avec la Haute-Normandie, se rendant régulièrement à La Gaillarde, près de Luneray dans sa résidence secondaire, sans jamais oublier d’aller faire un tour au marché ou de rendre visite aux commerçants.

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On lui propose alors de prendre les rênes de la Caisse Régionale de l’Eure, à la suite du départ de Philippe Delattre. À propos de son arrivée à Évreux en janvier 1994, il garde le souvenir vivace de la toute première question que lui a posée le Président, Jacques Thirouin : « Êtes-vous un fusionniste forcené ? ». Sa réponse, sans détour, reflète une conviction de longue date : « Je pense que c’est dans le sens de l’histoire, mais, compte tenu des performances de la caisse, tant financières que commerciales, il n’y a pas d’urgence… Et si fusion il doit y avoir, ce sera uniquement avec la Seine-Maritime. » En parallèle, c’est dans un autre domaine qu’Henri Pavie contribue au rapprochement des deux départements. En 2000, il œuvre « en coulisses » à la fusion de la Coopé- rative agricole de Haute-Normandie (CAHN), qui rayonne sur la Seine-Maritime, et de l’Union des coopératives agricoles d’approvisionnement et de stockage d’Évreux et de Neubourg (Ucasen), implantée dans l’Eure. Elles se réunissent sous le nom de Cap Seine. « Cela a brisé un tabou ! » assure-t-il. Arrive enfin le « pacte de décembre 1999 », et de là, l’accélération d’un processus qu’il a toujours appelé de ses vœux : « Une fois lancée, la fusion s’est déroulée méthodi- quement, dans un relatif consensus, et je crois très sincèrement que l’une des clés de la réussite de ce projet en un temps record a été la confiance des uns et des autres dans les engagements pris et la transparence absolue dans le déroulé des étapes. À cet égard, je voudrais souligner l’engagement des deux équipes de direction, desti- nées à n’en former plus qu’une, et notamment le travail des deux directeurs généraux adjoints, Alain Giraud pour l’Eure, et Michel Rallet pour la Haute-Normandie. Je salue enfin le comportement très positif des partenaires sociaux qui, malgré quelques mo - ments de fortes tensions bien compréhensibles, ont joué le jeu, dans l’intérêt de tous. »

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SON COUP DE CŒUR

La première fois que j’ai découvert Rouen, je l’ai tout de suite aimée. Je n’y avais jamais mis les pieds avant mon stage en 1974, bien qu’un de mes grands-pères y soit né et que mon arrière-grand- père, ingénieur des Ponts-et- Chaussées, y ait travaillé. Dans ma famille, j’avais toujours vu des lithographies de Rouen, des photos de la cathédrale… J’avais une histoire avec la ville avant même de la connaître !

Quand il quitte la direction de la Caisse Régionale de Crédit Agricole Normandie-Seine en 2003, l’heure de la retraite a sonné pour Henri Pavie, mais ce n’est certainement pas la fin de ses relations avec la Caisse Régionale et le Groupe. Entre autres respon - sabilités, la présidence de l’Association nationale des déposants du Crédit Agricole (Andecam) et celle de la « chaîne d’amitié » des anciens directeurs généraux de caisse régionale lui permettent d’entretenir ces liens. En citoyen toujours attentif au devenir de son territoire, il a par ailleurs multiplié les engagements : conseiller municipal de La Gaillarde, juge au tribunal de commerce de Rouen, président du Rotary club… Il fut aussi membre du club de décideurs Élan Normandie et a milité, dans ce cadre, pour la réunion de la Haute et de la Basse-Normandie en une unique région admi - nistrative. Réunificateur un jour… réunificateur toujours !

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UNE FABULEUSE AVENTURE COLLECTIVE

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Après un large débat, le projet de rapprochement avec la Haute-Normandie remporte l’adhésion des administrateurs de l’Eure. La parité de représentation entre les deux dépar- tements contribue à rassurer les derniers sceptiques parmi les élus des caisses locales de l’Eure qui craignaient que la fusion soit en fait une absorption. Puis, en avril 2000, le nouveau président Pierre Barrois révèle aux sociétaires, lors de l’assemblée générale, l’engagement du processus de fusion. Une démarche similaire est engagée en parallèle par la Caisse Régionale de Haute-Normandie. Les décisions de principe ayant été prises de part et d’autre, l’heure est ensuite à la concrétisation. La « Caisse Régionale de Crédit Agricole Mutuel de Normandie-Seine » est officiellement créée le 25 octobre 2000 à Évreux et, moins de six mois plus tard, le traité de fusion sera approuvé lors d’une assemblée générale extraordinaire des trois caisses régionales. Si les administrateurs ont rapidement vu en la fusion de ces deux caisses normandes un projet nécessaire et riche en perspectives, l’accueil en interne de la part des colla- borateurs est plus contrasté, avec une large adhésion, mais quelques inquiétudes… Le parti pris de créer une entreprise entièrement nouvelle, tout en s’appuyant sur l’histoire mutualiste et les acquis de chaque caisse, envoie pourtant un signal rassurant. « Il a notam- ment été décidé de garder les sites des deux sièges, mais de les “spécialiser” en fonction des domaines d’excellence de chaque caisse. Ce que nous ferions à Évreux, nous ne le ferions pas à Bois-Guillaume et vice versa » , rappelle Henri Pavie. Par exemple, la Caisse de l’Eure avait développé avec succès la Bourse en ligne et la gestion de patrimoine, mais n’était pas encore au point sur la banque en ligne pour les opérations de tous les jours, à l’inverse de la Caisse de Haute-Normandie.

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1 IL ÉTAIT UNE CAISSE RÉGIONALE…

Répartition des fonctions support, redéfinition des postes, évolution de carrière et condi - tions salariales étant en jeu, la fusion donne donc lieu, dès septembre 2000, à des dis - cussions avec les organisations syndicales. Une commission de négociation est instituée, chargée d’harmoniser le statut social des deux anciennes caisses. Les comités d’en- treprise sont officiellement consultés au premier trimestre 2001 et, au total, 16 accords d’entreprise seront conclus. « Nous avons parfois eu des désaccords avec les syndicats, mais jamais sur le fond : personne ne remettait en cause le bien-fondé de la fusion » , assure Henri Pavie. Pendant deux ans, le processus de fusion a été porté par un fort désir de réussite, par- tagé à tous les échelons de l’entreprise, ainsi que par les élus. « Il faut rendre hommage à tous, à commencer par les dirigeants de la période préfusion, comme Pascal Acquaviva dont le retrait a permis au projet de se concrétiser, mais aussi à Henri Pavie et Philippe Lepicard, en tant que premier Directeur général et premier Président de la nouvelle caisse », souligne Pascal Lheureux, avant d’ajouter : « Il a fallu un peu de temps pour gommer les origines départementales et devenir une entité régionale à part entière…Cela n’aurait pas été possible sans eux, qui ont été les artisans de la stabilisation de la nouvelle entreprise et de la paix sociale. » En effet, il ne suffit pas de créer une nouvelle banque régionale, il convient surtout de la faire vivre et grandir du mieux possible. Migration informatique plus que délicate, for- mation de centaines de collaborateurs à leurs nouvelles fonctions, réorganisation des réseaux, préparation du passage à l’euro fiduciaire… La liste des défis qui attendent les équipes est conséquente. En attendant, ce 20 avril 2001 méritait bien une pierre blanche !

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UNE FABULEUSE AVENTURE COLLECTIVE

CONVERGENCE INFORMATIQUE : L’UNION AVANT LA FUSION

La convergence des systèmes d’information va contribuer à sceller le destin de Normandie-Seine. Embarquées ensemble dans cette opération complexe, les équipes de l’Eure et de la Seine-Maritime font preuve d’un bel esprit de coopération.

Loginord, Comète, Pégase…ça ne vous dit rien ? Pour rappel, à la fin des années quatre-vingt, le Crédit Agricole comptait 94 caisses régionales et autant de systèmes d’information (SI) différents ! Cette dispersion informatique est vite devenue un obstacle au lancement rapide de nouveaux produits et services puisqu’il fallait au préalable adapter chaque SI avant de pouvoir commercialiser une offre dans toute la France. Les premiers regroupements informatiques ont donc coïncidé avec la première vague de rapprochements, afin de gagner en compétitivité et réaliser des économies d’échelle. Dix ans plus tard, plusieurs caisses régionales, en voie de fusion à leur tour, sont en train de réviser leurs choix informatiques. C’est le cas de l’Eure qui décide de quitter la communauté Loginord (sur matériel IBM, avec la Somme et la Brie) pour intégrer la communauté Comète dont fait partie la Caisse de Haute-Normandie (avec Nord de France et Charente-Périgord). De son côté, Comète souhaite passer de Bull à IBM dans le cadre du projet Pégase. La période est critique, car la bascule sur le système d’information définitif de la nouvelle caisse régionale

doit impérativement intervenir avant l’avènement de l’euro fiduciaire au 1 er janvier 2002. Pour les équipes des deux caisses, qui venaient déjà de réussir le double passage à l’euro comptable et à l’an 2000, le défi est immense, mais ce choix est heureusement largement compris et accepté. Le projet demigration de la Caisse Régionale de l’Eure sur Comète est prévu pour juin 2001. Cela nécessite un fichier clients unique, des traitements informatiques uniques et, accessoirement, un code banque unique : avec des centaines demilliers d’opérations bancaires par jour, la charge pour les équipes est considérable ! Parallèlement, la communauté Comète engage sa mutation vers IBM, en collaboration chantier » en somme, avec son lot de dysfonctionnements informatiques, qui amène les équipes de Rouen et d’Évreux à collaborer étroitement. Nul doute que c’est aussi dans les difficultés de ce défi collectif qu’est né l’esprit d’entreprise Normandie-Seine… avec les informaticiens d’Évreux qui partagent leur expertise de cet environnement. Un « double

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Le mutualisme s’adresse à tous, au bénéfice du plus grand nombre, avec pour objectif d’accompagner les individus, de les faire progresser dans leur vie et dans leurs activités. C’est un comportement qui se situe entre la responsabilité et la solidarité, dans un esprit de fidélité réciproque.

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PORTRAIT

PHILIPPE LEPICARD PRÉSIDENT 2001-2006

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embre du bureau à la Caisse Régionale de Haute-Normandie dans les années quatre-vingt-dix – avant d’en devenir le président en 1999 –,

Philippe Lepicard a ensuite été le premier président de la Caisse Régionale de Crédit Agricole Normandie-Seine, de 2001 à 2006. Avant, pendant et après la fusion, il était là ! Rares sont les acteurs de cette belle histoire à avoir incarné à ce point la transmission et la naissance d’une nouvelle ambition mutualiste pour tout un territoire. Comme bon nombre d’élus du Crédit Agricole de sa génération, Philippe Lepicard, né en 1940 à Yvetot, est d’abord un agriculteur. En 1965, il s’installe avec son épouse, dans une ferme en polyculture à Sainte-Marguerite-sur-Fauville (commune de Seine- Maritime, aujourd’hui intégrée à Terres-de-Caux) : betteraves sucrières, élevage, production de dindes fermières…Au fil du temps, la culture betteravière devient son activité principale, une expertise qui lui vaut d’être primé au niveau national en 1975 à un Prix de la vocation betteravière. Dans les années quatre-vingt-dix, il prend de nouveaux engagements dans ce secteur en devenant président de la coopérative de Fauville. Sa position reconnue lui permet d’œuvrer à la fusion entre les sucrières de Fontaine- le-Dun et Colleville, une initiative qui, à l’époque, a en quelque sorte permis de « sauver la production betteravière dans le département ».

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L’engagement est une seconde nature pour Philippe Lepicard. L’année de son installation comme agriculteur, il devient aussi conseiller municipal de Sainte- Marguerite-sur-Fauville, commune dont il sera le maire en 1989 et le restera ensuite pendant vingt-cinq ans. Peu attiré par le syndicalisme, il a en revanche le désir d’agir dans le champ économique au bénéfice des agriculteurs. Cela le conduit tout naturellement à devenir sociétaire, puis à prendre des responsabilités d’élu au sein du Crédit Agricole, comme son père avant lui. Il n’a que 34 ans quand il devient Président de la Caisse locale de Fauville-en-Caux. De 1977 à 2001, il gravit ensuite tous les échelons du conseil d’administration de la Caisse Régionale de Haute-Normandie : administrateur, puis vice-président pendant neuf ans, et enfin Président. Il n’est élu à ce poste que depuis quelques mois en 1999 quand démarrent les discussions avec la caisse de l’Eure autour d’une éventuelle fusion. Il y voit une nécessité pour la Caisse de Haute-Normandie, mais aussi une évidence sur le plan administratif et géographique : « La Seine n’avait plus vocation à être une frontière, mais bien un moyen de communication à part entière entre les deux départements, un fleuve qui irrigue les deux rives et permet un développement économique grâce au transport fluvial. » Après la réunion « secrète » des directeurs, présidents et vice-présidents fin 1999, il se rend donc auprès des instances nationales (CNCA et FNCA) pour défendre le projet et obtient sans difficulté leur aval. Dès lors, plus rien n’entrave le processus qui s’est enclenché. « Je n’ai jamais eu de doute sur l’orientation prise en 2001 et c’est avec motivation et passion que se sont écoulées mes cinq années à la présidence de Normandie-Seine » , confie-t-il, vingt ans plus tard. Une de ses plus grandes satisfactions est d’avoir vu naître une culture d’entreprise commune, belle et forte, qu’il résume en quatre mots : « Crédit et confiance, développement et prudence. » Il rappelle d’ailleurs que « croire » en quelqu’un, c’est lui accorder du « crédit » au sens de l’étymologie,

SON COUP DE CŒUR

La Seine-Maritime et l’Eure sont une terre d’élection

pour le tourisme vert. Un patrimoine naturel

d’exception entre campagne et façade maritime, des sites touristiques uniques, à l’image des falaises d’Étretat ou des jardins de Giverny, des hébergements et activités de loisirs variés, et bien sûr sa proximité avec la capitale : ce territoire recèle tellement d’atouts ! Qui mieux que la « banque verte » pour l’accompagner et le soutenir ?

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et que, dans le monde bancaire mutualiste, c’est bien plus qu’une question de solvabilité. « C’est une confiance réciproque entre la banque et ses clients, entre les élus et les collaborateurs, qui garantit des relations solides quelles que soient les circonstances. » En parallèle, il occupe d’autres fonctions dans le groupe Crédit Agricole : membre de la commission de conciliation, membre de la commission de développement de la FNCA et administrateur de Predica. Retraité de l’agriculture en 2005, Philippe Lepicard a conservé son siège de président encore quelques mois avant de laisser la place à Philippe Lethrosne. Depuis, il n’a jamais cessé de garder un œil concerné et bienveillant sur l’évolution de la Caisse Régionale : « L’histoire est belle et cela rassure, pour l’avenir, d’avoir un échelon régional tel que Normandie-Seine, un outil bancaire performant à la disposition du territoire et de ses habitants qui a su utiliser, en vingt ans, la technique et le digital, toujours au service de l’humain. »

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UNE FABULEUSE AVENTURE COLLECTIVE

AVANT LA FUSION : UN SIÈCLE D’HISTOIRE

Archive : cartes postales de l'Eure

Bien que voisines directes, les Caisses Régionales de l’Eure et de Haute-Normandie sont longtemps restées à distance l’une de l’autre. Par leur histoire et leur trajectoire respectives au cours du XX e siècle, elles ont pourtant beaucoup en commun. Une banque née « au service du monde agricole et rural » qui a su s’adapter aux profondes mutations de l’agriculture, une banque qui a su s’ouvrir par la suite, pour favoriser l’accès de toute la société française aux services bancaires et soutenir d’autres secteurs de l’industrie et de l’économie… Ce mouvement historique, c’est celui de la grande majorité des caisses régionales de Crédit Agricole au cours du XX e siècle, d’une banque à vocation sociale à une banque universelle. Dans l’Eure et la Seine-Maritime, comme sur bien d’autres territoires français, l’histoire a commencé peu ou prou de la même façon. Elle trouve ses racines dans les débats mutualistes de la fin du XIX e et du début du XX e siècle, quand s’est imposée la nécessité de s’associer pour créer un système de crédit pour les agriculteurs afin que ceux-ci aient les moyens de se développer sans avoir à subir la loi des bailleurs de fonds…Culturellement, c’était une sacrée révolution, le monde paysan étant particulièrement rétif tant au concept d’association qu’à celui de crédit. À cette époque, l’argent se garde d’abord « chez soi » ! Pourtant, en l’espace de quelques décennies, le modèle mutualiste réussira à s’imposer dans ce milieu réputé très individualiste. Retour sur quelques jalons clés dans l’histoire des deux caisses…

LE SAVIEZ-VOUS? Un siècle avant la création de Crédit Agricole Normandie-Seine, la toute première Caisse Régionale de Haute-Normandie avait déjà pour circonscription la Seine-Inférieure (ancienne dénomination de la Seine-Maritime jusqu’en 1955) et l’Eure. Cinq ans avant que ce département ne crée à son tour sa propre caisse…

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1 IL ÉTAIT UNE CAISSE RÉGIONALE…

29 décembre 1906 Loi sur le financement des coopératives. Joseph Ruau, ministre de l’Agriculture : « La coopération, c’est l’action de plusieurs hommes en commun pour un but profitable, mais c’est aussi l’amélioration de l’homme au point de vue moral. C’est la substitution de la formule bien républicaine et bien nouvelle “l’union pour la vie” à l’odieuse formule “la lutte pour la vie” qui doit à jamais disparaître dans une société de justice et de civilisation. »

10 mai 1901 Création, à Rouen, de la Caisse Régionale de Crédit Mutuel Agricole de Haute-Normandie. Elle est fondée et gérée principalement par des notables locaux, convaincus que « le crédit a une mission sociale à remplir » . Son premier président est Édouard Fortier, sénateur et personnalité marquante du milieu agricole. Son vice-président est Raoul Gloria, négociant en charbon et alors maire de Bois-Guillaume.

1908 Le mandat d’Édouard Fortier s’achève dans les difficultés nées de tensions entre les administrateurs. Le Crédit Agricole n’existe que dans huit cantons et compte seulement 626 sociétaires sur environ 20 000 agriculteurs.

CAISSE RÉGIONALE DE CRÉDIT AGRICOLE DE HAUTE-NORMANDIE (1901-2001)

21 mars 1901 Création de la

première Caisse locale de Crédit Agricole de Seine-Maritime, à Montivilliers.

1900 Le Crédit Agricole fait ses premiers pas dans l’Eure à l’initiative du Syndicat agricole de l’arrondissement d’Évreux et de son président Joseph L’Hopital, ardent mutualiste et grand amoureux de la campagne normande. Une première caisse locale est créée à Évreux le 10 mars, suivront ensuite celles de Pacy-sur-Eure, Louviers, du Neubourg et de Boscroger.

13 octobre 1906 Création de la Caisse Régionale de l’Eure. Contrairement à la majorité des autres caisses régionales de l’époque, ses fondateurs ne sont pas uniquement des personnalités politiques locales, mais aussi des agriculteurs, dont Albéric de Mare. Il en sera président jusqu’en 1939.

CAISSE RÉGIONALE DE CRÉDIT AGRICOLE DE L’EURE (1906-2001)

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UNE FABULEUSE AVENTURE COLLECTIVE

1914 La Première Guerre Mondiale interrompt le développement des deux caisses.

À partir de 1909 Net développement géographique et financier sous la présidence de Georges Lormier. Le montant des prêts augmente de façon exponentielle (près de 5,5 millions de francs en 1914) et la Caisse Régionale participe à la création de coopératives laitières ou de distillation.

1917 Louis Montblanc devient directeur de la Caisse et va y jouer un rôle important jusqu’en 1962.

Années 1920 Le Crédit Agricole entre dans les esprits de tous les agriculteurs du département qui, au conseil d’administration, remplacent peu à peu les notables du début du siècle.

1913 La Caisse Régionale compte 39 caisses locales.

1910

1912 La Caisse Régionale compte 14 caisses locales.

192 1 La Caisse prête,

1923 L’Office national du

Absorption de Caisse Régionale

sous sa seule responsabilité, la somme alors considérable de 700 000 francs à la Société agricole d’électricité de la région d’Évreux.

conseil agricole demande par circulaire aux caisses régionales de faire vérifier leur comptabilité par un expert-comptable. Précision inutile pour l’Eure, qui dispose déjà d’un comptable expérimenté en la personne de son ancien directeur Alphonse Hubert (1906-1919), alors administrateur délégué.

du Vexin cinq ans après sa création.

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1 IL ÉTAIT UNE CAISSE RÉGIONALE…

1927 Ce sont les débuts de la péréquation mutualiste des ressources, autrement dit la possibilité pour une caisse de contracter des emprunts auprès d’autres caisses qui seraient excédentaires. Cela va s’avérer déterminant pour traverser la crise des années trente.

1936 Création de l’Office national interprofessionnel du blé, afin de réguler le marché du blé et de garantir un revenu aux producteurs. Les caisses régionales commencent, avec l’appui de la Caisse Nationale, à exercer une action déterminante dans l’organisation de la production agricole.

1945 Les caisses régionales s’engagent pour aider

à la reprise de l’activité dans les exploitations agricoles. Deux enjeux : financer la transition de l’agriculture et limiter l’exode rural en offrant des prêts à l’habitat rural.

1930 La Caisse Régionale reste solide et prospère malgré les perturbations qu’entraîne la crise.

1926 M. Dejohet, inspecteur de

1930 La Caisse Régionale se situe parmi les premières de France : sur 89 caisses régionales, elle est 11 e pour l’importance

1931 … alors que les

1933 Elle est contrainte d’abaisser le plafond des prêts, mais réalise quand même des opérations

la Caisse Nationale de Crédit Agricole, déclare : « La Caisse Régionale de l’Eure rend les plus grands services dans le département de l’Eure, où le crédit à court terme a pris dans ces dernières années un rapide développement (…) Au point de vue de son fonctionnement, elle se classe parmi les caisses régionales bien administrées et bien dirigées. »

krachs provoquent ici et là des retraits de fonds en panique, la Caisse conserve la confiance de ses déposants et des bases financières solides.

« blanches » pour aider les coopératives à traverser la crise.

de ses opérations d’escompte et 12 e pour le montant de ses dépôts…

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UNE FABULEUSE AVENTURE COLLECTIVE

1982 Le Crédit Agricole est habilité à financer l’ensemble des ménages.

1985 Après la publication de résultats négatifs (déficit de 9,60 MF), la Caisse remet en cause son organisation et lance sa reconstruction autour d’un nouveau projet sous le double signe de la recherche d’efficacité et de valeur ajoutée.

1994

Second établissement du département en collecte comme en crédit, la Caisse voit progresser son activité assurance.

1995 Pascal Acquaviva

1968 Mise en service d’un

1991 Émission des certificats coopératifs d’investissements.

prend la direction de la Caisse avec pour priorité d’en redresser la situation financière.

premier ordinateur Bull, début de l’informatisation de la Caisse.

8 juin 1959 Décret permettant au Crédit Agricole de financer

Fin des années 1990 La Caisse Régionale, reconnue pour sa gestion rigoureuse et ses bons résultats, est l’une des plus performantes de France.

le logement en milieu rural. Le rôle de Louis

Duguay (Président de la Caisse de l’Eure de 1950 à 1974) à la commission interministérielle d’habitat rural fut déterminant.

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UN TERRITOIRE SINGULIER, UNE RÉGION PLURIELLE

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2 UN TERRITOIRE SINGULIER, UNE RÉGION PLURIELLE

our les uns, c’est d’abord un ciel, une lumière. Pour d’autres, une terre généreuse où alternent bocages verdoyants, champs cultivés à perte de vue et vergers. Souvent associé à une nature bucolique entre terre, Seine et mer, le territoire haut-normand porte aussi par endroits l’image d’une région industrielle et urbanisée. Un paradoxe qui illustre l’extrême diversité des atouts réunis de l’Eure et de la Seine-Maritime… p

Entre Crédit Agricole Normandie-Seine et sa terre d’élection, c’est une véritable communauté de destin et de desseins qui s’est tissée ces vingt dernières années. La Haute-Normandie, ce sont des terres nourricières, des industries prospères, de hauts lieux touristiques et bien d’autres atouts que Crédit Agricole Normandie-Seine s’attache chaque jour à accompagner, mettre en valeur et faire fructifier.

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UNE FABULEUSE AVENTURE COLLECTIVE

Si l’on s’en tient aux seuls critères de l’Insee, la Haute-Normandie est une région essentiellement urbaine. Les villes, avec leurs zones d’influence, y représentent en effet 75 % du territoire et 90 % de la population. Cela tient à la présence de deux ag - glomérations importantes, Rouen et Le Havre, mais aussi à de nombreuses villes de taille moyenne bien réparties sur les deux départements. Pour autant, la Haute-Normandie conserve une identité rurale et agricole très forte. Sur ce territoire où vivent et travaillent 1 850 000 habitants, l’agriculture a depuis toujours façonné les paysages, leur conférant leur identité particulière. Pays de Caux, de Bray, d’Ouche ou d’Auge, Lieuvin, Vexin normand, campagne Saint-André, Roumois, plateaux du Neubourg et de Madrie…Chacune de ces appellations désigne bien plus qu’une zone géographique de l’Eure ou de la Seine-Maritime. S’y rattache en filigrane l’évocation d’un paysage, d’un terroir, et bien souvent d’un patrimoine historique. Ici d’an - tiques moulins à eau, là des clos-masures au cœur du bocage, ailleurs manoirs et châteaux forts, abbayes et cathédrales, maisons à colombage…Tour à tour grandioses ou discrets, ils sont des témoins de l’occupation plus quemillénaire de la région par l’homme et contribuent à faire de la Haute-Normandie une destination touristiquement attractive. Visites patrimo- niales et gastronomiques, tourisme vert et balnéaire : ces deux départements regorgent de trésors et d’activités à découvrir, qu’ils soient offerts par la nature ou proposés par l’homme. Les signes du dynamisme industriel de l’Eure et de la Seine-Maritime nemanquent pas non plus, à commencer par les infrastructures portuaires liées à la Seine et à la façademaritime. Ce fleuve qui fit longtemps figure de « frontière » entre deux caisses régionales s’est révélé, dans le contexte de la création de Crédit Agricole Normandie-Seine, davantage comme un trait d’union et de coopération au sein d’un un tissu économique attractif, dense et varié. Laissons à présent les quatre éléments guider une présentation – non exhaustive ! – des atouts de cet environnement : quand la terre, l’eau, le feu et l’air donnent leur propre lecture du territoire haut-normand…

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CHÂTEAU-GAILLARD

La forteresse de Richard Cœur de Lion, duc de Normandie et roi d’Angleterre, a été érigée en 1197. Depuis ses ruines encore majestueuses, la vue est à couper le souffle sur les boucles de la Seine et les toits du Petit-Andely, tout proche.

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J’aime ce pays et j’aime y vivre parce que j’y ai mes racines, ces profondes et délicates racines qui attachent un homme à la terre où sont nés et morts ses aïeux, qui l’attachent à ce qu’on pense et à ce qu’on mange, aux usages comme aux nourritures, aux locutions locales, aux intonations des paysans, aux odeurs du sol, des villages et de l’air même.

Guy de Maupassant Écrivain, né à Tourville-sur-Arques

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2 UN TERRITOIRE SINGULIER, UNE RÉGION PLURIELLE

NORMANDIE-SEINE « CÔTÉ TERRE »

Une région généreuse et fertile Bien que le nombre de ses exploitations agricoles baisse régulièrement depuis le début des années quatre-vingt-dix, la Haute-Normandie reste une grande terre nourricière. Elle se caractérise par une forte proportion de sols cultivés et de prairies qui occupent 65 % du territoire (contre 51 % au niveau national). Le climat et la qualité des sols sont propices à une grande diversité de cultures, ainsi qu’à l’élevage. Ainsi la région donne à voir une large gamme d’exploitations, depuis la petite ferme au toit de chaume jusqu’au grand domaine industrialisé, avec des différences assez marquées entre les deux départements qui la composent : l’Eure reste majoritairement orienté vers les grandes cultures céréalières (60 % des exploitations), tandis qu’en Seine-Maritime la répartition entre grandes cultures, polyculture et élevage est plus équilibrée. En superficie, la première culture est le blé, suivi par le colza et l’orge. Les autres spécialités agricoles de la région sont de longue date la pomme de terre (8 % de la production nationale) et la betterave (5 %). Développé plus récemment, le lin est devenu emblématique de la région et a permis l’émergence d’une filière porteuse.

LE CLIMAT ET LA QUALITÉ DES SOLS SONT PROPICES À UNE GRANDE DIVERSITÉ DE CULTURES, AINSI QU’À L’ÉLEVAGE.

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